L'histoire, incroyable, de M. M. D., dont nous avons volontairement changé les initiales, et ce, suite a sa volonté de garder l'anonymat et un éminent chercheur universitaire, quelque part dans cette institution à l'ouest de l'Algérie profonde, est digne d'une cytologie écœurante car on n'imaginait pas que de telles choses puissent encore exister. Plusieurs tentatives de toucher par correspondance (une dizaine de lettres accompagnées, bien sûr, de timbres coupons-réponse) pour faciliter le traitement rapide, quant à l'envoi de deux extraits de naissance de son fils adoptif, par les services de l'état civil de l'assemblée communale de Béchar, sont restées sans effet. . M. M. D., cette personne appelée «Kafil» ou père nourricier, avec un enfant presque sans identité, ni mention, sur «le livret de famille», en âge d'être scolarisé, risque sérieusement de voir l'inscription de son fils refusée à l'école maternelle du fait qu'il n'a pas d'acte de naissance. La problématique de la garde de l'enfant, communément appelé le «Kafil», ou les obligations de ce dernier n'ayant aucun droit sur lui, il rencontrera de grandes difficultés à l'occasion de certains actes concernant son pupille. Cela nécessitera beaucoup de démarches et une perte de temps garantie, à l'exemple de ce qui s'est passé au cours de ce voyage, mouvementé, à la wilaya de Béchar. Notre interlocuteur, accompagné de son fils adoptif, âgé à peine de six printemps, arrive vers 12h30 mn dans l'après-midi du mercredi 08 octobre, en se rendant directement à l'état civil de l'Apc de ladite commune pour retirer deux malheureux extraits de naissance de l'enfant. Après une «queue leu leu» de plus de trois heures, devant des guichets pris d'assaut par les citoyens, à l'image de ce qui se passe dans la plupart des villes du pays, l'infortuné M. M. D. s'est vu confronté a l'un des préposés aux guichets, qui lui a exigé le livret de famille pour l'établissement de tous documents administratifs, actes de naissance ou de mariage. «Si ne pas avoir de certificat de naissance peut rendre la vie très difficile dans une communauté établie, qui a ratifié, pourtant, la convention sur les droits de l'enfant, se voir refuser une preuve d'identité en dehors des frontières de son propre pays natal revient à être relégué dans le néant de l'apatridie. Et le non enregistrement de ces enfants, dans le livret de famille des parents adoptifs, accroît leur vulnérabilité en interférant avec la mise en œuvre de leurs autres droits bafoués en Algérie», lance M. M.D., qui éprouve, visiblement, de la peine à contenir sa colère. Il a fallu l'intervention d'une personne influente pour ramener à la raison l'irascible préposé aux guichets, pour lui faire inculquer que «l'enfant Kafil», c'est-à-dire adoptif, vu la loi islamique quant à la l'adoption, expressément interdite par le droit musulman, ne peut être consigné «malheureusement» sur le livret de famille, avec ses parents adoptifs. Abasourdi par cette discrimination des droits civils, qui en dit long, M. M. D., qui en a vu de toutes les couleurs en compagnie de son fils adoptif au cours de cette après-midi, ballotté entre les préjugés des uns et la faiblesse des textes pour une meilleure protection de l'enfance, était au bout du rouleau. La mésaventure de notre «conférencier», qui a eu la malchance d'être victime d'une façon insidieuse, fallacieuse et systématique, via des mentalités rigides, s'est vu, une seconde fois, mis au «pilori». Cette fois c'est le comble qui est arrivé, en effet, en voulant réserver dans un hôtel pour se reposer et reprendre le lendemain la route vers Oran, le réceptionniste a exigé la présentation du «livret de famille» et ce, pour justifier le lien de parenté de l'accompagnateur de l'enfant sur la fiche de police. Après avoir expliqué sa véritable appellation de «Kafil», tout en exhibant le morceau de papier qui sert d'acte de naissance, tire son origine à diverses humiliations dont a été victime M. M. D., avec son petit bout de choux, symbole de la pureté de l'innocence. Voyant un niet catégorique affiché de la part du réceptionniste, qui a exagérément insisté sur ce document en question, a vu notre interlocuteur déguerpir pour prendre le premier autocar au cours de cette même fin de journée en partance vers Oran. Il convient enfin de souligner que cette injustice entraîne une insécurité juridique et, partant, le déni d'un aspect essentiel de l'état de droit qui reconnaît les droits de l'enfant. M. M. D., qui s'active à faire des démarches pour partir en Amérique du Nord, en compagnie de son épouse et de son enfant, sera sûrement mieux considéré et respecté comme une adoption plénière dans les pays qui se respectent, tout en respectant les droits des enfants, sans distinction. Le législateur et les autorités de ce pays devraient se consacrer, de toute urgence, à la recherche ciblée de solutions aux défaillances du système administratif et judiciaire existant, quand des parents parcourent 1 200 kilomètres pour se faire délivrer un extrait de naissance en plus des humiliations et des interdits. A quand un ministère de l'enfance en Algérie ?