Qu'il semble déjà loin ce soir de titre de 2010 pour les supporteurs marseillais. Le club phocéen n'a certes pas été si ridicule depuis avec notamment deux nouvelles Coupe de la Ligue, mais il se ressent dans cet OM, derrière cette perte d'ambition, comme l'absence d'un vrai décideur. Assez paradoxalement – encore que – c'est en atteignant le point culminant de sa remontée que l'OM des années 2000 va connaître son déclin. En conflit avec Vincent Labrune alors président du «conseil de surveillance» de l'OM, Pape Diouf est évincé quelques semaines après la perte du titre face à Bordeaux. Pour justifier sa décision, le directoire explique alors que Pape Diouf ne respectait pas «le fonctionnement normal et la discipline d'une entreprise». Plus implicitement, le Sénégalais qui prenait de plus en plus de poids à l'OM commençait à faire pas mal d'envieux. Nommé en remplacement du Sénégalais, Jean-Claude Dassier avait entre autres comme objectif d'amener enfin un titre, tout en assainissant les finances du club pourtant au vert. Mais seul le premier point sera atteint. Lucho, Heinze, Morientes, Diawara, Edouard Cissé, M'bia... Marseille enfile les contrats en or comme des perles, sans compter des primes de titre mirobolantes. Souvent pointé du doigt sur cette philosophie de recrutement à court terme, Didier Deschamps n'en est pour autant pas le complet responsable. Le champion du monde 1998 a certes toujours montré sa préférence pour les joueurs d'expérience. Le titre de 2010 et les performances de Heinze et Lucho lui ont donné raison, mais il ne s'est pas vu opposer une résistance farouche de la part de dirigeants. Ces derniers attendant un an pour se rendre compte du trou se creusant toujours un peu plus dans les caisses du club. Braderie permanente Car l'OM est finalement tombé de haut après ce titre de champion, et l'absence d'un dirigeant à poigne ne se fera jamais autant sentir. Pressé par ses difficultés financières et le besoin de recruter un grand attaquant, le club phocéen va agir dans l'urgence totale et céder à tous les caprices. Outre le cas M'bia, autorisé à aller voir son marabout au Cameroun alors que la saison avait déjà commencé, c'est celui de Mamadou Niang qui a marqué les esprits. Parti pour rester, le meilleur buteur du championnat de France 2009-2010, aura finalement droit à un bon de sortie après deux journées de championnat. Ben Arfa, passé du rang de pestiféré à celui de messie en raison du départ précipité du départ du Sénégalais, va partir au clash avec sa direction et sera bradé à Newcastle. L'absence totale de gestion ne s'arrête d'ailleurs pas là, puisque Morientes, transparent tout le temps qu'il aura passé à Marseille, sera payé plus d'un million d'euros pour accepter de résilier son contrat. L'affaire du siècle ! Côté arrivées, l'OM se retrouve dans l'obligation d'acheter Gignac 18 millions d'euros, soit presque le double de ce que Toulouse demandait en début de mercato, et se fait une grande frayeur en signant le contrat de Loïc Rémy avant que ce dernier ne passe la visite médicale. Diagnostiqué d'une anomalie cardiaque, l'ancien Niçois sera heureusement déclaré apte à la pratique du football. L'été suivant n'est pas beaucoup plus reluisant. Dassier plus aux commandes, c'est désormais Vincent Labrune qui prend les rennes du club. L'ex-conseiller de Robert Louis-Dreyfus assure une présidence distante et se fait rare dans les médias, déléguant son rôle de porte-parole tantôt à José Anigo, tantôt à Didier Deschamps. Les finances plombées et l'arrivée d'Alou Diarra actée, l'OM se débarrasse de plusieurs joueurs sans même essayer de les vendre. Gabriel Heinze, Fabrice Abriel, Edouard Cissé et Vitorino Hilton sont donc laissés libres, ce dernier touchant même une prime pour accepter de signer à Montpellier. En mars dernier, Pape Diouf confiait par ailleurs au sujet de José Anigo que le technicien marseillais n'était pas forcément le meilleur des négociateurs : «José Anigo, il ne faut pas lui confier les discussions financières. Quand on voulait un joueur, José était toujours prêt à payer un peu plus pour ne pas que le joueur nous échappe. Et quand nous voulions nous séparer d'un joueur, il était prêt à le vendre un peu moins cher pour s'en débarrasser». On comprend ainsi aisément la gestion du cas Lucho, littéralement offert sur un plateau à Porto l'hiver dernier, son départ coïncidant avec la série de rencontres sans victoires... et le redressement spectaculaire du champion d'Europe 2004 en Liga Sagres. Effets d'annonce à la pelle Ce criant déficit de gestion a provoqué la situation dans laquelle se trouve l'OM aujourd'hui. Sans arguments ni perspectives concrètes, Vincent Labrune et José Anigo sont réduits à ne compter que sur une communication boiteuse et contradictoire. Après avoir raconté courant avril que l'OM serait le premier concurrent du PSG dans les prochaines années, et que le club recruterait les «meilleurs joueurs de Ligue 1», l'ami intime de Margarita Louis-Dreyfus s'est montré plus mesuré dans L'Equipe de ce lundi : «Quantitativement, nous n'aurons pas l'effectif pour jouer sur les autres tableaux. Il faut arriver à se situer au niveau de ce qui a été anticipé dans le budget prévisionnel, c'est à dire dans les cinq». Une étonnante déclaration de la part d'un président qui annonçait, il y a quelques mois, qu'une qualification en Ligue des champions était obligatoire. La fin de cycle est l'argument le plus souvent avancé pour expliquer le départ de Didier Deschamps et le soutien en interne à José Anigo. Pourtant, quelle est aujourd'hui la différence, sinon l'entraîneur, entre l'OM de l'an dernier qui affichait vouloir jouer sur les quatre tableaux, et celui de cette année qui se contenterait d'une simple cinquième place ? L'effectif n'a en tout cas à ce jour pas bougé et les conflits en interne ne semblent pas s'être calmés. On comprend dès lors assez mal la politique du club qui ne dégage aucune ligne directrice ni ambition, si ce n'est de la gestion à très court terme, jour après jour. De quoi rappeler de bien sombres périodes de l'histoire de l'OM.