Au lendemain des déclarations du Premier ministre Abdelmalek Sellal à Tlemcen indiquant que le narcotrafic marocain finance les groupes terroristes au Sahel et chez les pays voisins dont la Tunisie, une nouvelle affaire vient confirmer cette réalité que le royaume chérifien veut dissimuler. En effet, l'une des plus importantes filières activant du Maroc vers la Tunisie et la Libye via l'Algérie sur l'axe Tlemcen, Nââma, Sidi Bel-Abbes, El-Oued et Ouargla, vient de tomber sur le territoire national. Selon une source sûre, l'affaire a été traitée par les services de la Gendarmerie nationale ayant enclenché une enquête et des investigations approfondies depuis l'arrestation le 11 décembre dernier de deux individus à El-Oued transportant à bord d'un camion plus de dix quintaux de kif traité. Une prise nécessitant sans doute l'ouverture d'investigations dans plusieurs wilayas sachant que la provenance du cannabis ne peut être autre que du Maroc. En effet, l'exploitation de renseignements acquis dans l'affaire d'El-Oued et l'extension de compétence ont permis aux gendarmes enquêteurs de la brigade d'El-Maghaier d'interpeller deux acolytes au centre-ville de Touggourt dans la wilaya de Ouargla. Il faut signaler que l'interpellation des deux criminels à bord d'un véhicule Peugeot 207 n'était possible qu'après une course poursuite et des tirs de sommation auxquels ils n'ont pas obtempéré. Leur véhicule a été immobilisé en percutant un véhicule Toyota d'un citoyen en passage sur les lieux. L'affaire n'a pas été clôturée à ce niveau. Elle a largement dépassé les wilayas du sud pour remonter vers le nord et plus précisément à Sidi Bel-Abbès, Nâama et Tlemcen, soit le nord-ouest ou, pour être plus clair, les frontières algéro-marocaines. Notre source a indiqué que l'extension de compétence des enquêteurs du sud, avec le concours de leurs collègues de Sidi Bel-Abbes a engendré la saisie dans le domicile d'un nouveau acolyte interpellé hier à la commune Ben-Badis (Sidi-Belabbes), de deux quintaux et 20 kg de kif traité portant la quantité saisie dans cette affaire à près de 13 quintaux. L'enquête a, également, touché plusieurs localités relevant des wilayas de Tlemcen (Maghnia), Naama (El Kasdir), Sidi Bel Abbès (Ben Badis, Ouled Mimoune), où d'autres membres du réseau ont été arrêtés et des dizaines de domiciles, garages, locaux, boutiques et entrepôts ont été perquisitionnés. A l'heure où nous mettons sous presse, 14 personnes âgées entre 23 et 57 ans ont été arrêtées dont quatre repris de justice condamnés auparavant à des peines de trois à 20 ans de prison pour des affaires liées au narcotrafic. Il s'agit, également, de l'identification de quatre membres du même réseau, activement recherchés. Les investigations entreprises par les gendarmes enquêteurs se sont, de même, soldées par la saisie de 12 moyens de locomotion, cinq camions dont trois semi-remorques immatriculés dans plusieurs wilayas utilisés par les narcotrafiquants pour l'acheminement des grandes quantités de kif et sept véhicules légers de luxe de différentes marques, utilisés dans les déplacements des narcotrafiquants et leurs éclaireurs. Les mis en cause devront être présentés aujourd'hui devant le procureur de la République près le tribunal d'El-Oued. Il est très probable que cette affaire de crime organisé soit transférée vers le pôle juridique spécialisé de Ouargla vu sa nature et son ampleur. 112 tonnes de cannabis saisies, le Maroc ne réagit pas En rappelant que ce qui est plus important dans cette affaire est le démantèlement d'une filière algérienne pour le narcotrafic marocain, il y a lieu de souligner que la quantité de kif saisie par les services de la gendarmerie depuis le début de l'année a dépassé les 112 tonnes contre 73 tonnes saisies de janvier à décembre 2012 (sur un total de 157 tonnes saisies par l'ensemble des services de sécurité), soit une hausse de près de 100% si on compte d'éventuelles saisies qui pourront intervenir dans les deux semaines qui restent de l'année. Un trafic qui a pris beaucoup d'ampleur ces dernières années et s'est accentué au cours des dernières semaines menaçant la sécurité de plusieurs pays notamment que l'étude des axes empruntés par les réseaux de criminels et les différentes investigations ont confirmé que ce trafic sert dangereusement au financement des réseaux de trafic d'armes et surtout les groupes terroristes actifs au Sahel, en Tunisie et en Libye. C'est ce qui a été rappelé par le Premier ministre la semaine dernière lors de sa visite à Tlemcen où il a soutenu, en réponse aux questions sur la sécurité et le trafic de drogue soulevées par les citoyens, que le kif marocain finance le terrorisme chez les pays voisins. « J'ai fait part aux autorités tunisiennes que les groupes terroristes installés au mont Chaâmbi sont financés grâce aux revenus de la drogue provenant du Maroc», avait déclaré Abdelmalek Sellal précisant qu'outre ces quantités destinées au financement du terrorisme au Sahel et aux pays voisins, d'autres quantités étaient destinées à transiter vers le marché de narcotrafic en Europe et au Moyen-Orient. Le Premier ministre a, par la même occasion, appelé les citoyens, parmi les habitants près des frontières, à manifester plus de vigilance, soulignant que le citoyen est appelé à protéger la sécurité du pays et que la société civile doit contribuer à la lutte contre l'insécurité et les fléaux sociaux. Il faut dire, également, que cette situation qui inquiète plusieurs pays et suscite une prise en charge des plus sérieuses, ne semble pas gêner le royaume chérifien qui autorise la culture du cannabis sur d'énormes surfaces, dépassant largement les 250 000 hectares au Rif recensés il y a quelques années. Des dizaines de tonnes de cette substance sont saisies chaque années surtout le sol algérien, passage obligatoire des réseaux de narcotrafic. Cette situation persistante devient de plus en plus gênante pour l'Algérie comme pour plusieurs pays. D'ailleurs, c'est pour cette raison parmi d'autres que l'ouverture des frontières algéro-marocaines est loin d'être à l'ordre du jour.