Jusqu'à hier, seize candidats indépendants et six partis ont retiré les formulaires de candidature pour les élections législatives du 10 mai prochain, bien qu'aucune formation politique ou liste indépendantes n'ait encore déposé de dossier de candidature selon la radio locale. Par ailleurs, selon nos sources, toutes les dispositions ont été prises pour la réussite de l'opération, avec une administration neutre dans la mesure où ce sont des magistrats qui piloteront l'opération. A noter que l'administration a déjà installé la commission de wilaya pour la préparation matérielle des élections législatives et a subdivisé l'opération en installant des cellules de réception des dossiers de candidature et le recensement des équipements nécessaires aux élections et leur suivi. Le délai des retraits des formulaires et le dépôt des dossiers de candidature au scrutin des élections législatives est fixé au 26 mars prochain. Selon les observateurs du terrain politique, les listes libres dépasseront en nombre les partis politiques alors que la plupart des têtes de liste sont des militants de partis connus, qui ont choisi à l'issue de conflits internes dans leurs partis d'opter pour la voie libre pour obtenir le ou les sièges sur les 5 sièges qui reviennent aux élus par majorité. Les candidats aux élections législatives, leurrés par leur popularité, se sont jetés à corps perdu dans cette bataille qui s'avère difficile, bien que certaines têtes de liste, des milliardaires, soient prêts à débourser des millions pour un siège au sein de l'hémicycle Zirout-Youcef. «Ce n'est pas facile de collecter 4 000 signatures», a avoué une tête de liste indépendante à Tissemsilt, où 16 listes indépendantes ont été retirées en vue des prochaines législatives. A Tissemsilt, les candidats devront récolter 4 000 signatures (400 par siège), un chiffre qu'aucune liste n'a atteint à ce jour. «Nous avons pu collecter 3 000 signatures, mais le plus dur reste à faire», a dit un candidat indépendant de Tissemsilt, soulignant que les citoyens, les jeunes en particulier, ne «louent» leur voix que contre une somme variant entre 2 000 et 3 000 DA. Cet engouement pour les législatives ne répond à aucun critère politique puisque des indépendants ont leurs frères ou leurs enfants sur des listes partisanes. «Reste à savoir pour qui vont voter les autres membres de la famille», se demande un candidat. De nombreuses listes seront rejetées par les magistrats parce que certains jeunes ont signé pour plusieurs listes. Les partis, quant à eux, peinent à trouver des candidats sérieux et populaires, alors que les anciennes formations, telles que le FLN, le RND, le PNSD, le RA, le MSP et autres, n'ont pas encore dévoilé leur «jeu». Le chef d'un parti, qui ne réapparaît sur la scène politique que lors des rendez-vous électoraux, s'est fendu d'un encart publicitaire sous la forme d'un appel à candidature et recrute des courtiers et toutes personnes intéressées à faire acte de candidature sous la bannière de sa formation politique. Une pratique pour le moins insolite qui dénote du degré d'archaïsme qui caractérise l'organisation et le fonctionnement de nombre de partis politiques. Quel sens donner à cette façon toute singulière de certains partis lesquels, pour n'avoir aucune base militante, semblent éprouver toutes les peines du monde à trouver des candidats pour les représenter aux prochaines élections législative. Cette sortie de certains présidents (es) des partis politiques ne fait qu'exprimer tout haut, publiquement, ce que bien de responsables de partis pensent tout bas. Elle traduit en tout cas une réalité amère et inquiétante de l'exercice du multipartisme en Algérie, gage de la santé démocratique d'un pays. Que peut-on attendre d'un parti politique qui en vient à faire du racolage, de la vente à la criée et au rabais de candidature, faute de militants et de cadres aptes à affronter les suffrages populaire. Les offres de candidatures se monnaient sans état d'âme. Le phénomène n'est pas nouveau. L'établissement des listes de candidatures ressemble à un marché de négoce entre clans influents. Des noms sont écartés, d'autres sont retenus sur la base, souvent, de critères clientélistes qui n'ont rien à voir avec la compétence, le militantisme, l'aura personnelle du candidat et ses chances d'être élu. L'argent sera, sans doute, le maître mot inavoué du jeu électoral. Devant l'absence de mécanismes de contrôle du financement des campagnes, le business des listes électorales fera, sans aucun doute, un grand ravage. L'argent risque de couler à flots. Deux campagnes électorales sont attendues. Les législatives et les locales constituent un double enjeu qui offre «un marché juteux» aux opportunistes de tout poil. Le business des listes électorales fera un ravage sans précédent. L'achat des voix n'est un secret pour personne. Bien au contraire, cette pratique est devenue, ces dernières années, monnaie courante au sein de la classe politique. Les critères de sélection des candidats n'obéissent plus aux principes de l'idéologie et du militantisme. «La race qui croit en les idées idéologiques est en voie de disparition.» Un constat partagé par la plupart des citoyens interrogés. Nul ne peut nier que c'est la «chkara» qui impose son diktat. La jonction entre l'argent et la politique se confirme au fil des échéances. Certes, le financement des campagnes est assuré par les partis et l'Etat rembourse un pourcentage, il n'en demeure pas moins qu'une grande partie passe sous la table. Le financement des campagnes par des particuliers constitue une grande zone d'ombre. Les formes de contribution se multiplient. Les hommes d'affaires multiplient les cadeaux à l'adresse des partis. Waâda, réservation des salles de meeting, hébergement, transport, affiche électorale, sans parler de l'argent liquide sont des services assurés par les affairistes. Des financements estimés à des millions pour ne pas dire en milliards de dinars. Devant l'absence de mécanismes de contrôle du financement des campagnes, les lobbies agissent à leur guise. Rien n'est gratuit. En contrepartie, ils obtiennent des marchés juteux estimés à des milliards de dollars. Des leaders politiques ont même reconnu l'influence de l'argent sur la politique. «Aujourd'hui, on sait tout ce qui se passe sur le terrain. Des partis vendent leurs formulaires à des candidats pour qu'ils n'aillent pas collecter les signatures», a-t-il cité en déplorant le fait que «ces formulaires se vendent à des dizaines de millions de centimes». Cette fois-ci, ça sera encore pire. La course s'annonce féroce. Les affairistes ne lésineront pas sur leurs moyens pour décrocher un siège à l'APN. L'enjeu vaut bien la chandelle sachant que les prochaines élections sont capitales. Contrairement à 2007, la conjoncture a beaucoup changé. De nouveaux éléments ont été introduits. Le premier élément, ce sont les avantages qu'offre le statut de député. Avec un salaire de 30 millions par mois et des avantages aux frais de la princesse, les convoitises se multiplient. La bataille pour la députation donne d'ores et déjà un avant-goût du scénario électoral. Les tractations sont entamées bien avant le rendez-vous. Afin d'assainir le terrain, les observateurs de la scène politique estiment que c'est l'occasion ou jamais de définir les règles du jeu électoral. La révision de la loi électorale se présente comme une opportunité pour renforcer les mécanismes de contrôle et éviter le pourrissement de la vie politique. Ces pratiques ne sont pas propres à l'Algérie. Quoi qu'il en soit, au moment où nous mettons sous presse, rien ne filtre des formations politiques, laissant observateurs et militants sur leur faim.