Ce long-métrage qui sort dans toutes les salles de l'Hexagone, aujourd'hui, ramasse déjà des louanges à la pelle, dans tous les canaux d'information et des médias spécialisés. La scénariste et cinéaste algérienne a bien troussé son film qu'il en fait des envieux. La journaliste du Monde, Sandrine Marques, écrit à ce propos : dans Yema, elle livre une nouvelle réflexion sur la violence et ses conséquences sur les femmes. Dans cette histoire aride où vie et mort se défient, le féminin irrigue de nouveau un récit terrien, rattrapé par la politique.Yema signifie «mère» en arabe et, par ricochet, «mère patrie». Djamila Sahraoui a choisi d'incarner cette figure allégorique dans un film épuré, avec une grande économie de moyens et de dialogues. Situé en Kabylie, où la cinéaste a grandi, son film met en scène Ouardia, une paysanne algérienne qui revient enterrer son jeune fils militaire dans son ancienne maison, laissée à l'abandon. Dès la scène d'ouverture, la femme, qui transporte la dépouille de sa progéniture, se mesure à une nature hostile. Son cheminement, sous un soleil accablant, se mue en un pénible chemin de croix. Déterminée à offrir une sépulture à son fils, elle se heurte à la rocaille, qui résiste à ses coups de pelle obstinés. Mais, accablée de douleur, Ouardia s'acharne contre cette terre devenue inhospitalière. Une lutte va s'engager entre la femme et cette terre contaminée par la mort, à laquelle elle va redonner vie, grâce à ses plantations. Dans son entreprise, elle est aidée par un jeune garçon amputé d'un bras à la suite d'une explosion. Elle l'adopte peu à peu, malgré ses réticences, voyant en lui une victime, comme elle, du terrorisme. La présence de ce gardien, elle la doit à Ali, son fils aîné, qui l'a dépêchée auprès d'elle pour la surveiller» Plus loin, la journaliste ajoute : «A la tête d'un maquis islamiste, le fils honni revient avec un bébé qu'il confie à sa mère. L'enfant est celui d'une femme morte en couches, que les deux frères ont aimée. C'est d'ailleurs peut-être leur rivalité qui est à l'origine de la disparition du fils cadet, soupçon que le film n'élucidera pas. Cette lutte fratricide se superpose à celle d'un pays qui fut livré à la guerre civile pendant la «décennie noire», opposant à partir des années 1990 les militaires algériens aux groupes islamistes, encore présents en Kabylie. Yema est donc un film de résistance, situé du côté des mères qui ont enduré la perte et le deuil pendant ces années de cendres. Le film parle de cette meurtrissure que rien n'apaise, à part la vie elle-même, qui finit par reprendre ses droits. C'est avec beaucoup de force et de courage que Djamila Sahraoui campe ce personnage de mère, dure comme la pierre, dans un film aussi peu amène que son héroïne. A la sécheresse succède pourtant la fertilité. De cette terre aride et désolée où Ouardia est venue épancher, sa peine naît un jardin florissant. Mais le cœur de la combative génitrice, lui, s'est bien tari» Yema, drame de Djamila Sahraoui, 90mn, production franco-algérienne, avec Djamila Sahraoui, Samir Yahia, Ali Zarif