«Il est maintenant en paix. Notre nation a perdu son plus grand fils. Notre peuple a perdu son père», c'est en ces termes et très ému, que le président sud-africain Jacob Zuma a annoncé à la télévision sud-africaine le décès, jeudi soir à son domicile de Johannesburg, à l'âge de 95 ans, de l'ancien chef de l'Etat sud-africain, Nelson Mandela. Surnommé «tata» ou «père» dans son pays, ou Madiba, le nom du clan de l'ethnie Xhosa à laquelle il appartient, ou encore mkhulu, qui signifie grand-père, Mandela qui bénéficie de la très haute estime et de l'admiration de son peuple, a pris, grâce à son combat ininterrompu, une dimension universelle à tel point qu'aujourd'hui, les pays qui soutenaient l'apartheid, rendent hommage à celui qui dirigea la lutte pour y mettre fin. C'est dire aussi combien le monde a changé. Il suffit de rappeler que jusqu'en 2008, Mandela était interdit de séjour aux Etats-Unis sans autorisation spéciale du département d'Etat car Washington considérait encore l'ANC comme une organisation terroriste. On dit que c'est la CIA qui a participé à l'arrestation de Nelson Mandela en 1963 à son retour d'un séjour en Algérie. En 1960, lorsque l'ANC a été interdit, Mandela a fondé le groupe militaire «The Speaer of the Nation» (La Lance de la Nation) et un an plus tard, il est devenu le chef de la guérilla de l'ANC. On sait qu'en 1961, Mandela a rencontré, au Maroc, le docteur Moustapha Chawki, membre du GPRA. C'est dans notre pays qu'il suivra une formation militaire. Dès son indépendance acquise, l'Algérie proposa à Mandela de soutenir militairement et financièrement le combat de l'ANC contre l'apartheid. Des camps d'entraînement pour les militants sud-africains furent installés en Algérie. Le principal siège de l'ANC sera installé à Alger. Après son arrestation en 1963, Mandela a été d'abord condamné à cinq ans de prison pour avoir quitté l'Afrique du Sud illégalement et incité à la grève, avant d'être condamné à la prison à vie pour haute trahison, un an plus tard. Il avait 43 ans. Son séjour à la prison de Robben Island au large du Cap a fait grandir la réputation de Mandela, en tant que le plus important leader noir du pays et un symbole puissant de mouvement anti- apartheid. En détention, Mandela deviendra une légende vivante. Durant toute la période passée en détention, dans des conditions extrêmement dures, Mandela a été soumis à plusieurs tentatives de le détourner de son combat. Il est resté inébranlable dans ses convictions et dans sa décision de libérer son peuple du joug raciste. En 1984, le régime raciste sud-africain proposa à Mandela de s'installer dans l'un des bantoustans, des réserves où était parquée la population noire et qui étaient destinées à devenir «indépendantes», selon le gouvernement de Pretoria. En 1985, le président Pieter Botha lui offrit la liberté conditionnelle en échange d'un renoncement à la lutte armée. Il refusa. Quelques temps plus tard, devant une foule rassemblée dans un stade de Soweto, sa fille Zindzi Mandela donnait lecture d'une lettre de son père qui était incarcéré à la prison de haute sécurité de Robben Island : «Je ne peux pas et ne veux pas faire de promesse à un moment où ni moi ni vous, le peuple, ne sommes libres. Votre liberté et la mienne sont inséparables». Pieter Botha, qui prolongea la captivité du dirigeant noir pour avoir refusé ses propositions, devait déclarer : «Ma première rencontre avec Mandela en liberté fut impressionnante, et jamais je n'oublierai ses paroles, qui ne traduisaient ni rancune, ni soif de vengeance, ni aucun sentiment d'amertume ou de haine. À aucun moment de son allocution il n'a tenté d'exploiter ou de mentionner qu'il avait passé 27 ans en prison». Le 11 février 1990, sous la pression internationale en faveur de la libération de ce géant de la résistance et de la dignité, Mandela qui était alors considéré comme le plus vieux prisonnier politique du monde, est libéré. Le président Frederick de Klerk n'avait plus d'autre choix que de jeter les bases du démantèlement du régime ségrégationniste qu'il annonça dans un discours prononcé au Parlement. Le premier voyage à l'étranger, Nelson Mandela le réserva à l'Algérie qui assuma un devoir de solidarité exceptionnel avec la lutte du peuple sud-africain. Le plus grand siège de l'ANC se trouvait à Alger et c'est l'Algérie qui fit expulser de l'ONU, en 1974, le régime raciste de Prétoria. Mandela a été nommé vice-président de l'ANC en 1990 puis élu président du parti en 1991. Il a reçu le Prix Nobel de la Paix en 1993 pour ses efforts en faveur de la fin pacifique du régime d'apartheid et ses efforts pour l'émergence d'une nouvelle Afrique du Sud démocratique. En 1994, après plus de trois siècles de domination blanche, le règne des colonialistes et des racistes prend fin. Mandela devient le premier président noir de l'Afrique du Sud à l'issue de la première élection démocratique multiraciale du pays. Il résiste à la tentation et cinq ans plus tard, il transmettra le pouvoir à son successeur Thabo Mbeki. Depuis une dizaine d'années, il avait quitté la scène publique pour s'installer dans son village natal de Qunu, où il était né le 18 juillet 1918 dans la famille du chef de la tribu Thembu et où il avait vécu une enfance heureuse. Nelson Mandela était l'un des 13 enfants de Tembu qui lui a donné son nom tribal Rolihlahla, qui signifie «fauteur de troubles» dans la langue Xhosa. Il fut un homme de paix. En 2009, l'ONU a déclaré l'anniversaire de Mandela, le 18 juillet, comme Journée Mandela pour commémorer sa lutte de 67 ans pour la justice sociale et la liberté du monde.