L'Algérie a besoin d'une approche plus prudente en matière de dépenses, notamment celles de fonctionnement, qui auraient atteint leur «plafond» en 2012, a averti, hier, le ministre des Finances, Karim Djoudi. «Il faut qu'il y ait aujourd'hui une prise de conscience sur le fait que nous avons besoin d'une approche beaucoup plus prudente en matière de dépenses notamment celles de fonctionnement et surtout celles relatives aux salaires de la Fonction publique où nous avons atteint le plafond», a déclaré M. Djoudi à des journalistes à l'issue de la clôture de la session du printemps du Conseil de la nation. Interrogé pour savoir s'il s'agit là d'un plan de rigueur budgétaire qu'il préconise, le premier argentier du pays a expliqué qu'il s'agissait juste d'une approche «prudentielle», car «une forte réduction des dépenses d'investissement impactera alors la croissance économique, l'emploi et les revenus». «Il ne s'agit pas d'une action purement mécanique», a t-il jouté, mais de «décisions (relatives aux dépenses) que nous pourrions prendre non pas sur un fait ponctuel mais sur la base de nos observations à moyen terme». En 2013, la réduction des dépenses de fonctionnement sera cependant «mécanique» par le fait que les rappels au titre des régimes indemnitaires et statuts particuliers ne sont pas renouvelables, a-t-il fait remarquer. Quant aux dépenses d'équipement, «les projets en cours continueront d'être financés alors que les financements de nouveaux projets seront étudiés au cas par cas selon les priorités fixées et selon les capacités de financement», a-t-il avancé. Aussi, et vu que l'enveloppe consacrée au plan d'investissement public (2010-2014) a été inscrite à hauteur de 87% depuis le lancement du plan et qu'il ne restait que 13% du budget quinquennal à allouer, le rythme annuel des dépenses d'investissement va baisser de son côté, a encore souligné le ministre. La Banque d'Algérie, dans son rapport annuel sur l'économie algérienne en 2011, présenté dimanche à la presse, a mis en garde contre la poursuite de la hausse des dépenses publiques. «Les dépenses budgétaires ont progressé de 28,3% en 2011 contre 5,2% en 2010, tirées par l'envolée des dépenses de fonctionnement les plus importantes de la décennie ; un tel rythme n'est pas soutenable, alors que la vulnérabilité des finances publiques aux chocs externes s'est encore accentuée», indique le rapport 2011 de la BA. L'épargne publique... En 2011, les dépenses budgétaires ont totalisé 5 731,4 milliards de DA contre 4 466,9 milliards de DA en 2010, en hausse de 28,3%. Le solde budgétaire réel, basé sur le prix réel du prix de pétrole, affiche tout de même un très léger déficit estimé à 28 milliards de DA. M. Djoudi n'as pas caché par ailleurs ses craintes de voir la crise économique mondiale s'approfondir et se prolonger dans le temps. Cependant, les performances financières de l'Algérie, dotée de quelque 200 milliards de dollars de réserves de change et une épargne publique (FRR) de près de 5 500 milliards de DA avec une dette extérieure autour de 4 milliards de dollars, sont en mesure d'amortir les éventuels effets d'une baisse des cours du pétrole à moyen terme. En outre, l'Algérie élabore en fait sa loi de finances en se basant sur un prix de baril autour de 120 dollars alors qu'en termes de décaissement en fin de période, souligne le ministre, les dépenses effectives se font sur la base d'un baril autour de 75 dollars. «Le risque est donc atténué», a-t-il assuré. Maintenant, «si la crise financière européenne se confirme, nous seront obligés d'avoir des reports de projets inscrits et une plus grande rigueur dans nos dépenses de fonctionnement», a-t-il affirmé. Sur l'inflation, M. Djoudi a affirmé que c'était «un élément qui interpelle le ministère surtout que l'année en cours a vu une poussée inflationniste». «Nous attendons à ce que la Banque d'Algérie, dans le cadre de sa politique monétaire, régule un peu plus l'inflation de manière à ce qu'elle n'impacte pas les dépenses de l'Etat et le pouvoir d'achat», a-t-il souhaité.