Depuis très longtemps, la wilaya de Sétif se dispute la première place avec celle d'Alger en matière d'accidents de la circulation. Comme elle l'emporte si souvent, les routes de la capitale des Hauts-Plateaux comme celle de la mort. Même si pour cette année, les chiffres qui nous ont été communiqués par les services de la Gendarmerie nationale affichent une légère baisse, la situation demeure inquiétante et des campagnes de sensibilisation s'avèrent nécessaires, voir même urgentes. «Durant le premier semestre de l'année en cours, nous avons enregistré 433 accidents dont 43 étaient mortels. Ces accidents ont engendré 51 morts et 723 blessés. Par rapport à la même période de l'année 2009, une légère baisse a été ressentie avec 592 accidents causant 52 morts et 973 blessés», a communiqué le capitaine Abderrahmane-Mediani, chef de la section ESR (Escadron sécurité routière) de la wilaya de Sétif. Cette baisse, analyse l'officier de la gendarmerie, est principalement due à l'ouverture de l'autoroute Est-Ouest mais aussi à l'application rigoureuse du nouveau code de la route. Notre interlocuteur nous signalera que les causes de ces accidents sont très connues dans la wilaya de Sétif. «Il s'agit de l'excès de vitesse, des dépassements dangereux et le non-respect de la priorité. En fait, si on parle de manière générale, c'est le non-respect du code de la route. Les habitants de la région sont très connus pour l'excès de vitesse et toutes les campagnes de sensibilisation qu'on organise à longueur d'année n'ont servi à rien. On a presque fini par croire que l'on donne la tête contre les murs», nous dira t-il désespérément. De notre côté, on a fini par prouver sur les routes de la wilaya de Sétif le fameux proverbe local : «Une heure à l'hôpital qu'une minute en retard.» De retour du village d'Aïn Zada dans la commune d'Aïn Arnat, nous avons été témoin d'un accident aux environs de 14h, d'une voiture de marque Peugoet 206 et dont le chauffeur roulait en pleine descente et à l'entrée de la ville de Sétif à 120km/h sans se soucier de sa vie ni celle des autres automobilistes. Heureusement que l'accident n'a causé que des dégâts matériels assez importants sans perte de vie. Un autre accident est survenu dans la journée du mercredi dernier et pour une raison banale. Le chauffeur, originaire de la wilaya de Jijel avait voulu défier tout le monde en faisant le trajet Jijel-Aïn Defla-Jijel en une seule journée. Fatigué et somnolant et roulant à 110km/h, il a fini par être vaincu par le sommeil et réveillé par la suite par un accident sur la nouvelle autoroute. Perturbé par le choc, ce conducteur, inconscient, avait quand même reconnu à l'arrivée des éléments de la protection civile qu'il avait échappé bel à la mort qu'il aurait pu éviter en s'arrêtant quelques minutes pour se reposer. Même si Sétif a bénéficié d'une autoroute de 74 km, les points noirs sont bien révélés : la RN5, RN9, RN28 et RN75 qui relient entre le nord algérien et le sud-est, l'est à l'ouest en passant par Sétif, la circulation devient intense et parfois impossible surtout pendant la saison estivale sur les trois premières routes nationales. Pour les 24 km de l'autoroute est-ouest mis en circulation en janvier dernier, les conducteurs de et vers Sétif ou de passage par cette wilaya n'osent jamais l'emprunter la nuit. «Aucune station-service, aucun relais ni air de repos, ce qui peut représenter un réel danger pour nous. Si par malheur notre véhicule tombe en panne, nous serons des proies faciles aux agressions. Aucune mesure de sécurité n'a été prise avant la mise en circulation de cette autoroute », explique Ahmed, routier de la wilaya de Bordj Bou Arréridj. Effectivement, le constat de notre routier est réel et confirmé par la Gendarmerie nationale à Sétif. «A partir de 18h environs, tous les automobilistes contraints de conduire le soir virent