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La boue, le noir, la soif
Tissemsilt
Publié dans La Nouvelle République le 25 - 01 - 2009

Ceux qui ont connu, visité et aimé la capitale de l'Ouarsenis, et ses paradis après l'Indépendance diront de vive voix, combien cette ville était fascinante, du plat traditionnel à la station thermique sur les monts de Bordj Bounaâma. Ainsi, des paysages magnifiques de Teniet El-Had et ses sources et son vrai paradis au milieu de ses trente-huit marabouts, les saints patrons de la région. Aujourd'hui, leur coupole semble triste à fendre l'âme, seuls les corbeaux fidèles à leurs habitudes juchés sur des fils électriques continuent à croasser. Une malédiction frappe Tissemsilt peut-être celle de Sidi Ben Tamra, le saint patron de la cité que l'on a oubliée et piétinée a bien des égards.
Tissemsilt de son vrai nom, autrefois orgueilleuse et belle, hospitalière et accueillante, avec ses coutumes traditionnelles (poésie, à Ouled Kacem, fantasia de la tribu de Belhamissi, waâda à travers les quatre coins du vaste sol de l' Ouarsenis chants bédouins...) n'est aujourd'hui que l'ombre d'elle-même, une ville fantôme et une capitale toujours en chantier.
Ses habitants, autrefois pleins d'humour et gais à souhait, sont devenus les gens les plus taciturnes de notre pays. En fait, leur ville est devenue un véritable bidonville pour ne pas dire le couloir de la honte, uni avec une toile d'araignée de tous les mots et tous les maux ? Le fameux quartier Ebni OuaOuskot où végètent les 45 000 âmes, vivant dans ce lieu appelé par dérision ( Sami Ibni Ouaskot), le visiteur ou l'invité non avisé se retrouve complètement déconcerté et agressé par les émanations nauséabondes provenant des monticules d'ordures et risque sa vie sous les fils électriques suspendus d'une baraque à l'autre gourbi. Au milieu de ce vaste carrefour de tous les maux, l'esclavage du sexe n'a jamais cessé, le chômage a atteint des niveaux occasionnant des fractures aux conséquences durables et les différents programmes tant attendus n'ont pas été concrétisés. A Tissemsilt, rien ne se perd, tout se transforme, il paraît que même le bureau de main d'œuvre est au chômage et le personnel à la recherche d'un boulot. Les organismes de l'emploi sont aussi à la recherche d'un bloc.
El-Hadda mabkat gaâda fi bled echedda
Népotisme, corruption, interventions, sexe, connaissances, dressent des murailles infranchissables pour une catégorie de la population à laquelle les quelques postes d'emploi d'un maigre salaire, créés, sont inaccessibles, parce que réservés d'avance à certains. L'autre visage de la capitale de l'Ouarsenis est représenté par les prostituées de luxe, la drogue, les attaques à l'arme blanche, le faux et usage de faux, la misère, le boom éthylique ; une ville liée aux problèmes socioéconomiques dont la population a fui ses terres durant la décennie noire et en pleine mutation comme la nôtre. Laissant derrière eux 5 000 douars fantômes et l'argent de l'aide a fait le trottoir. Le plus vieux métier du monde ne cesse de se développer à Tissemsilt. Implanté dans les grands centres urbains, il s'est étalé aujourd'hui aux petites agglomérations, là où il y a «le potentiel... c'est-à-dire, la clientèle». Pour la drogue, parfois remplacée par d'autres liquides achetés chez le buraliste du coin par des chérubins devenus des sniffeurs, à l'age de la marelle, c'est l'un des fléaux sociaux dangereusement ancrés dans nos mœurs ; le fait de sniffer représente aussi un mal qui commence à prendre des proportions alarmantes chez les nains de la ville de Tissemsilt. Quant aux ruraux, une autre conduite des ancêtres. De quoi peut-on rêver ? Certes, certains ont des rêves pleins la tête, ne demandent qu'à s'évader, écouter de la musique et ne songent qu'à el-harga, c'est-à-dire la fuite vers d'autres cieux. D'autres ont bien choisi le chemin qui mène au développement pour gagner la croûte, là où les chantiers ont poussé comme des champignons chez les Nordistes et les Sudistes du bled. Déjà de nombreux paumés portent le poids de la misère. Pour la délinquance, les vols et les casses en série sont enregistrés quotidiennement.
A Tissemsilt comme dans toutes les villes du pays, la réalité crève les yeux. Si les jeunots du monde rural se ravitaillent d'une caisse de limonade pour l'écouler au milieu de son douar, à Tissemsilt, les bars au noir, comme celui appelé El-mahchacha, s'ouvrent plus vite que les lieux de loisir pour jeunes, les lieux de détente et la bière se vend mieux que tout autre produit comme le pain et le lait. Et la ville vit, ces dernières années, un boom éthylique. Le goût des égouts et l'affaire d'un mégot. La capitale de l'Ouarsenis, comme le disaient les Vialaris, a perdu de sa splendeur ; si les mines sont déconfites, les rues n'ont rien à leur envier ; les nids-de-poules sont légion, les fuites d'eau partout, les feux tricolores clignotent. Pour les automobilistes et les piétons, les premiers roulent pour l'achat d'une pièce détachée et les seconds pour faire la chaîne pour récupérer des bottes en nylon.
