La Caisse nationale des congés payés et du chômage-intempéries des secteurs du BTPH (Cacobatph) assure des prestations socioéconomiques uniques dans leur genre. La dernière nouveauté de la caisse, lancée pour cet été, est le remboursement des arrêts de travail occasionnés par la canicule. Il s'agit, en effet, d'une première dans le monde, assurée par cette Caisse nationale célèbre chez les acteurs du BTPH mais peu connue chez le grand public. Dans cette interview exclusive accordée à notre rédaction, le DG de la Cacobatph, Abdelmadjid Chekakri, nous présente cet acteur économique et ses ambitions dans un marché national en pleine évolution. La Nouvelle République : la Cacobatph a pour mission principale d'assurer les prestations de congés payés et du chômage-intempéries dont bénéficient les travailleurs déclarés des secteurs du BTPH. Que pouvez-vous nous dire de plus de votre établissement ? Quelles sont les diverses missions de la Cacobatph ? Abdelmadjid Chekakri : la Cacobatph, Caisse nationale des congés payés et du chômage-intempéries des secteurs du bâtiment, des travaux publics et de l'hydraulique, a été créée en 1997 et relève du ministère du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale. Elle a pour mission principale d'assurer les prestations de congés payés et du chômage-intempéries dont bénéficient les travailleurs déclarés des secteurs du BTPH. La Caisse procède, également, à l'immatriculation des bénéficiaires et de leurs employeurs et assure le recouvrement des cotisations prévues par la législation et la réglementation en vigueur. Les prestations concernent exclusivement le secteur du BTPH. Ce dernier est connu pour l'itinérance de son personnel, ainsi que la précarité. C'est pour cela qu'on a institué un régime particulier pour les droits aux congés. A titre d'exemple, un employé dans le secteur du BTBH peut travailler pendant tout un mois, ensuite il passe vers une autre entreprise, et acquiert aux droits de congés annuels. Par la suite, il passe dans une autre wilaya, et acquiert d'autres droits. Notre institution a pour rôle de consolider l'ensemble de ces droits. En ce qui concerne le chômage intempéries, c'est une sorte d'assurance qui est consentie aux entreprises pour préserver le personnel qui exerce dans les chantiers. Concernant cela, il y a un certain nombre de conditions. Il faudrait que la constatation de l'intempérie relève que l'employeur exerce en plein air et à ciel ouvert. Ceci ne concerne pas l'employé qui exerce dans un bureau. C'est destiné uniquement à ceux qui sont soumis aux intempéries. Une autre condition est que le travailleur doit justifier d'un certain nombre de semaines de travail. Une nouveauté, qui a été intégrée cette année liée à l'intempérie, c'est la prise en charge de la canicule. C'est une première mondiale, d'autant que la Cacobatph est l'unique caisse du genre dans le monde arabe et en Afrique. Pour cela, nous avons un accord signé avec l'Office national de météorologie qui détermine avec exactitude les modalités de prise en charge en question avec cette nouvelle prestation liée à la canicule. J'évoquerai à ce sujet la plateforme de télédéclaration «Tasrihatkoum». Nous sommes le premier organisme public à avoir mis en place un portail de télédéclaration. Depuis 2013, 95% des déclarations qui parviennent à la Cacobatph se font par le biais de ce portail. Non seulement nous sommes les pionniers dans ce domaine, mais nous sommes aussi les premiers à avoir de tels résultats en matière d'utilisation de ce portail. Ce dernier a capté une grande partie de nos usagers qui sont, au jour d'aujourd'hui, en nombre supérieur de 64 000 entreprises affiliées et en activité et plus d'un million de travailleurs déclarés. En outre, depuis janvier 2015, nous avons mis sur la base de ce portail de télédéclaration un autre service de déclaration du chômage intempéries. Plus de 40% de ces déclarations se font par biais d'internet. Nous avons presque 200 000 travailleurs indemnisés grâce à cette plateforme. L'usage des TIC permet, non seulement, de faciliter les rapports avec le service public, mais également d'augmenter le nombre de prises en charge. Vous avez lancé un système de télé-déclaration en 2013, nombre de déclarés n'a cessé d'augmenter. En 2015, vous avez compté plus d'un million de travailleurs dans les secteurs du BTPH déclarés, contre plus de 900 000 en 2014, pensez-vous que ce système déclaration, qui facilite aux employeurs la déclaration à distance de leurs travailleurs, est la raison de cette hausse ? C'est la raison oui mais pas la seule. Il y a aussi la loi de finances complémentaire de 2015 qui a permis aux entreprises qui étaient en situation irrégulière avec la Cacobatph de la régulariser à travers l'annulation des pénalités et des majorations de retard à fin mars 2016 qui avoisine plus d'un milliard de