vers les anciennes routes nationales, ce qui n'a pas totalement résolu le problème des accidents de la route dans cette wilaya», révèle l'officier Mediani. Les chauffeurs empruntant surtout la RN5, celle de la mort, reliant Sétif à El-Eulma, ne respectent même pas les limitations de vitesse à l'entrée de zone urbaine ni les stop réglementaires. Présents dans un point de contrôle de la gendarmerie où le radar placé soigneusement loin de la vue des conducteurs, nous avons été sidérés du comportement de ces derniers. Au village de Lahoua, commune d'Ouldja, daïra de Bir El-Arch où la vitesse est clairement limitée à 60 km/h, des terroristes de la route trouvent le moyen d'atteindre les 163 km/h sans scrupule. Accidents de la circulation : l'état des routes pointé du doigt Comme ce sont généralement les chauffeurs de taxi qui sont accusés d'excès de vitesse et auteurs d'accidents, nous avons fait un tour du côté de la gare routière de Sétif. La plupart de ces conducteurs, pour ne pas dire tous, ont nié cette accusation. «Nous roulons selon la réglementation en vigueur sans dépassement et en respectant le code de la route. Le problème est ailleurs. Les routes nationales sont dans un état catastrophique pour le moins que l'on puisse dire», crie un taxieur travaillant sur l'axe Alger-Sétif. Les autorités locales, spécialement celles responsables du secteur des travaux publics, conscientes du problème, ont entrepris plusieurs actions. Déjà pour la période de 2004 à 2009, des projets de dédoublements et modernisation de routes nationales de 208 km ont été réalisés sur un total de 635 km constituant les routes nationales. Pour les chemins de wilaya (CW) qui s'étendent sur 673 km, un réseau de 358 km a subi des travaux de modernisation. Sur les 2 675 km de chemins communaux (CC), 792km ont été aussi modernisés. «Ces travaux ont été bénéfiques pour 600 000habitants. Si l'on compare avec l'année 1999, la réduction de la vétusté du réseau routier dans notre wilaya a atteint 29 % en 2009 contre 70% en 1999 pour les routes nationales, 25% en 2009 contre 85% en 1999 pour les chemins de wilaya et 60% en 2009 contre 90% en 1999 pour les chemins communaux», nous a expliqué Ali Seddik, chef de service d'entretien au niveau de la DTP de Sétif. Notre interlocuteur a ajouté que pour l'autoroute est-ouest, le taux d'avancement global des travaux a atteint 90 %. «L'ensemble des ouvrages d'art est achevé à 100 % et tout le tronçon de l'autoroute avec ses 75 km sera livré le mois prochain.» Pour ce qui est des autres objectifs à atteindre pour l'année en cours, M. Seddik nous a informé que sera question de l'extension de la piste de l'aéroport à 2 900 mètres, de la réhabilitation de la RN76 reliant Guenzet à Boufarroudj et la livraison de deux échangeurs sur le contournement est de la ville de Sétif. «Il sera aussi question de l'achèvement du contournement nord-ouest de la ville de Sétif, l'achèvement de la 2e tranche du projet de dédoublement de la RN9 et l'achèvement du projet de réhabilitation des CW 137A, 63, 64, 09, 171 et 04», ajoute M.Seddik. Quant à l'état du parc automobile de la wilaya de Sétif, sa vétusté est loin d'être prouvée puisque les véhicules de moins de 5 années l'emportent avec 75 090 véhicules, tous types confondus. «Pour les voitures de tourismes ou ce qu'on appelle ‘'le léger'', notre parc comporte 47 918 véhicules contre 42 176 voitures qui ont entre 6 et 10 années.» «Le nombre total des véhicules légers immatriculés ici à Sétif est de 187 094 véhicules», souligne Brahim Bekhiti, inspecteur principal des permis de conduire au niveau de la direction des transports de la wilaya de Sétif. Sans porter de jugements sur les conducteurs sétifiens, la prudence et la vigilance sont les seuls remèdes contre le terrorisme routier dans la ville d'Aïn El-Fouara. De notre envoyée spéciale à Sétif, Hidayette Bersali