Les anciens quartiers sont devenus de vraies décharges publiques à ciel ouvert et le pactole injecté sur le programme des routes a pris une autre destination pour ouvrir des pistes afin de consommer la poussière en été et la boue en hiver et aucun projet ne répond aux normes de Lardjem, a Sidi El-Antri, Maâcem, Gouacem et autres patelins restent actuellement coupés du monde. Même le centre-ville de la capitale n'a pas échappé au système «D» devenu par la force des choses un vrai bourbier pour ne pas dire la politique du rafistolage et le bricolage est toujours en chantier et les autorités font la sourde oreille. A travers plusieurs douars et villes implantés sur le fond de la cuve de l'Ouarsenis les habitants sont confrontés au danger permanent d'inondations générées par les oueds voisins des groupements d'habitations dont plusieurs habitants restent coincés chez eux. Les dernières chutes de neige et les variations climatiques qu'a connues la région n'ont fait qu'accentuer la peur de ces familles . Autre vitrine de l'Ouarsenis : les routes sont dans un état de dégradation avancé, paralysant la circulation, le manque de transport... Le tronçon Ammari-Sfifia et le relais sur la route nationale. Ces voies sont inscrites au registre des souffrances. Quant à Maâcem et ses douars voisins et de l'autre rive de Tamelahet Sidi El-Abed ont bien choisi le chemin qui mène au cimetière. Cette région, oubliée de tous, un sol plongé dans la boue le noir et la soif et une ville cicatrisée comme le signale l'un des chouyoukh de la tribu de Adalla, n'a connu aucun changement depuis des dizaines d'années, malgré les différents programmes dont a bénéficiés la wilaya, ici on consomme les nuits restantes au milieu de la boue, le noir et la soif.
L'argent fait le trottoir et le SDF fait le boulevard
A Tissemsilt ou ailleurs, la route est devenue un vrai marécage envahi par les détritus et la boue, causant toutes sortes de nuisances à cette frange marginalisée dont les premières victimes sont les enfants scolarisés, surtout durant cette période.
Le ramassage scolaire affecté pour le compte du sol de l'Ouarsenis a dévié l'itinéraire vers d'autres cieux laissant les collégiennes et les écoliers font le parcours du combattant et traversent des kilomètres par jour a Tamelahet, Maâcem Ouled Mimoun et autres coins reculés même les enseignants sont concernés à l'exemple de cette nouvelle, recrutée dans le cadre du filet social affecté sur le mont de Djegbala, chargée de la couture, elle traverse une moyenne de 20 km quotidiennement quant aux filles internes c'est l'enfer.
D'autres carences dont souffre la région au quotidien : le manque d'eau dont plusieurs localités approvisionnées au goutte à goutte pour les pauvres et les citernes tractées pour le compte de la frange supérieure dont on ignore l'origine du précieux liquide.
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Pour le gaz de ville c'est un rêve pour une grande partie de la population et les projets à la traîne et les habitants continuent à courir derrière les bonbonnes de gaz proposée à 400 dinars et le ravitaillement se fait rare. L'énergie électrique, la bougie et la chandelle fonctionnant comme une machine à l'huile et un trio faisant le quart, et chaque famille est approvisionnée d'un stock de bougies car les habitants sont habitués aux fréquentes coupures quotidiennement ce que confirment les chaînes interminables des automobilistes devant les stations.
L élu, le ventre creux, et la galette traditionnelle
Dans la wilaya de Tissemsilt l'éclairage public n'a pas de chapitre ce qui facilite la tâche des voleurs de tout acabit et pénalise les citoyens devant se déplacer de nuit. Seuls quelques-uns utilisent les briquets achetés chez le vendeur de cigarettes en détail. Au total, c'est l'absence de structures et des moindres commodités de la vie quotidienne, surtout d'institutions en mesure de prendre en charge les préoccupations de la jeunesse. A Ouled Benchohra, on s'interroge sur cette bâtisse réalisée au profit de la femme rurale livrée à une personne étrangère de la région. La jeunesse n'a pour loisirs que les cafés maures qui datent de l'ère coloniale au vu du manque de terrain de proximité et des coins de loisirs même l'Internet souffre du débit. D'ailleurs, pour jouer une partie de football, il faut se déplacer avec armes et bagages et entassés comme du bétail sur des tombereaux au chef-lieu de commune, distant de plus de 10 km.