dinars. Nous avons effacé ces dettes et récupéré en contrepartie un milliard 800 millions de dinars. Autrement dit, les gens ont non seulement payé leurs cotisations auxquelles devait la Cacobatph, mais il y a beaucoup plus de travailleurs déclarés. En effet, les mesures incitatives dans la loi de finances complémentaire de 2015 ont amélioré le rendement en termes d'employeurs en activité. L'autre élément lié à cette hausse ce sont les outils modernes qu'on est en train de mettre en place et qui ont également facilité ce résultat. Dans le cadre de la modernisation de la Cacobatph, un centre d'appel est opérationnel depuis le 1er juin, que comptez-vous faire de plus en matière de développement de vos prestations ? A partir du 1er juillet, nous allons mettre en circulation une nouvelle forme de portail adaptée en mobile appelée, «Mobile friendly». C'est une application créée grâce à des ingénieurs de la Cacobatph pour permettre l'accès à partir du smartphone et d'une tablette. L'employeur va pouvoir envoyer sa déclaration avec son mobile. On va, également, lancer prochainement le e-paiement. Nous sommes en projet avec la Banque CPA (Crédit populaire d'Algérie) et la Satim qui est un organe intermédiaire bancaire, avec qui nous avons signé un accord qui nous permettrait, à l'horizon 2016-2017 d'adopter la forme de payement à distance, à savoir le e-paiement. Pour le moment, l'employeur ne fait que les déclarations par internet, nous allons lui donner la possibilité de faire également le payement. A cet effet, la Satim est en entrain de fabriquer des cartes bancaires «Business Corporate» qui seront remises aux personnalités morales. Une fois qu'on aura établi la solution technique, ces personnes vont pouvoir payer les cotisations en intégrant uniquement leur numéro de compte. En ce qui concerne le centre d'appel lancé le 1er juin dernier, son personnel est issu de la Cacobatph. C'est un personnel formé dans les métiers de téléconseillers. La première mission de ce centre est de répondre aux soucis des employeurs et des travailleurs concernant leur situation en termes de congés pays et chômage intempéries. Quel est le modèle de financement de la Cacobatph ? L'adhésion pour les entreprises à la Cacobatph est obligatoire, elle n'est pas volontaire. Pour ce faire, les entreprises doivent être toutes déclarées à notre institution. Elles déclarent leurs activités, et versent des cotisations soit mensuelles ou trimestrielles, en fonction du nombre de travailleurs. Si l'entreprise a moins de 9 travailleurs, elle verse une cotisation chaque trimestre, si elle a plus de 10, elle verse chaque mois.En ce qui concerne le congé payé, la cotisation est de 12,21% assis sur le salaire soumis à cotisation. Ce dernier concerne le salaire de base, les indemnités que l'employeur doit déclarer à la caisse. Quant au chômage intempéries, c'est à un taux de 0,75% réparti entre l'employeur et le salarié. La Cacobatph est-elle concernée par l'emprunt obligataire national ? Avez-vous participé à cette opération ? Comme tous les acteurs économiques ou sociaux, on est concerné par l'emprunt national. Nous avons déjà participé avec un montant d'un milliard de dinars. Et nous comptons effectuer un deuxième emprunt dès que les conditions de trésorerie le permettront. Comment évaluerez-vous le secteur du BTPH ? Nous avons enregistré une évolution à deux chiffres jamais réalisés. Plus de 13% en nombre d'employeurs et plus de 14% en nombre de travailleurs. En ce qui nous concerne, nous pouvons dire que le secteur du BTPH est en évolution positive. Nos indicateurs principaux parlent d'un vrai développement. Par rapport à ce qui est rapporté par les médias concernant la chute de ce secteur ces derniers mois, nous n'avons pas enregistré une baisse en termes d'employeurs déclarés ou de travailleurs. A l'heure où il y a des chantiers qui s'arrêtent, il y a d'autres qui prennent place. Quels sont les objectifs de la Cacobatph à moyen et long terme ? Nous travaillons sur la base d'un projet de développement stratégique qui contient quatre axes importants. Le premier concerne l'amélioration du recouvrement, la modernisation, l'amélioration de la ressource humaine par le biais de la formation continue. C'est un projet pré-annuel qui va de 2015 à 2019. En ce qui concerne les outils de modernisation, nous sommes à l'avance parce qu'on s'est fixé pour fin 2019 d'aller, par exemple, vers le e-paiement. Maintenant que les conditions sont réunies, nous comptons réaliser ce projet d'ici fin 2016-2017. Presque tous les objectifs que l'on s'est fixés dans notre stratégie de développement sont en cours de concrétisation, telle l'amélioration du recouvrement. A ce sujet, les recettes de la Cacobatph en termes de cotisation devraient frôler d'ici fin 2016, les 30 milliards de dinars alors que nous avons commencé avec 6 milliards de dinars.