Pythagore de Samos (VIe siècle av. J.-C.) est l'un des mathématiciens les plus connus de nos jours, notamment grâce à son théorème qui accompagne le quotidien (ou presque) de tout écolier. Pourtant, on ne possède aucun document historique directement rédigé de sa main. Comme pour la plupart des savants antérieurs à Platon (IVe siècle av. J.-C.), les premières biographies disponibles ne sont écrites que des siècles plus tard par des historiens grecs. Portrait de Pythagore Il existe quatre biographies de Pythagore, dont deux qui se distinguent par leur ampleur : il s'agit des récits de Diogène Laërce et de Jamblique, tous deux datant environ du IIIe siècle. Il s'est, donc, écoulé plus de huit siècles entre Pythagore et ces textes ! Il est difficile de dire si un fait quelconque est authentique ou pas. Cependant, ce mystère fait aussi partie du charme de la Grèce antique. Une vie de voyages Son père et sa mère, vivaient sur l'île de Samos. Durant un voyage d'affaires, son père consulte l'oracle de Delphes qui lui prédit la naissance prochaine d'un fils dont la beauté et la sagesse surpasseront celles de tout autre être humain. A son retour, son père change le nom de sa femme en Pythais et baptise son fils Pythagoras, qui signifie littéralement «annoncé par la Pythie». Dès ses premières années, l'enfant fait preuve d'une intelligence et d'une sagesse exceptionnelles. Sa réputation s'étend peu à peu aux pays voisins jusqu'à atteindre le célèbre Thalès de Milet, reconnu comme l'un des sept sages de l'antiquité grecque. A l'âge de dix-huit ans, le tyran Policrates arrive au pouvoir. Pressentant qu'un tel gouvernement constituerait un obstacle pour sa formation, Pythagore décide de quitter le pays. Il entame, alors, une série de voyages qui dureront plus de vingt ans et qui le mèneront dans les lieux où la connaissance de l'époque était la plus féconde. Il étudiera la philosophie et les mathématiques aussi bien auprès de penseurs grecs comme Anaximandre et Thalès, que sous la tutelle de prêtres égyptiens. Il passera, également, par Babylone où il y subira une certaine influence. Un contemporain rapporte que lors d'une traversée sur un bateau, Pythagore s'est assis calmement et a gardé la même position durant des jours entiers, sans bouger ni même se nourrir. Au fil des années, la rénommée de Pythagore ne cesse de s'étendre et lorsqu'il revient à Samos, alors âgé de plus de cinquante ans, il décide de commencer à enseigner. Malheureusement, ses enseignements ne récoltent que peu d'engouement, les gens de Samos étant peu intéressés par les disciplines mathématiques. Sans cesse sollicité par des gens venant de la Grèce entière pour le consulter à propos de politique d'affaires publiques, Pythagore décide de quitter son pays pour s'installer définitivement en Italie, à Crotone, où il pourra à nouveau se concentrer sur ses recherches personnelles. C'est là qu'il rassemble des centaines d'adeptes pour fonder la secte des Pythagoriciens qui perpétuera ses enseignements durant des siècles entiers. Les circonstances de sa mort varient très fortement d'un auteur à l'autre. Certains affirment qu'il aurait été assassiné par des gens de Crotone à la suite d'une émeute politique. D'autres disent qu'il serait mort bien après, de famine et de désespoir... La secte des Pythagoriciens Pythagore livrait ses enseignements en public. Cependant, il n'en réservait les éléments les approfondis qu'à un public plus restreint constitué des Pythagoriciens. Ce sont ces derniers qui forment la secte dirigée par le philosophe. Ceux qui étaient autorisés à l'écouter à l'extérieur étaient nommés - avec mépris, pour certains - les Pythagoristes. Les Phythagoriciens privilégiés devaient vivre en commun et partager tous leurs biens, contrairement aux Pythagoristes qui pouvaient continuer à mener une vie indépendante. De plus, un certain nombre de règles, appelées symboles, devaient être respectées par les Pythagoriciens. Pour ces raisons, il est vraisemblable qu'ils formaient une secte. Les symboles concernaient toutes sortes d'aspects de la vie quotidienne, et certains d'entre eux sont particulièrement exotiques. En voici quelques exemples, issus du Protreptique de Jamblique : «Sois maître de ta langue devant autrui, par respect pour ton créateur.» «Tiens-toi à l'écart de tout vase qui contient du vinaigre.» «Quand tu vois un homme se charger d'un fardeau, aide-le; mais n'interviens pas dans la décharge.» «Chausse d'abord le pied droit, mais déchausse d'abord le gauche.» «Elève un coq, mais garde-toi de l'offrir en sacrifice, car il est consacré à la Lune et au Soleil.» «Ne porte pas de bague.» Un autre symbole intéressant est le suivant : «Abstiens-toi de manger des êtres animés.» En effet, les Pythagoriciens manifestaient un grand respect pour la vie animale, notamment parce qu'ils croyaient en la métempsycose. Il s'agit d'une doctrine, peut-être inspirée chez Pythagore par son séjour en Egypte, qui consiste à croire qu'à sa mort, l'âme d'un être vivant passe dans le corps d'un animal en attendant la prochaine réincarnation (transmigration de l'âme). Les membres de cette secte se divisaient encore en deux groupes. Le premier, on trouve le chez ceux qui recevaient un enseignement sans aucune démonstration c'est-à-dire les «choses entendues». Ils se contentaient, en effet, d'écouter, simplement. Ils étaient dirigés par un des meilleurs disciples de Pythagore, nommé Hippase de Métaponte. On raconte qu'il aurait été jeté à la mer à la suite d'une accusation contredisant une théorie de Pythagore, car elle constituait un sacrilège envers la philosophie de ce dernier ... L'autre groupe était constitué des véritables initiés, ceux qui recevaient l'enseignement complet donné par Pythagore en personne. Ce groupe était d'ailleurs en violent conflit avec celui les premiers. Leur désignation provient du terme «mathemata» -- qui signifie «les choses apprises» --, on les appelait les «mathematikoi». C'est ce groupe d'initiés qui est à l'origine de l'appellation actuelle des mathématiques…