Aussi surprenante que cela puisse paraître, les relations entre pays méditerranéens étaient plus étroites, sinon très tendues dans les premiers siècles du dernier millénaire qu'aujourd'hui. Nous en avons des vestiges sur le plan des formes architecturales, pratiques rituelles, toponymies, langues. La Sicile a été gouvernée pendant sa période florissante, XIIe siècle par Roger II, continuateur des califes abassides, selon l'historien de référence El-Idrissi. Roger II s'entourait de lettrés musulmans, grecs, juifs. Palerme était devenue une métropole multiculturelle. Roger II (1105 – 1154) fut un grand humaniste. Il connaissait la langue arabe et échangeait des lettres, avec les siens et les souverains, dans la langue du Coran. Roi incontesté mais fin connaisseur On raconte que ce fils de Roger I et frère de Robert Guiscard avec qui il avait conquis l'Italie et la Sicile, avait de parfaite connaissances dans le domaine des plantes aromatiques destinées à la cuisine. L'art culinaire de son temps ne devait pas avoir le moindre secret pour lui. Il faut ajouter que le monarque avait le sens d'une alimentation équilibrée pour l'entretien du corps, et la passion des plantes à valeurs curatives. On suppose qu'il avait beaucoup appris sur la phytothérapie à la faveur de ses nombreux voyages dans son île et hors des frontières. El-Idrissi était à ses côtés pour dresser des cartes de géographie de pays qu'il voulait visiter. Abu Abd Allah Mohammed dit El-Idrissi, grand géographe arabe, né à Ceuta et connu pour avoir été le spécialiste des cartes de géographie qui avaient contribué à de nombreux travaux durant les siècles qui ont suivi, a apporté à Roger II de précieux témoignages sur le phare d'Alexandrie retiré des eaux il y a de cela quelques années. Un géographe au service des causes communes Aux dires de ceux qui ont eu accès à ses ouvrages, la carte de géographie chez lui est inversée, si bien que le nord est en bas, le sud en haut, ce qui rend la lecture assez délicate pour situer chaque pays par rapport aux points cardinaux. Des connaissances en histoire devaient lui être nécessaires pour retracer dans le temps et depuis les origines l'évolution d'une géographie économique, avec ces indications sûres concernant les dominants et les dominés dans les échanges de produits de consommation. Et en tant qu'écrivain, il n'avait pas droit à l'erreur. El-Idrissi qui travaillait beaucoup au service de Roger II insistait sur les facteurs favorables qui avaient permis les relations privilégiées entretenues par Palerme, capitale de la Sicile, avec Pise, Gênes, Venise, pour devenir une puissance commerciale. Les échanges se faisaient alors par voie maritime dans un climat de respect mutuel et de bon voisinage entre les peuples. On avait mis à profit tous les atouts pour assurer une parfaite complémentarité et la sauvegarde des intérêts de chaque pays. En tant que géographe, El-Idrissi avait une réelle maîtrise des conditions naturelles de l'ensemble régional. Et que l'on parlât en arabe, latin, grec, il y avait une parfaite harmonie entre les partenaires du commerce ou Méditerranée.