Selon l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA), le ministère du Commerce aurait procédé à un arrêté fixant la nomenclature des marchandises soumises à une autorisation de circuler dans ces régions afin de limiter le trafic aux frontières. Quelle est la portée de cet arrêté ? Dans tous les pays du monde, les services de sécurité, y compris la douane, ont un rôle stratégique à jouer, mais devant éviter l'illusion bureaucratique des années passées où une loi, un décret ou un arrêté résoudrait tous les problèmes. Cela n'est pas propre à l'Algérie. Sinon il faudrait des millions de personnes pour contrôler les frontières de plus de 5000 km. C'est toute la politique des subventions qui est posée, nécessitant un large débat national. 1.-Trafic aux frontières et subventions Il existe une loi sociale universelle. Lorsqu'un gouvernement pond une loi qui ne correspond pas au fonctionnement réel de la société, celle-ci enfante ses propres codes qui lui permettent de fonctionner en dehors de la réglementation. La lutte efficace et durable pour limiter les trafics aux frontières renvoie à l'urgence de remédier aux dysfonctionnements de l'économie algérienne, notamment à la distorsion des taux de change par rapport aux pays voisins, et à l'importance de la sphère informelle contrôlant 40% de la masse monétaire en circulation, et plus de 65% des segments de produits de première nécessité. C'est que l'Etat algérien généralise les subventions, subventionne un grand nombre de produits de première nécessité, comme les céréales, l'eau et le lait, l'électricité et le carburant. En Algérie de celui qui gagne le SNMG au chef d'entreprise national ou étranger, bénéficient des prix subventionnés, n'existant pas de système ciblé de subventions. Dans ses différents rapports entre 2011/2014, la Banque mondiale fait remarquer qu'en moyenne dans le monde, 20% des plus riches bénéficient six fois plus que 20% des plus pauvres des subventions, recommandant que les programmes d'aide sociale doivent être ciblés de manière à aider les ménages pauvres et vulnérables à y faire face. Pour l'Algérie, la même institution note pour 2010/2012 que les montants des subventions sous forme de comptes spéciaux du Trésor, recensant sous différentes appellations 14 fonds, allouées au soutien de services productifs, à l'accès à l'habitat et aux activités économiques sont successivement de 40,83, 520,11 et 581,78 milliards de dinars, soit un total d'environ 1.143 milliards de dinars (équivalent à 16 milliards de dollars), représentant 14% du total des dépenses de l'Etat en dehors des dépenses de fonctionnement. Pour la BM, 277 milliards de dinars ont été réservés aux produits de large consommation (blé, lait en poudre, etc.), soit l'équivalent du quart des subventions accordées au budget d'équipement. A cela s'ajoutent les assainissements répétés aux entreprises publiques qui ont coûté au Trésor public plus de 60 milliards de dollars entre 1971 et 2013, les exonérations fiscales et de TVA accordées par les différents organismes d'investissement (ANDI, ANSEJ), y compris pour les entreprises étrangères, dont il conviendrait de quantifier les résultats par rapport à ces avantages à coup de dizaines de milliards de dinars. Pour 2012-2013, le pouvoir algérien ne voulant pas de remous sociaux jusqu'aux élections présidentielles d'avril 2014, les subventions seront encore un tampon pour juguler la hausse des prix internationaux. En dehors des subventions, le taux d'inflation réel dépasserait largement 10%. Ainsi, les différentes lois de finances 2010-2014 (qu'en serait-il de la loi de finances 2015) ont pour finalité de pérenniser la politique de l'Etat en matière de subvention des prix des produits de large consommation où existe une disparité dans l'octroi du soutien de l'Etat et une l'opacité dans la gestion de ces programmes qui sont passés de 245 millions de dinars en 1999, 1200 milliards de dinars en 2011 et plus de 1400 milliards de dinars entre 2012/2014 sans qu'aucune date limite ne soit instaurée. Ainsi, se pose le problème de l'efficacité de toutes ces subventions sur le producteur local et sur le consommateur final, avec le processus inflationniste, bien que compressé artificiellement par les subventions, du programme de relance économique basé sur la dépense publique (630 milliards de dollars-budget d'équipement et de fonctionnement) avec des surcoûts non maturation des projets, mauvaises gestion, corruption, exorbitants, estimés entre 20 à 30%. Tout cela grâce à Sonatrach s'assimilant à l'Algérie ayant permis 700 milliards de dollars de rentrées de devises et 500 milliards d'importation en devises entre 2000/2013, selon la Banque mondiale, donnant des taux artificiels de taux de croissance, d'inflation et de taux de chômage. Comme est posé l'efficacité du programme national du développement agricole (PNDA), qui a nécessité des dizaines de milliards de dollars, sur la production et la productivité agricole de l'Algérie. Examinons quelques cas. 2. Les subventions du prix du pain, de la semoule et du lait Bon nombre d'Algériens vivent dans la pauvreté, se nourrissant essentiellement de pain et de lait, ce qui traduit une fracture sociale qui ne cesse de s'aggraver, comme en témoigne le nombre élevé de couffins pour le mois de Ramadhan. Face à la concentration excessive du revenu national au profit d'une minorité rentière, renforçant le sentiment d'une profonde injustice sociale, l'austérité n'étant pas partagée, la majorité des Algériens veulent tous et immédiatement leur part de rente, reflet du divorce Etat-citoyens, quitte à conduire l'Algérie au suicide collectif. Aussi, malgré l'importation massive entre 2010-2014 afin de stabiliser de dizaines de tonnes de viande rouge fraîche, de viandes congelées, de viande blanche, le prix sur le marché n'a pas sensiblement baissé, et le contrôle à l'aval uniquement sur les détaillant s'est avéré un échec, les circuits internes étant dominés par les monopoleurs de la sphère informelle, produit de la bureaucratie et de l'Etat de non-droit, contrôlant 40% de la masse monétaire en circulation et 65% des segments des produits de première nécessité. Le prix du pain étant subventionné depuis 1996, sans subventions, le prix de la baguette actuellement à 8,50-10 dinars – officiel – dépasserait 25 DA. D'une manière générale, le différentiel pris en charge par l'Etat pour ces produits coûte entre 2,5/3 milliards de dollars par an, ce qui représente entre 3 à 5% de la rente pétrolière par an entre 2009-2014, selon l'évolution du vecteur prix international. 3.-Les subventions des carburants, de l'électricité et de l'eau Selon les études effectuées dans le domaine par les organismes spécialisés, l'Algérie figure parmi les pays qui subventionnent le plus les produits énergétiques avec plus de 10 milliards de dollars/an, soit quelque 800 milliards de dinars, consacrés à la subvention des prix de l'énergie. L'électricité a profité de 2,13 milliards dollars (quelque 150 milliards DA) de subventions, tandis que les carburants ont coûté 8,46 milliards de dollars (environ 650 milliards de DA). Ces subventions représentent annuellement une moyenne de près de 7% du PIB (produit intérieur brut). Selon le ministère de l'Energie et des Mines, le prix réel des carburants devrait fluctuer 60 et 80 DA le litre. Mais conserver cette politique coûte de plus en plus cher. En effet, ces dernières années, l'Algérie est devenue importatrice de carburants pour 3,5 milliards de dollars en 2013. Cela favorise la contrebande aux frontières. La différence du prix à la pompe avec les pays voisins fait que de grandes quantités de carburants traversent quotidiennement les frontières vers le Maroc et la Tunisie, sans compter les pays riverains du grand Sud. (A suivre)