«Le budget de fonctionnement qui aura à faire face l'année prochaine à une dépense encore lourde liée au nouveau régime indemnitaire des fonctionnaires ne devra connaître aucune autre augmentation» a souligné Abdelaziz Bouteflika lors de la réunion du Conseil des ministres qui a adopté l'ordonnance portant loi de finances complémentaire 2010. Cette «directive» du président de la République est largement justifiée par le niveau record atteint par le déficit du Trésor public en 2010. Dans la LFC 2010, il est attendu un déficit budgétaire de l'ordre de 3 615 milliards de dinars contre une prévision de 2 709 milliards de dinars dans la loi de finances 2010. La responsabilité de l'aggravation du déficit incombe au 608 milliards de dinars qui seront mobilisés par la LFC 2010 pour couvrir le versement du nouveau régime indemnitaire des fonctionnaires avec effet rétroactif à partir du 1er janvier 2008 au titre de l'année 2011. Ce montant financera entre autres les besoins additionnels en fonctionnement et postes budgétaires induits par l'ouverture de nouveaux établissements de l'Education nationale. Déjà et dans la loi de finances de 2010 et sur les 1 600 milliards dedinars consacrés au fonctionnement des services de l'Etat, 925 milliards sont des dépenses salariales, y compris le recrutement de 60 000 nouveaux agents tandis que 250 milliards de dinars représentent les incidences de la révision à la hausse du salaire minimum garanti (SNMG). D'où cette augmentation sans pareille des dépenses de fonctionnement de 30% passant ainsi de 2 786 milliards de dinars pour l'exercice 2009 à 3 446 milliards de dinars dans la LFC 2010. Ce qui a fait réagir le président de la République qui soulignera que «le budget de fonctionnement a désormais atteint des seuils insoutenables, et cette situation doit être transitoire». Il ressort de cette LFC 2010 que les recettes de la fiscalité pétrolière ne peuvent, dorénavant, à elles seules couvrir les lourdes dépenses de l'Etat pour assurer son fonctionnement ainsi que les dépenses liées au développement socioéconomique du pays. Il est ainsi attendu une baisse des recettes de la fiscalité pétrolière à hauteur de 344 milliards de dinars, passant à 1 492 milliards de dinars (baril de pétrole à 37 dollars) contre des prévisions de départ pour 2010 de l'ordre de 1 635,8 milliards de dinars. Une baisse qui sera en partie compensée par une hausse de la fiscalité ordinaire de l'ordre de 176 milliards de dinars passant ainsi à 1421,7 milliards de dinars. Selon les observateurs des marchés pétroliers il est attendu une amélioration du prix du baril de pétrole pour l'année 2010. Et un baril à 74 dollars (le double du prix du baril de référence de 37 dollars dans l'élaboration de la LFC) permettrait de réduire le déficit budgétaire prévisionnel de 3 616 à 2123 milliards de dinars. Ce dernier montant resterait tout de même lourd à supporter par les finances publiques. D'où le recours au Fonds de régulation des dépenses publiques (FFR). En 2009 et pour couvrir le déficit budgétaire, une ponction de 354,3 milliards de dinars sur le fond de régulation des recettes a été opérée. Et en 2010 une ponction plus importante sur le fond est attendue. A titre de rappel et à fin 2008, l'encours de ce fond avait atteint les 4280 milliards de dinars. Cette année-là le fonds a été alimenté par un important excédent de la fiscalité pétrolière résultat d'un baril de pétrole avoisinant les cent dollars. Pour l'année 2010, ce lourd déficit budgétaire intervient dans une conjoncture défavorable. Le processus de désendettement public amorcé en 2008 a été freiné en 2009. L'année passée, la dette publique interne a augmenté de 71,3 milliards de dinars. Et cette situation aurait tendance à s'aggraver en raison du déséquilibre budgétaire de 2010. A travers ces données chiffrées, nous ne pouvons que constater la fragilité des équilibres financiers internes du pays. D'autant plus qu'il faudrait s'attendre à partir de 2011 à une hausse importante des dépenses d'équipement dans le cadre de l'exécution du plan de développement 2010-2014. Pour pouvoir consommer les 286 milliards de dollars consacrés à ce nouveau plan, il faudrait une moyenne budgétaire annuelle de 55 milliards de dollars à inscrire dans le budget d'équipement. Soit l'équivalent annuel de 3 900 milliards de dinars. Ce qui est énorme si on prend en considération le niveau très élevé du budget de fonctionnement et le lourd déficit du trésor prévu pour l'année 2010. D'où cet appel de Abdelaziz Bouteflika qui soulignera lors de la réunion du conseil des ministres «qu'en veillant à améliorer le statut social de ses agents, l'Etat attend d'eux qu'ils se mobilisent pour rationaliser la dépense publique et améliorer l'efficacité du service public» L'appel sera –t-il entendu ?