Interrogé quant à la reprise par le gouvernement algérien de la totalité des actifs de la société ArcelorMittal Algérie, le ministre de l'Industrie et des Mines, Abdeslam Bouchouareb, avait affirmé le 7 octobre dernier : «A travers le groupe Imetal, l'Etat algérien, deviendra propriétaire à 100% du groupe sidérurgique ArcelorMittal Algérie, après une restructuration et le transfert des 49% des participations détenues par le géant mondial de l'acier. L'accord devrait être finalisé dans les prochaines semaines. Le ministre avait même précisé que la restructuration capitalistique d'ArcelorMittal Algeria, ArcelorMittal Pipes & Tubes Algeria et ArcelorMittal Tébessa ne gênerait en rien le rôle de soutien technique pour le projet de développement du complexe El- Hadjar en charge d'ArcelorMittal. Aucun élément financier relatif à cet accord n'avait été communiqué à ce stade. La reprise des actifs ArcelorMittal semble être suspendue. Et pour cause, aucune suite n'est venue matérialiser dans les actes cette reprise et ce, même si Abdesselam Bouchouareb avait annoncé la poursuite de l'opération de revamping des installations industrielles et leur redémarrage en février 2016. Sur le terrain, la situation au complexe sidérurgique El-Hadjar préfigure d'une profonde mésentente entre les deux partenaires. D'un côté, les représentants du géant mondial de l'acier sont confinés dans les locaux de la direction générale loin de tout cercle de décision. De l'autre, la tenue d'un conseil d'administration de la société dont la dernière réunion est synonyme de confirmation de la position attentiste des décideurs algériens. Ceux-ci agissent au nom du groupe Imetal pour le devenir d'ArcelorMittal Algéria, ArcelorMittal Pipes & Tubes Algeria et ArcelorMittal Tébessa. Cette position a été interprétée par les économistes comme étant annonciatrice d'un contentieux à même d'être soumis au tribunal arbitral de Paris. En effet, depuis la dernière visite au complexe El-Hadjar du ministre de l'Industrie le 7 octobre dernier, rien ne va plus. Pour preuve, les résolutions approuvées par le dernier conseil d'administration portant sur des questions de gestion courante. Elles dénotent que le gouvernement algérien n'a toujours pas repris les actifs. A ce jour, malgré les engagements publics exprimés par le ministre de l'Industrie, rien d'officiel n'est intervenu pour imposer un quelconque transfert des 49% des actifs ArcelorMittal vers le groupe Imital. Comme il n'y a pas eu de réaction face à l'important retard mis dans la matérialisation du programme de réhabilitation des installations de production. Lancée en octobre 2015, la réhabilitation devait s'achever fin février 2016 pour relancer la production à plus d'un million de tonnes/an. Les travaux effectués en dilettante inquiètent les techniciens. Ces derniers n'ont plus de contact avec les donneurs d'ordre. N'étant officiellement plus partie prenante à quelque titre que ce soit dans la gestion de la société qui porte encore le sigle de leur employeur, les représentants d'ArcelorMittal n'activent plus. C'est comme s'ils avaient la certitude d'avoir rempli leurs obligations contractuelles et que tout se jouera en faveur de leur groupe au cas où le tribunal arbitral de Paris serait saisi. Interrogés sur les conséquences éventuelles de la décision unilatérale du gouvernement algérien de reprendre en main la gestion totale de sa sidérurgie, des économistes ont estimé que tout dépendra du contenu de l'accord de partenariat signé en 2001. Rappelons que conformément aux dispositions de cet accord, le gouvernement algérien offrait au dinar symbolique au groupe ArcelorMittal (Ispat à l'époque) 70% des actifs du capital social du complexe sidérurgique El-Hadjar. En contrepartie, ce groupe se devait d'assurer le transfert du savoir-faire et technologique, d'améliorer le niveau annuel de la production et de sauvegarder les postes de travail. Ces conditions n'ont pas été respectées par le groupe leader mondial de l'acier. Pis, si les postes de travail ont été réduits de 18 000 à 4300, la production de l'acier a régressé de 800 000 tonnes en 2001 à 350 000 tonnes/an en 2015. Quinze années durant, les cadres algériens et les agents sidérurgistes avaient démontré qu'en termes de technologie et de savoir-faire, le groupe ArcelorMittal ne leur avait rien donné. Pour en savoir plus, nous avons tenté de nous rapprocher des responsables de la direction. D'un côté comme de l'autre des deux partenaires, c'est la politique des portes closes, des bouches cousues et des téléphones sonnant aux abonnés absents. Les responsables algériens paraissent dans l'incapacité de prendre une quelconque décision pour redresser la barre d'un navire sidérurgique au creux de la vague. Entre-temps, l'opération de réhabilitation des installations de production tourne au ralenti. Et pourtant, elle coûte au Trésor public presque 1 milliard de dollars pour, à son achèvement prétendre produire, dans un premier temps, plus de 1 million de tonnes d'acier/an.