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Un artiste de la distinction innée et une valeur sûre de l'avis de nombreux spécialistes
Publié dans La Nouvelle République le 16 - 10 - 2011

«Je me demandais l'autre jour à quoi sert le théâtre ? A imiter la vie ? Pourquoi l'imiter puisqu'elle est là ? Elle a besoin d'être imitée pour qu'on la comprenne. Qu'est-ce que ça veut dire comprendre la vie ? Ça veut dire, en même temps qu'on la vit, la voir un peu étrangère. Qu'est-ce que ça apporte ? On se dédouble. C'est-à-dire ? On sort de soi et on fait un retour à quelqu'un qu'on ne connaît pas forcément très bien. Pourquoi ne pas rester tranquillement dans le soi qu'on connaît ? C'est le propre de l'homme. Quoi ? D'aller voir ailleurs tout en restant là.»Michel Vinaver
Abelhamid Belkhodja un artiste de la distinction innée et une valeur sûre de l'avis de nombreux spécialistes. Il a pu décrocher deux grappes d'or et différents prix dans diverses manifestations et festivals. Ce natif de Chlef est un séducteur discret, un comédien, un scénariste, un auteur d'œuvres théâtrales, un metteur en scène et le parrain de jeunes talentueux. Il est le charmeur prolixe des planches, avec un parcours riche et complexe. Ces empreintes sont gravées un peu partout et ses œuvres se rythment avec l'haleine de l'actualité algérienne. A travers ses œuvres, il met l'accent sur les différents phénomènes. Et il a réussi à introduire des thèmes sociaux et politiques qui gardent le public dans un état d'exaltation. La Nouvelle République : Qui est Abdelhamid Belkhodja ? Abdelhamid Belkhodja : Je suis un homme de théâtre, un comédien, un auteur, un scénariste, un metteur en scène. Et de plus, je suis le directeur de l'ODEJ. A travers mes œuvres j'inculque et je véhicule des messages au public et aux adeptes du quatrième art. Mes œuvres sont façonnées à travers ma vision et le vécu de l'être humain. En effet, je suis né à Chlef le 9 novembre 1959. J'ai poursuivi des études en art dramatique à Aïn Turk (Oran). Bien sûr, dans le bain des cadres de la jeunesse. Et comme j'ai été major de promotion en 1986, j'ai eu le privilège de poursuivre des études en droit. En parallèle, j'ai occupé la tâche de professeur en art dramatique au sein de l'Institut supérieur de la formation des cadres de la jeunesse d'Oran. Le mouvement théâtral en Algérie a connu différentes étapes et vu naître différents flambeaux qui illuminent son histoire. Dans cette foule de noms et de personnalités, par qui avez-vous été influencé ? Certes, l'histoire théâtrale algérienne est trop riche, Allalou, Bachtarzi, Rachid Ksentini, Abderahmane Kaki et autres, mais j'ai été beaucoup plus influencé par le défunt Abelkader Alloula. Ce penchant n'est pas fortuit. Cet homme, dans les années 1980, se réappropria les codes scéniques de la halqa, du mdih, du goual dans l'espace de l'écriture théâtrale. Ses fans dégustent la prose et le rythme. Il a pu mobiliser plusieurs instances créatrices. En outre, je l'ai côtoyé et j'ai suivi de près ses travaux. A l'époque, nous recevions des invitations pour assister à ses pièces et les débattre. Par ailleurs, mondialement, d'autres noms s'imposent tels Molière, Nikolaï Gogol, Artaud, Brecht, Grotovski… Permettez-moi d'évoquer deux noms qui ont chamboulé et vraiment promu la scène théâtrale à Chlef. Je qualifie leurs touches comme une réforme dans la scène théâtrale. La première promotion des scénographes a connu deux Chélifiens, Habbal Boukhari et Halim Rahmouni. Ces deux scénographes ont pu, avec leur vision scénique, surprendre le public. Ils ont agrémenté les planches par la lumière, le décor et les costumes. Voulez-vous bien nous parler de quelques-unes de vos œuvres ? Mes œuvres sont nombreuses. J'ai débuté avec les sketches et quelques pièces. Ma première pièce théâtrale s'intitule El Atlal el Bakia (Les ruines qui pleurent) ; c'était en 1987. J'en suis l'auteur et le metteur en scène. Pour les comédiens, ils étaient sélectionnés parmi mes étudiants d'Oran et la troupe Nass El Hikma. Le thème était puisé du séisme qui a ébranlé Chlef. Un spectacle qui a engendré un grand tapage. J'ai voulu envisager cette catastrophe naturelle à travers la dérision, le divertissement. Ces tableaux présentent la souffrance des gens entre la perte le désespoir, les moult souffrances sur le terrain et les séquelles qui persistent