La construction de la Grande Mosquée omeyyade a nécessité plusieurs années. Après avoir exposé dans le précédent article, les caractéristiques relatives aux différents travaux, passons maintenant aux autres tâches qu'a nécessitées cette mosquée historique. Le couvrement La salle de prière est actuellement couverte par une charpente soutenant un toit en bâtière, c'est-à-dire à double pente. L'organisation tripartite de ce couvrement met en valeur la disposition interne à trois nefs. Par contre, le fait que des fenêtres en partie supérieure des murs (notamment du mur de qibla) aient été coupées montre que la pente des toits a dû être retouchée, sans doute lors de l'une des reconstructions dues aux incendies. En effet, la charpente étant en bois, c'est cet élément qui est le plus fréquemment détruit lors de feux. Une coupole surmonte également le transpet. On sait qu'il en existait déjà une, sans doute en bois, avant l'incendie de 1069, car elle est mentionnée par Nâbigha Abi Shaibâni, poète de cour des califes al-Walid et al-Mouqadassi. La comparaison avec le dôme de la mosquée Ibn Touloun permet de supposer qu'elle était montée sur des poutres en forme de croix. Le dôme actuel, dit dôme de l'aigle, n'a été construit que sous Malik Shah (1082-1083). Le décor Le décor le plus remarquable à Damas est constitué par les mosaïques de verre à fond d'or qui recouvrent en grande partie les murs. Néanmoins, outre le fait que ces mosaïques sont pour la plupart des reconstitutions, en raison des dommages causés par l'incendie de 1893, elles ne sont par les seules composantes d'une décoration qui comprend aussi beaucoup de bois sculpté (charpente, entraits, portes à vantaux, maqsura), et des revêtements de marbre blanc sur les murs et le sol. Six grilles de marbre à motifs géométriques sont également conservées. Il fallait aussi compter avec des peintures, actuellement disparues, et sans doute des apports de bronze (lustres et feuillets recouvrant le bois, comme au dôme du Rocher), qui n'existent plus non plus. Les mosaïques La mosaïque s'étendait, autrefois ,sur toutes les parties hautes de la mosquée, dans la cour et le haram, créant une couverture qui commençait juste au-dessus des panneaux de marbre. On la trouve actuellement dans le vestibule est, sur une large surface de la face nord du transept, sur les arcs du riwaq. Mais le panneau le plus célèbre est le panorama de la rivière Barada, mis au jour au début du XXe siècle sur le portique ouest, et qui mesure 34,5 mètres de long pour 7 mètres de haut. Recopié grandeur nature par trois artistes syriens au moment de sa découverte, il est actuellement toujours conservé in-situ, mais la copie se trouve au musée du Louvre. Il y a une certaine naïveté dans le traitement, malgré les emprunts à la tradition classique dans nombre de motifs (acanthes, vases jaillissant, cornes d'abondance, arbres traités de mainère réaliste), qui existaient déjà au dôme du Rocher. Par contre la référence au monde sassanide est ici inexistante. Le thème dominant et nouveau est celui de l'architecture. On trouve ainsi représentés des palais (architectures riches à étage), des maisons, assemblées comme dans un village, et des constructions uniques, un hippodrome, un portail à ciel ouvert. Cette iconographie pacifique (sans fortification) servirait à montrer l'étendue du Dar al-islam. Les motifs ornamentaux Une autre lecture peut être menée, par comparaison avec les mosaïques à visée eschatologique de la Grande Mosquée de Médine, réalisées dans la même technique et les mêmes tons. Les arbres seraient alors une référence au paradis tel que présenté dans la religion musulmane, comme un vaste jardin, les perles pourraient être une référence aux hourris. De plus, ces mosaïques sont marquées par la tradition chrétienne, peut-être parce qu'elles ont été réalisées dans un lieu à majorité chrétienne, et peut-être par des artisans byzantins. Or, les arbres prennent plus ou moins la place des martyrs, tels qu'on les trouve sur les mosaïques chrétiennes de la rotonde de Saint-Jean de Thessalonique, par exemple. Par ses dimensions (157 x 97 m), cet édifice était alors le plus grand bâtiment du monde musulman et servit de modèle à toutes les autres mosquées de l'Empire. La décoration est une mosaïque datant du VIIIe siècle. Il s'agit d'une ?uvre byzantine. On y lit deux thèmes : sur l'édifice en pierre, une représentation du monde «pacifié» et islamisé ; sur les décors floraux, une vision omeyyade de la ville idéale. La mosquée sera dorénavant une ?uvre religieuse mais aussi politique. La Mosquée de Damas a subi des influences byzantines pour les travaux qui furent effectués par des architectes et des artistes byzantins. Les chapiteaux eux-mêmes, avec leur abaque en tronc de pyramide, étaient déjà utilisés à la période byzantine. (Suite et fin)