C'était le 12 février 1995. C'est ce jour que les yeux de Rachid Mimouni se sont refermés sur ce monde d'ici bas. La maladie a eu raison de lui dans son exil. Ah l'exil ! Combien sont-ils à y avoir été contraints en ces années de terreur. La peur de la mort soudaine et lâche est un sentiment légitime. C'est ce qu'a dû sans doute penser Rachid Mimouni. Il a alors traîné dans son exil sa femme et ses enfants, pour la leur épargner. Décision difficile, certes, mais le choix étaient pleinement assumé. Malheureusement, une poignée d'années plus tard, le romancier nous quitte «assassiné» par la maladie. Comme quoi, contre la mort, il n'y a point de forteresse. Il a laissé derrière lui, une œuvre inachevée. A notre grand dam. «La littérature est ma voix d'engagement. C'est mon arme préférée. Elle ne tue pas mais me permet de dire mon opinion aux gens», aimait souvent à dire fils de paysans, né à Boudouaou le 20 novembre 1945. Après des études primaires effectuées dans son village natal, il poursuit sa scolarité à Rouiba avant de réussir son examen du baccalauréat et de s'inscrire à Alger pour une licence en sciences économiques. Diplômé dès 1968, il est assistant de recherche à l'Institut national pour la productivité et le développement industriel. Il obtient ensuite une bourse pour une post graduation et part pendant une année poursuivre ses études à l'Ecoles des hautes études commerciales de Montréal au Canada. Un an plus tard, il est retour et commence à enseigner dès 1976. A partir de 1990, il enseigne également à l'Ecole supérieure du commerce. Membre du conseil national de la culture, il est également président de la fondation Kateb Yacine. Il occupe, par ailleurs, le poste de vice-président d'Amnesty International. Très remarqué, il est invité à animer des rencontres et contribue par ses écrits de haute facture à faire connaître ses idées d'avant-garde. Mimouni publie sa première nouvelle dans les colonnes du Monde diplomatique. Lui, esprit si cartésien, se trouve pourtant happé par l'imaginaire. Sa carrière littéraire débute vraiment dans les années 1970. Son premier roman intitulé le Printemps n'en sera que plus beau, édité par la Sned en 1978 s'avère être un vrai chant d'espoir. Quatre années plus tard, le Fleuve détourné, son roman phare, paraît chez Robert Laffont, suivi de Tombeza et l'Honneur de la tribu. Ce dernier fait, d'ailleurs, l'objet d'une adaptation cinématographique de la part du réalisateur Mahmoud Zemmouri. En 1990 sort la Ceinture de l'ogresse (Prix Franco-arabe) suivi, un an plus tard d'Une peine à vivre (Prix de l'Académie française). A cette époque, l'Algérie traverse une situation sécuritaire délétère. Marqué par cette horreur conjuguée au quotidien, il écrit en 1992, De la barbarie en général, de l'intégrisme en particulier. Une œuvre qui se veut un véritable réquisitoire contre l'intégrisme islamiste et un examen de conscience. Exilé au Maroc en 1993, il publie chez Stock la Malédiction, dédié à son ami Tahar Djaout. Il obtient avec cette ultime œuvre le Prix du Levant et le prix de la Liberté littéraire. Le 12 février 1995, il décède dans un hôpital parisien, des suites d'une maladie. Il avait tout juste 50 ans. Son recueil de nouvelles Chroniques de Tanger sera publié à titre posthume.