Le Maroc qui bloque le processus de paix au Sahara occidental depuis 2012 doit revenir à la table des négociations «dans un esprit de coopération honnête» en abandonnant son agenda caché pour le territoire, a déclaré lundi soir à New York le représentant du Front Polisario auprès des Nations unies, Ahmed Boukhari. S'exprimant devant le Comité spécial de la décolonisation de l'ONU, dit Comité des 24, M. Boukhari a indiqué que le Maroc refuse depuis 2012, en violation des résolutions du Conseil de sécurité, de poursuivre les négociations directes avec le Front Polisario, rappelant à ce titre les manœuvres des autorités marocaines pour saborder le processus onusien et qui ont conduit à la démission de l'émissaire Christopher Ross. Le Maroc a empêché l'ancien SG de l'ONU, Ban Ki-moon, de se rendre dans les territoires sahraouis occupés avant de le dénigrer publiquement, expulsé la composante civile et politique de la Minurso (Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum d'autodétermination au Sahara occidental) et violé les termes du cessez-le-feu dans la zone tampon d'El Guergarat , a-t-il ajouté. La situation à El Guergarat a poussé le Conseil de sécurité à demander dans sa dernière résolution sur le Sahara occidental au SG de l'ONU «de chercher des solutions au problème crée par le Maroc dans cette zone», a relevé le représentant du Front Polisario. Le Conseil de sécurité a exigé dans cette résolution de relancer sans tarder des négociations directes entre le Front Polisario et le Maroc et demandé au chef de l'ONU de lui soumettre dans six mois une feuille de route claire pour le règlement du conflit, a rappelé M. Boukhari. Mais le Maroc s'est fortement mobilisé pour retarder la désignation du nouvel émissaire de l'ONU dans l'objectif de différer la relance des négociations, a-t-il regretté. En parallèle, il a noté que l'adhésion du Maroc à l'Union africaine (UA) lui imposait de respecter l'intangibilité des frontières prévue par l'article 4 de l'acte constitutif de l'UA qu'il avait ratifié en janvier dernier. «Cela signifie qu'il doit se retirer des territoires d'un autre Etat membre de l'Union Africaine qu'il occupe illégalement depuis 1975», a-t-il soutenu, en relevant que les faits et les déclarations officielles des autorités marocaines ces derniers mois montrent que le Maroc ne compte pas tenir ses engagements en matière d'indépendance et d'intégrité territoriale du Sahara occidental. «Nous avons au sein de l'Union africaine un cheval de Troie qui menace de nouveau l'unité et la sécurité continentales», alors qu'en parallèle «le Maroc ne manque aucune occasion de dénigrer l'Union africaine» afin de l'empêcher de coopérer avec les Nations unies pour parvenir à une solution juste et durable au conflit du Sahara occidental, a enchaîné le représentant du Front Polisario. M. Boukahri a invité le comité spécial de l'ONU à dépêcher une mission de visite aux territoires occupés afin de suivre de près la question du Sahara occidental, rappelant que la dernière mission du genre effectuée par cet organe remonte à 1975. En outre, le représentant du Front Polisario a considéré qu' «il était utile au comité» de fixer une date pour la session spéciale qu'il a convenu d'organiser sur le Sahara occidental. La session «servira à faire la lumière sur cette question», a-t-il indiqué. Evoquant le pillage des ressources naturelles au Sahara occidental occupé, M. Boukhari a précisé que le Front Polisario souhaitait que le comité prenne une décision sur cette question. Ce vol planifié des ressources sahraouies génère près de 5 milliards de dollars de recettes que le Maroc utilise pour renforcer l'occupation du territoire, a-t-il souligné, souhaitant par la même occasion que l'Union européenne respecte le droit international et la décision de sa Cour de justice qui a conclu en décembre dernier que le Sahara occidental ne fait pas partie du territoire du Maroc. «Le Maroc occupe notre pays depuis 1975 en violation flagrante des résolutions de l'Union africaine, de l'Assemblée générale, du Conseil de sécurité, et de la décision de la Cour internationale de Justice du 16 octobre 1975», a indiqué le responsable du Front Polisario, en expliquant au comité que les crimes commis par le Maroc contre le peuple sahraouis sont «indescriptibles et l'histoire les jugera un jour et révélera leurs dimensions tragiques». Dés les premiers jours de l'occupation, «le Maroc a recouru à l'utilisation d'armes interdites telles que le Napalm». La localité d'Oum Dreiga a été entièrement bombardée en février 1976, alors que des dizaines de sahraouis ont été exécutés dans le désert, dont certains ont été exhumés de fosses communes, découvertes en 2013, en présence de l'ONU, a tenu à rappeler le représentant sahraoui.