Les mises en détention qui se succèdent à un rythme soutenu, touchant l'alliance de forces prévaricatrices constituées d'un berbérisme militant expulsé des centres névralgiques des fonctions sécuritaires de l'Etat d'avec l'autoritarisme de courants politiques se réclamant d'un nationalisme étatique intéressé et étroit a volé en éclats le 22 février à l'initiative du «Hirak» populaire puissamment relayé par l'ANP. Au moment où la Justice fait enfin œuvre de discernement, frappant la corruption à sa tête dans toutes les déclinaisons de ses consonances comme les Tahkout, Haddad, Rebrab ainsi que les Sellal, Ouyahia, Djoudi, Toufik mais aussi les Kouninev et les Bouteflika, les tendances sévèrement défaites par le cours d'évènements révolutionnaires, dans la splendeur de leur aveuglement, ne trouvent d'autres revendications qu'elles tentent de faire passer pour une exigence du «Hirak» que de conspuer nos forces armées, à l'origine de cette guerre contre les puissances de l'argent, confondant à dessein la proie et l'ombre. D'après ces partis politiques (RCD, FFS et PT pour l'essentiel ainsi que les relais qui leurs sont inféodés) qui furent longtemps abreuvés des générosités de l'Etat, par la distribution à leurs dirigeants de villas sur les hauteurs d'Alger ou dans les résidences d'Etat, de prêts bancaires prolifiques, de ministères érigés en forteresses inexpugnables, d'affaires juteuses de toutes sortes, nos forces militaires seraient par essence, en raison de l'uniforme qu'elles portent réfractaires à toute idée démocratique. Elles constitueraient le principal obstacle à l'émergence d'un Etat de droit. C'est la thèse en substance, prolongée par certains avocats et quelques professeurs de Médecine qui malgré leur haut niveau d'éducation n'arrivent guère a se départir de leurs préjugés bassement régionalistes. En réalité, faisant leurs les thèses de milieux parisiens sociaux-impérialistes, dont Jose Garçon journaliste à Libération est un exemple achevé, ces forces sont désemparées face à la tournure des choses qui se dirigent inexorablement et en droite ligne vers le suffrage universel transparent qui sera la règle indiscutable, départageant les idées politiques en compétition et sanctionnant par la défaite, dans les urnes et non par les baïonnettes, celles du courant berbériste. Ceci dit, la thèse de courte vue, du dévoiement du «Hirak» par la «la faute aux Kabyles», comme un Gavroche attribuant l'insurrection républicaine parisienne de 1832 à «la faute à Rousseau», essentialisant un débat aux dimensions multiples est grosse de divisions irrémédiables si on ne prend pas le soin d'aborder ces questions avec une souplesse analytique plus que jamais nécessaire. Le régionalisme en Algérie comme dans le Monde Arabe est avant toute chose le produit de l'économie rentière. Nous avons expliqué dans ces mêmes colonnes, dans un article intitulé «Décantations, surdéterminations idéologiques, sous estimations sociologiques» in LNR numéro 6463 que «l'exploitation même des ressources nationales des hydrocarbures lui donne un caractère circonscrit du fait de lieux de production limités géographiquement, à l'inverse de l'occupation spatiale générée par une économie de la valeur ajoutée. D'ailleurs la priorité première du«bloc ahistorique» au pouvoir est de soumettre les géographies de la production des hydrocarbures au plus grand bénéfice de sa consommation, nationale et internationale ; entrainant une concentration démographique le long des côtes du pays et une migration interne du nord au sud, des techniciens de la rente, pour mieux maitriser les effets de contestation sociale par les populations mitoyennes des lieux des gisements fossiles, éjectées du champ de sa production». Ce sont des logiques d'une même nature qui sont sans cesse au travail au Proche et Moyen-Orient. La logique pétrolière nourrit le régionalisme L'exacerbation, des confessionnalismes intra-islamiques intimement liée au contrôle des régions pétrolières (en particulier celle de Bassora sur le Chott-El-Arab), de la question Kurde et les gisements d'hydrocarbures en périmètre de Kirkouk, du conflit syrien coupant le Cham en deux le long d'une ligne fractale riche en hydrocarbures, de l'éclatement de la Libye voisine que les puissances impériales cherchent à diviser en trois grandes régions pour mieux isoler les dividendes des richesses en or noire qui se situent pour l'essentiel en Cyrénaïque relèvent en premier ressort