à nos jours malgré l'entraide entre les peuples, la distribution des provisions... Pour l'année 1990, je peux citer une autre pièce dont je suis l'auteur et le metteur en scène, El Irtikaâ. Elle parle de l'évolution dans son contexte et provoque un thème philosophique et politique. L'Algérie était considérée comme un laboratoire de toutes les idéologies et les expériences politiques, sociales et économiques. Donc, une halte pour pister derrière ces procédés. Il y aussi La bataille d'Orléansville, une épopée dont je suis l'auteur, et le metteur en scène. Elle relate la chronologie de la guerre coloniale à Chlef entre 1954 et 1962. Elle était jouée par 28 comédiens et il y avait même des monologues. En 1996, Chlef a abrité le première rencontre de monologues. Elle était chapeautée par la direction de la jeunesse et des sports. Cette rencontre était un phare rayonnant. Elle a pu créer la concurrence et encourager les talentueux. C'était un environnement favorable pour la création et l'évolution de cet art. Moi-même, j'ai été enthousiasmé. Ce qui m'a stimulé à écrire et à créer. Je note, à titre indicatif, Pause-café, Les jumeaux et j'ai pu décrocher quelques prix. Hormis, ces rencontres ont été arrêtées à leur huitième édition et je regrette cela profondément. Quel regard portez-vous sur le théâtre en Algérie ? Mon regard est positif, et ce, en dépit des martyrs et de la décennie noire. Le théâtre est un moyen de résistance contre l'obscurantisme. Et, à nos jours, il lutte pour évoluer et s'améliorer. Les pièces théâtrales sillonnent le pays pour s'approcher des amateurs du quatrième art. Mais permettez-moi d'évoquer un autre point au niveau local. Je tiens à vous informer que Chlef est une pépinière de gens talentueux, mais ces jeunes sont dans l'embarras. L'édification d'un théâtre régional s'impose avec acuité. Ces jeunes ont besoin d'être structurés et stabilisés par des emplois permanents, ce qui les aidera à exceller dans le domaine. Certes, les pièces sont jouées au sein du centre El Arbi Tebessi ou au sein du musée régional, mais leurs planches ne sont pas idoines pour les présentations. Il y a toujours un problème de dimensions, de lumière, de son et de tout ce qui a une relation avec les particularités et les points de repère de la scène théâtrale. On vous appelle le moissonneur des prix, voulez-vous bien nous en nommer quelques-uns ? J'ai été couronné par la grappe d'or en 2000 pour la pièce L'invité du sénateur dont je suis l'auteur et le metteur en scène. Les événements tournent autour de la scène politique algérienne et la réconciliation. Dans la sixième édition du festival national comique de Médéa, j'ai emporté la grappe d'or. J'ai participé à cette compétition avec la pièce de Mon ami le fantôme, c'est une adaptation satirique de la célèbre œuvre de Molière L'avare. Comme j'ai reçu le prix de la meilleure mise en scène sur la même pièce. C'est une consécration de plus, dont le public médéen a longuement ovationnée. Je peux ajouter le premier prix pour le monologue Les jumeaux dont je suis l'auteur et le metteur en scène. Cette pièce traite d'un conflit : c'est l'histoire d'un homme qui se regarde dans le miroir et parle avec lui-même. D'un côté, il veut se rebeller, mais, de l'autre, c'est un conservateur avec des principes. J'ai gagné le deuxième prix pour le monologue Pause-café, dont je suis l'auteur et Habbal Boukhari le metteur en scène. J'ai aussi décroché un troisième prix avec un autre monologue interprété par le comédien Ali Abd El Mereïme. J'ai été le metteur en scène et j'ai fait une adaptation de Nicolaï Gogol. Quels sont vos projets ? Je suis en train d'écrire un scénario pour un court métrage. J'ai commencé la reprise du monologue Zahrat El Narisse dont je suis l'auteur et le metteur en scène. Ce monologue sera interprétée par une jeune comédienne, Amel Bennedine. Le thème traité est le narcissisme. Une histoire véridique, dont l'héroïne est une malade mentale. A nos jours, elle se déplace entre les coins du chef-lieu de la wilaya. Dans les années soixante-dix, elle comptait parmi les plus belles femmes et les plus renommées. C'était une femme de société et de pouvoir et ses connaissances attestent qu'elle se compte parmi les personnalités qui ont accueilli le président Ben Bella lors de sa visite à Chlef.

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