Tissemsilt figure sur la carte
Par ailleurs, si les cantines scolaires sans pain, les élèves des différentes écoles déplorent l'absence des chauffages, l'absence de cette source d'énergie leur permettant de faire face aux intempéries et au froid rigoureux que connaît la région en hiver à l'heure où une crise du fuel à travers la région bat son plein. Cette situation demeure d'un impact plus que négatif sur la scolarité des élèves en raison de l'absentéisme lors des journées très froides et le climat glacial, s'ajoute la fermeture des pistes. Dans ce contexte, les élèves de pas moins cent douars et mechtas déplorent, eux aussi, l'insuffisance du transport scolaire, d'autant plus que les faibles ressources financières de ces communes démunies ne peuvent en aucun cas faire face à la forte demande du transport de l'important effectif qui est scolarisé au niveau des chefs-lieux et les autres, sans parler des travailleurs qui traversent des kilomètres pour rejoindre le boulot, pour les enseignants devenus des vraies auto-stoppeurs. Devant la présence de cet important effectif nécessitant le transport, les services concernés n'ont reçu aucune demande de liaison à cause des routes dégradées.
Les habitants de Tissemsilt ont dû accueillir le nouvel an dans des conditions déplorables. En cette journée blanche où toute une région est sous un manteau blanc, le centre-ville offre un décor triste. La voirie est dans un état regrettable, les ordures jetées partout. Trottoirs défoncés, routes crevassées et ouvrages d'assainissements éventrés, même les tampons en fonte ont disparu. Partout, le manque d'équipements et d'entretien est flagrant. Le tissu urbain se résume à un pâté de bâtisses coloniales excessivement décrépies, les murs lézardés, les toitures centenaires et l'autre décor de la boiserie. En cette journée de lundi, le centre-ville de Tissemsilt déserté, une ville fantôme, et ses douars coupés du monde. Y a-t-il un organisme pour intervenir pour l'ouverture des quatre chemins qui existent sur le sol de l' Ouarsenis. Tissemsilt ville cicatrisée, Tissemsilt région oubliée et sa population ne sait à quel saint se vouer et sur quel pied danser dans un patelin perdu avec une vie partagée avec la boue, le noir et la soif… avec les coutumes des ancêtres, une ceinture de sécurité avec le plat traditionnel réservé a chaque passant sur les coins les plus reculés.
Une région victime de ses enfants
A travers les localités rurales et sur les monts glacials ou sont implantés les villages et d'autres bourgades perchées sur les hauteurs de l'Ouarsenis, connus pour la rudesse de leur climat en cette période hivernale, toute une population en souffrance, ici si l'électricité clignote, les autres moyens de chauffage sont généralement inexistants, à l'image du gaz de ville et celui de la bonbonne qui se fait de plus en plus rare. Parfois, et pour ce qui est de la butane, elle se fait par le manque de dépositaires au niveau des localités seuls les ravitailleurs en noir font la loi, et le tarif fixé au pif.
Le constat le plus cinglant chez la population rurale se trouve, de ce fait, obligée de parcourir des dizaines de kilomètres sur le dos des animaux (ânes-mulets) de se rabattre sur le bois, ultime recours A sidi El-Antri, Sidi El-Abed, El-Maâcem et autres patelins, où sévit le climat glacial sur un plateau de plus de 800 m d'altitude. Là, les enfants en bas âge, à l'aide des bêtes de somme, se chargent de la corvée.
Ils sillonnent, quotidiennement, les bois environnants pour s'approvisionner en bois de chauffage «misère oblige».
Ici, on assiste et on constate par ce fait sur l'autre rive occupée par la maffia du cèdre à un véritable massacre à la tronçonneuse, les mains en font tout de même une affaire, dès que le chargement de la cargaison d'une remorque se fait céder mensuellement à l'équivalent du salaire d'un sénateur. Nous apprenons lors de notre virée à travers ces collines montagneuses que certains habitants de la classe des pauvres par manque de moyens financiers et vu la cherté du gaz butane, cédé à un prix imaginable l'unité, les montagnards se rabattent sur le bois, même pour l'usage de la cuisine pour préparer une galette traditionnelle ou une soupe chaude. Quant aux cantines scolaires c'est une autre histoire et une drôle masrahia en trois actes nous confie un directeur d'établissement scolaire «dans ce lieu, le bois de chauffage sert encore pour la cuisson, vu le manque de gasoill et vu la situation des routes complètement dégradées , et ce n'est pas nouveau pour nous ; je fréquente la même classe comme écolier et le plus grave je traverse des dizaines de kms quotidiennement pour rejoindre mon poste de travail. La cantine est gérée par des filles recrutées dans le cadre du filet social».
Le filet social gère les cantines scolaires
Un témoignage pour le moins accablant en ce début du 3e millénaire. Nous sommes sur le sommet d'une chaîne montagneuse d'une altitude de 1 984 mètres, sur un plateau qui nous marque les événements du 11e siècle, des Berbères, les Banou Hillal, les Tougines, et la tribu de Ahmed El-Ouarchanissi pour fixer les regards sur la résistance anticolonialiste de L'émir Abdelkader et autres résistances qu'a connues cette région pour se rendre enfin au musée des Martyrs où sont placardés les portraits de nos héros du plus jeune martyr de la région, Kacem Mohamed, originaire de Beni Lent au grand valeureux le lion de l'Ouarsenis. Le clandestin est resté coincé avec sa bagnole lors de ce reportage mais nous on a réussi de rentrer chez nous à bord d'autres moyens.


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