de la nature rentière de ces régimes uniques du pétrole soumis à l'ordre économique mondialisé qui n'aime pas les obstacles à sa domination sans partage, en particulier lorsqu'ils prennent la forme d'Etat-Nations. La crise de la bannière de l'Académie Berbère de Saint-Denis en Algérie ne peut pas être comprise dans le seul contexte des relations algéro-françaises si elle n'est pas également éclairée par les interventions militaires américaines au Moyen-Orient, exerçant des charges maximales dans cette région du Monde pour des considérations géostratégiques liées aux énergies fossiles en rapport avec les rivalités chinoises et russes. Et c'est naturellement au Maghreb Arabe que sont chassées les pressions exercées par le glaive sur les Peuples du Proche et Moyen-Orient comme autant de répliques de plus faible ampleur après l'irruption du volcan américano-wahhabite dont l'épicentre reste le sionisme. Si ce n'était la force du mouvement national, de nouveau démontrée par un «Hirak» d'une exceptionnelle vigueur, nous aurions été emportés par la vague moyen-orientale qui se serait traduite en Algérie par des régionalismes exacerbés dont la crise mozabite ne constituait en réalité que les prémisses du détachement du Sahara du reste de sa Nation et dont le mot d'ordre d'«Etat-Fédéral» a pour ultime fonction d'en faire le lit et de réaliser la jonction avec les forces qui souhaitent faire éclater l'organisation du Pays sous forme d'Etat-National. C'est en vérité, cette même signification qu'il faut entendre lorsque ces partis de l'opposition dite «démocratique» veulent dans leurs slogans abattre «l'Etat-Militaire». Pour dire les choses le plus clairement du monde, ce qui est visé par le berbérisme, sous-produit idéologique de l'impérialisme au même titre que le confessionnalisme du Machrek, n'est pas l'armée mais l'Etat dans sa forme centralisatrice car elle s'accapare de manière exclusive des richesses en hydrocarbures. Le berbérisme, supplétif opérationnel de l'impérialisme au Maghreb Arabe rêve d'une Algérie divisée en régions et «Peuples» divers (Kabyles, Chaouis, Targuis, Mozabites, Ouled-Nail etc.), dans une cristallisation nationale qui se fantasme à l'image d'un modèle marocain fait de provinces du Royaume chérifien, admiré en catimini par nos tenants indigènes du berbérisme. Ces idéologues font fi de nos grandes traditions populaires révolutionnaires, donnant la véritable mesure de notre devenir qui ne saurait être assumé, dans notre cas marqué par l'immensité géographique de notre territoire et conséquemment ses formidables richesses minières encore à découvrir, que par un Etat jacobin, fortement centralisateur des facteurs sécuritaires, économiques mais surtout culturels en raison de l'importance cruciale que revêt cette dernière instance dans la permanence de la conscience sociale nationale. Le berbérisme, maladie infantile de l'Etat-National Ce qui est valide pour nos régions arabes du Machrek et du Maghreb l'est bien évidemment pour l'Europe vassale des marchés Nord-Américains. La crise catalane combattue avec force non seulement par l'Etat Espagnol mais également par les instances d'un fédéralisme européen qui ne veut pas dire son nom, le mouvement des gilets jaunes né de la taxation des carburants, l'indépendantisme Ecossais nourri des gisements pétrolifères de la mer du Nord et jusqu'à la question du brexit dans ses projections irlandaises sont la traduction dans la zone euro-arabe des résistances des Etat-Nations à l'ordre du mondialisme qui comme les suzerains d'antan ne veut traiter qu'avec des féodalités soumises et si par malheur elles n'y consentent pas alors toutes les alliances deviennent possibles pour miner l'Etat-Nation qu'elles prennent le nom de partis séparatistes comme «Ensemble pour la Catalogne» en Espagne ou le «Parti National Ecossais» au Royaume- Uni ou le courant berbériste… en Algérie qui pousse un Ferhat Mehenni, par haine d'arabes n'ayant existé que dans son esprit, à rechercher l'alliance de l'israélien… d'extrême-droite Netanyahou. Si l'environnement proche, c'est-à-dire européen, interdit d'entrevoir une quelconque victoire du berbérisme indépendantiste à la manière du MAK, appelant à une Algérie de l'identité exclusivement berbère sous prétexte d'analyse ethnique du phénomène historique (imaginons un seul instant qu'en Europe naisse un parti se réclamant du «celtisme» sous couvert unique de préexistence à l'identité gauloise, comment