Les concessionnaires automobiles en Algérie ont vu leur chiffre d'affaires, durant l'année 2009, dégringoler de plus de 30%, et la crise économique mondiale n'y est pour rien. La principale raison de cette chute revient aux différentes décisions prises par le gouvernement pour réduire la facture des importations qui avait atteint les 36,05 milliards de dollars en 2008. La première décision fut l'instauration d'une taxe, entre 50 000 à 150 000 DA, pour tout achat d'un véhicule neuf. La loi de finances complémentaire 2009 (LFC) tombera tel un couperet sur les concessionnaires automobiles algériens. Elle se résume principalement dans l'annulation de tous les crédits à la consommation. Quelque temps après, le gouvernement interdit le débarquement des véhicules au port d'Alger, obligeant les concessionnaires à se tourner vers les ports de Djendjen, Mostaganem et Ghazaouet. Pari réussi, le gouvernement a pu réduire, durant le dernier trimestre de 2009, les factures des importations et a, par la même occasion, poussé les représentants des marques automobiles à réfléchir à la possibilité d'ouvrir des usines en Algérie. Mais en mettant en place ces nouvelles mesures, l'Etat a favorisé le marché automobile d'occasion qui a flambé depuis le 30 juillet dernier, date de publication de la loi de finances complémentaire 2009. Histoire de tâter le pouls, nous nous sommes rendus au marché automobile d'occasion d'El-Harrach. Dès notre arrivée au parking, une dizaine de spéculateurs se jettent sur notre véhicule, croyant qu'il était à vendre. «C'est une technique bien connue dans les marchés de voiture d'occasion. Dès l'entrée d'un nouveau véhicule au marché, les «acheteurs» se ruent sur le vendeur afin de tenter de casser son prix. Une technique pour garder le contrôle du marché», nous confie un des habitués de cet endroit. Interrogé sur les prix des véhicules, notre interlocuteur nous affirme que les prix des automobiles d'occasion ont grimpé de près de 70 000 DA pour les voitures de moyenne gamme et de 130 000 DA pour les véhicules de haute gamme, après l'interdiction des crédits et l'instauration des nouvelles taxes. Selon lui, «les gens préfèrent acheter une voiture d'occasion au lieu de payer une taxe allant de 50 000 à 150 000 DA. Une situation qui n'est pas passée inaperçue chez les spéculateurs», conclut-il. Ainsi, à titre d'exemple, une Hyundai Atos GLS, année 2009, est proposée à 785 000 DA négociables, alors qu'elle coûte 782 000 DA TTC chez le concessionnaire. Une Kia Picanto 2008 est proposée à 830 000 DA, alors qu'elle est proposée à partir de 780 000 DA TTC chez le concessionnaire. Une Chevrolet Aveo Elégance, année 2009, est proposée à 930 000 DA négociables, alors qu'elle vaut chez le concessionnaire 929 000 DA TTC. Une Peugeot 207 HDI année 2009 se vend à partir de 1 420 000 DA, alors qu'elle coûte chez le concessionnaire 1 409 000 DA. D'un autre côté, l'instauration de la nouvelle taxe et l'annulation de tous les crédits à la consommation constitueront une bouffée d'air frais pour l'économie nationale, puisque cette action a réduit la facture des importations qui a atteint 35,27 milliards de dollars durant les onze premiers mois de 2009, contre 36,05 milliards de dollars durant la même période en 2008, soit une baisse de 2,17%. Rappel des principales mesures de la LFC 2009 La première décision se résume à travers l'ordonnance N°09-01 du 22 juillet 2009 de loi de finances complémentaires 2009. Elle concerne le relèvement de la taxe sur les transactions des véhicules automobiles neufs pour les cylindrées supérieures à 2 500 cm3 et l'extension de son champ d'application aux camions et engins de travaux publics. La taxe passe de 100 000 à 200 000 DA pour les véhicules dépassant 2 500 cm3, essence, et de 150 000 à 300 000 DA pour les véhicules diesel. Concernant les camions et les engins de travaux publics, la taxe varie entre 350 000 et 500 000 DA. La seconde décision se résume dans l'article 75 de la loi de finances complémentaire qui stipule que «les banques ne sont autorisées à accorder des crédits aux particuliers que dans le cadre des crédits immobiliers». Et la dernière mesure concerne l'interdiction du débarquement des véhicules au port d'Alger. La réaction de l'Association des concessionnaires automobiles (AC2A) s'est fait attendre. En effet, après plusieurs semaines de mutisme, rappelons-le, l'AC2A annonce, enfin, la soumission prochainement aux pouvoirs publics d'une étude sur les perspectives de l'implantation en Algérie d'une industrie de fabrication de véhicules de tourisme, selon le président de cette association, Mohamed Baïri. Il fallait attendre la deuxième sortie médiatique de l'AC2A pour avoir une idée des pertes occasionnées par les décisions de la loi de finances complémentaire. En effet, à la veille de la tenue du Salon international de l'automobile d'Alger, le président de AC2A n'a pas manqué de critiquer ouvertement les mesures prises par le gouvernement dans la loi de finances complémentaire 2009. Il a, par la même occasion, déploré le manque de concertation et de communication entre son association et les pouvoirs publics. Une situation qui a, selon lui, lourdement pesé sur leur chiffre d'affaires qui a chuté de plus de 30%, uniquement durant le mois de septembre dernier. Notons que le marché automobile algérien est le plus grand marché d'Afrique, avec un chiffre d'affaires annuel de près de quatre milliards de dollars.