Avec des mises en scène ambitieuses, des textes d'auteurs difficiles et des sujets profonds, le 9e Festival national du théâtre professionnel (FNTP), aura témoigné de la vitalité d'un 4e art algérien aux contours hésitants entre l'héritage des pionniers et les expérimentations des plus jeunes. Organisé depuis le 28 août à Alger, le 9e FNTP a mis en compétition dix-sept spectacles où le travail des metteurs en scène a capté l'attention du public et des spécialistes, grâce à des adaptations de grands dramaturges ou par des propositions originales qui ont suscité le débat. Issus des théâtres régionaux ou formés dans les associations, des metteurs en scène ont présenté des versions d'œuvres d'auteurs étrangers de références, jugées brillantes par des observateurs, qui ont salué le pari d'adapter un répertoire universel connu pour sa difficulté. A l'exemple de la pièce «En'Nihaya», mise en scène par Ahmed Belalem à partir de «Fin de Partie» du dramaturge et écrivain irlandais Samuel Beckett, qui avait fait sensation lors du deuxième jour de la compétition. Ce classique du théâtre de l'absurde, adapté aux réalités algériennes contemporaines, a été présenté en arabe dialectal par les comédiens de l'association Djilali Ben Abdelhalim de Mostaganem, une troupe issue du théâtre amateur et qualifiée au Fntp après des sélections régionales. Le jeune metteur en scène Fouzi Ben Braham a eu, pour sa part, l'occasion de montrer tout l'étendue de son talent en présentant «El Aârda» (L'invitation, Tr Constantine) librement adaptée d'un texte du Roumain Eugène Ionesco et «Sat'w Khass» (Braquage spécial, Tr Saïda), une création originale dans le registre du burlesque. Cette dernière pièce avait suscité un vif débat entres les critiques et les professionnels, certains ayant salué, la fraîcheur de la mise en scène, qui s'est inspirée du cinéma et de la bande dessinée, alors que d'autres avaient souligné la «faiblesse» du texte. Le legs des pionniers en débat aux côtés des expérimentations de Hamid Gouri «Fi Inidhar El Mouhakama», (Tr Annaba) ou de Djamel Merrir «Leilat Ghadab», (Tr Batna) d'autres metteurs en scène ont préféré puiser dans le répertoire dramaturgique algérien comme les textes d'Ould Abderrahmane Kaki ou de Kateb Yacine. «Le cadavre encerclé» et «Les ancêtres redoublent de férocité», deux pièces du célèbre auteur de «Nejdma» (1956) ont ainsi été présentées respectivement par Djamel Abdelli (Tr Béjaïa) et Mohamed Frimehdi (Tr Sidi Bel-Abbès). Différemment accueillies, ces deux représentations ont remis en avant le débat sur la «crise du texte» dans le théâtre ainsi que sur la nécessité de revisiter le capital dramaturgique et littéraire algériens, capable, selon des professionnels, de «revivifier» le 4e art en Algérie. Pour des hommes de théâtre qui ont côtoyé ces pionniers, monter aujourd'hui des textes de Kateb ou de Kaki serait «bénéfique» pour développer les capacités de jeunes metteurs en scène et «valoriser» – par le texte et la conception – un 4e art proprement algérien sur la scène internationale. Ces questionnements sur l'orientation du théâtre algérien et d'autres, ont été abordées, notamment, à l'occasion des débats ouverts au public après chaque représentation et animés par des critiques, une première saluée par les festivaliers. Le festival aura également été l'occasion de mettre en avant la vitalité du théâtre amateur à la faveur d'une section «off» exclusivement réservées aux troupes algériennes. La 9e édition du FNTP prendra fin lundi soir avec la cérémonie de remise des différents prix de la compétition.