Le professeur Walter F Murphy est professeur émérite à l'université de Princeton ; il est un des érudits de la Constitution les plus importants et auteur du classique Constitutional Democracy. Murphy est aussi un ancien Marine décoré, et il n'est même pas particulièrement libéral politiquement. Mais, en mars de cette année, on lui a refusé une carte d'embarquement à Newark, «parce que j'étais sur la liste de surveillance des terroristes». «Avez-vous été dans des marches pour la paix ? Nous interdisons à un tas de gens de prendre l'avion à cause de ça», a demandé l'employé de la compagnie aérienne. «J'ai expliqué», a dit Murphy, «que je n'avais pas participé mais j'avais donné, en septembre 2006, une conférence à Princeton, télévisée et mise sur Internet, hautement critique de George Bush pour ses nombreuses violations de la Constitution». «Ca doit être ça», a dit l'homme. Marcheur pour la paix ? Terroriste potentiel. Soutient la Constitution ? Terroriste potentiel. L'histoire montre que les catégories des «ennemis du peuple» tendent à s'étendre toujours plus profondément dans la vie civile. James Yee, citoyen américain, était l'aumônier musulman à Guantanamo qui fut accusé de mauvaise gestion des documents classifiés. Il a été, d'abord, harcelé par l'armée avant que les accusations contre lui ne soient abandonnées. Yee a été détenu et relâché plusieurs fois. Il fait toujours l'objet d'intérêt. Brandon Mayfield, citoyen américain et avocat en Oregon, a été identifié par erreur comme un terroriste possible. Sa maison fut cambriolée secrètement et son ordinateur réquisitionné. Bien qu'il soit innocent de l'accusation portée contre lui, il est toujours sur la liste. C'est une pratique standard des sociétés fascistes, qu'une fois que vous êtes sur la liste, vous ne pouvez en sortir. Outre ces mesures, signalons également les menaces de licenciement de fonctionnaires, d'artistes et d'universitaires s'ils ne suivent pas la ligne. Pareillement à l'époque où Mussolini poursuivait les recteurs d'universités d'Etat qui ne se conformaient pas à la ligne fasciste, Goebbels ayant fait de même en purgeant les universitaires pas pro-Nazis et idem pour Augusto Pinochet et le Politburo communiste chinois lesquels punissaient étudiants et professeurs pro-démocrates. L'Académie est un lieu explosif de l'activisme, donc, ceux cherchant une dérive fasciste punissent les universitaires et les étudiants par des pertes d'emplois s'ils ne se «coordonnent» pas idéologiquement, selon les termes de Goebbels. Puisque les fonctionnaires sont le secteur de la société la plus vulnérable pour être licencié par un régime donné, ils sont aussi un groupe que les fascistes «coordonnent» dès le début : la loi du Reich pour le rétablissement d'un service civil professionnel fut adoptée le 7 avril 1933. (A suivre)