Le spectacle Barbès Café (du 11 au 28 mai 2011) a été un succès retentissant. Le public a, tous les soirs, pris d'assaut le Cabaret sauvage, pour voir un spectacle festif, intelligent, pétillant, voire carrément explosif. Chapeau bas pour les organisateurs, pour leur création originale qui nous réconcilie avec nous-mêmes. Une leçon de vivre ensemble. Paris. De notre correspondant Avant d'aller plus loin, les noms d'abord : l'équipe artistique : Meziane Azaïche (conception et accessoirement propriétaire du Cabaret sauvage), Géraldine Benichou (mise en scène), Kamal Hamadi (parolier), Aziz Smati (création vidéo) et pour coordonner tout ce beau monde, Mohammed-Ali Allalou. Ensuite, l'orchestre au grand complet, avec à la baguette Nasredine Dalil. Maintenant le concept : autour d'un bar tenu par Lucette, on voit défiler l'histoire de l'immigration des années 50 à nos jours, de Slimane Azem à Rachid Taha ou Mous et Hakim. On entend le bruit des chaînes de montage, les soupirs déchirants de l'exil, la solitude des chibanis sans âge. Aujourd'hui, la thématique a changé, le racisme, la marginalisation, la place dans la société française. Comme une continuité historique : que sommes-nous devenus ? Le public, en se ruant tous les soirs au Cabaret sauvage, ne s'y est pas trompé. Café Barbès est à fréquenter sans modération aucune. Comme dans la chanson de Slimane Azem qui demande à la serveuse une autre tournée, nous disons avec lui : «Ya Madame, encore à voir (boire) !» Ce spectacle d'une rare puissance nous réconcilie avec nous-mêmes et rend justice à tous les anciens (Cheikh El Hasnaoui, Kamel Hamadi, Mohamed Jamoussi, Missoum, Salah Saâdaoui, Mohamed Mazouni, H'nifa, Dahmane El Harrachi, Akli Yahiatene, etc.). Barbès Café est comme un élixir qui nous réapprend à nous aimer. Oui, Nord-Af (ou Maghrébin de nos jours) est beautiful. Barbès Café a provisoirement baissé rideau, après deux semaines de douce nostalgie emplie d'un bonheur communicatif. Spectacle festif et noblement engagé, il montre plus que ne démontre. Chaque soir, un invité vient mélanger son univers à celui de l'orchestre de Nasredine Dalil. Aït Menguellet, Akli D, Vigon, Gaâda, Djura, Naïma el Djazaïria, Kamel Hamadi et Rachid Taha s'y sont collés avec beaucoup de plaisir. Le tube de Rachid Taha Voilà que ça recommence est devenu l'hymne de la quinzaine, il résonne comme une réponse au climat étouffant nourri par des discours anti-immigrés de la majorité au pouvoir. Kamel Hamadi, Aziz Smati, Mohamed-Ali Alalou, un trio gage de qualité. Un label «made in chez nous», très rare pour être relevé. Tout ça pour dire que si un lecteur a les oreilles de la ministre de la Culture, il n'hésitera pas à lui murmurer que ce spectacle doit absolument être programmé en Algérie. Urgence nationale. Au nom de l'art, de la mémoire et de nos anciens.