les forces politiques dominantes qualifieraient un tel parti Celtique si ce n'est de facho-identitaire), il reste que le berbérisme dans sa forme fédéraliste est une carte entre les mains du social-impérialisme européen. Cependant cet atout ne s'exprimerait pas sur le mode majeur comme le fit ce 14 Juillet l'Ambassadeur de France et ex-patron du renseignement de son pays, si l'Etat-National n'avait pas encouragé lui-même, depuis le décès de feu Houari Boumediene, cette forme de berbérisme qui cherche aujourd'hui, en vain, à se jouer du Hirak, en faisant conspuer l'Armée non pas en tant qu'élément constitutif d'une «dictature militaire» mais pour ce qu'elle représente de volontarisme étatique. Aussi, il ne sert à rien de dénoncer le berbérisme d'un côté pour lui offrir de l'autre côté, depuis des lustres, le Ministère de la Culture, celui de l'Education ou de l'Enseignement Supérieur, c'est-à-dire des Ministères qui contribuent à forger pour des générations d'élèves un rapport à la Culture en rupture de l'action homogénéisatrice de l'Etat. Est-ce normal de ne trouver dans les bonnes librairies du Pays que les traductions françaises de Naguib Mahfouz alors que cet auteur égyptien écrit en langue Arabe ?! Est-il raisonnable qu'aucune traduction en Arabe de La République de Platon, texte… tombé (sans rires !) dans le domaine public depuis les calendres grecques ne soit disponible en Algérie et jusqu'aux écrits admirables d'un Franz Fanon inexistant en langue arabe ? Qui décide de la politique du livre dans ce pays si ce ne sont les berbéristes du Ministère de la Culture ? Qui décide d'envoyer dans une Algérie «post Hirak» un Amine Zaoui, grand pourfendeur de l'Arabité et de l'Islam, idéologue berbériste patenté, en Palestine au 2e colloque de la Palestine du roman arabe ? N'y-a-t-il pas une contradiction criante à avoir mis en avant (par qui au sein de l'appareil sécuritaire étatique ?) durant des années un Lakhdar Bouregaâ, chantre du fédéralisme contre l'Etat-National au Congrès National Arabe tout en l'emprisonnant pour atteinte au moral d'une armée qui se veut badissienne, novembriste et arabophone ? Comment ne pas comprendre comme une ultime manœuvre provocatrice, de berbéristes s'exprimant cachés derrière leurs fonctions au sein de l'Etat, le débat sur la langue de l'enseignement au niveau universitaire en anglais faussement opposé au français, alors que des cohortes d'étudiants rejoignent les bancs de l'université en parfaits arabophones ? Qui cherche à freiner l'enseignement universitaire en langue arabe au potentiel scientifique et technique intacts en raison de l'âge d'or scientifique qu'elle a vécue ? Ne sont-ce pas, comme par hasard, les mêmes intégristes des thèses identitaires qui exigent l'enseignement au primaire du Kabyle en lettres latines en lieu et place d'un travail scientifique sur le tifinagh ? Au vu des déchainements et des attaques en règle contre l'ANP par les militants berbéristes, n'aurait-il pas été plus avisé de confier, au commencement des choses, le ministère de l'Intérieur, pendant ces vingt dernières années de plomb d'un ostracisme féroce contre le courant patriotique à Khalida Toumi plutôt que celui, bien plus stratégique, de la Culture alors que l'Etat manquait si cruellement de densité idéologique mais était pourvu à provisions en moyens juridiques de répressions ? Aussi, il serait trop facile aujourd'hui, voire injuste de jeter la pierre aux seuls Kabyles et à la Kabylie lorsque l'Etat-National lui-même, pliant sous les injonctions impériales partagées savamment par la France et les Etats-Unis qui ne s'opposent en rien sur l'Algérie, a failli dans sa politique culturelle jusqu'à accorder à la France le droit d'essaimer des centres culturels dans les principales régions du Pays, tournant le dos à ses devoirs d'animation d'une politique culturelle bien comprise, c'est-à-dire nationale et rigoureuse dans le respect de ses dimensions populaires et de sa profondeur civilisationnel, vis-à-vis d'une région qui n'a été gagnée, temporairement par les forces berbéristes qu'en raison de la démission d'un Etat-National, gangrené par la rente pétrolière, faisant de la corruption et du régionalisme qui lui sont consubstantiels ses seules lignes d'horizons indépassables. Mais, stoppant net l'irresponsabilité des forces, en dehors et au sein de l'Etat, appelant par des politiques détournées à la balkanisation du Pays, le Peuple algérien créa le «Hirak»