Réorientation stratégique nouvelle post-révolution pour les pays arabes ? Entre le renversement des chefs d'Etat et la tenue des élections, aucun pays arabe ne s'est octroyé le temps d'une transition. Pis, aucun pays n'a fait de cette transition le produit d'une transaction. Passage rapide de la dictature semi-laïque à celle de l'islamisme ou alors retour (en avant toute !) au système autoritariste ou dictatorial. Dans ces derniers cas, on ne peut pas dire qu'il y a révolution. Il y avait une révolution dans le sens où, dans chaque pays arabe, les murs de la peur sont tombés. Mais tombés pourquoi ? Au profit de qui et de quoi ? Si on maintient le concept de révolution et non pas de révolte, nombre d'observateurs parlent déjà de «révolution confisquée». Indépendances confisquées, révolutions confisquées. Il n'y a que les seules forces organisées qui peuvent les confisquer. Cette bipolarisation est d'autant dangereuse qu'elle oppose deux forces qui disposent des moyens de la violence. La première est celle du système en place qui n'acceptera jamais de s'euthaniser, tandis que la seconde dispose d'une idéologie (l'islamisme) capable de galvaniser les foules et les canaliser vers l'expression de la violence. Deux systèmes qui se rejoignent par les moyens qu'ils mettent en œuvre, à savoir demeurer par la force au pouvoir, accéder par la force au pouvoir. Que deviennent les démocrates dans ce duel permanent au sommet de ceux qui sont pourvus de moyens d'intimidation ? Révolution confisquée ? Les démocrates sont sommés par chaque camp d'œuvrer à l'aider ou à se taire. Avec son slogan du début de l'expression du pluralisme politique, Aït Ahmed avait inventé le concept du «ni ni». Ni Etat policier, ni Etat intégriste. Sa force à l'époque était qu'il allait être le seul à l'Assemblée nationale à représenter le camp démocrate.