Près de 100.000 manifestants dans les rues de la capitale de l'Europe. Belges, Arabes, Juifs, Maghrébins, Latino- américains... ont crié, d'une seule voix, leur horreur du génocide israélien à Ghaza. Au même moment, l'armée d'Israël continuait son horrible tâche: un maximum de morts palestiniens. Le temps glacial d'hier à Bruxelles n'a pas empêché des dizaines de milliers de manifestants de dénoncer la folie meurtrière d'Israël à Ghaza. Combien étaient-ils? 60, 70, 100.000 marcheurs? De l'avis général, Bruxelles n'a pas vu une manifestation d'une telle ampleur depuis la célèbre marche blanche de novembre 1996 organisée suite aux événements de l'affaire «Dutroux», du nom du monstre qui avait enlevé, séquestré et assassiné des enfants. Alors que le cortège arrivait à la gare du Nord, d'autres carrés de manifestants démarraient à peine de la gare du Midi, point de rencontre et de départ situé à quelque quatre kilomètres en amont. A 16 heures, des milliers de marcheurs prenaient encore le départ du point de rencontre, alors que la marche devait, en principe prendre fin à cette heure-là. C'est dire l'ampleur de l'événement où aucun incident n'a été constaté. En ordre, bien encadrés par les organisateurs, Belges, Turcs, Espagnols, Italiens, Algériens, Marocains, Tunisiens, Juifs... Bruxelles multiple, (où vivent plus de 130 nationalités différentes) a crié sa colère et son indignation face au massacre en «live» du peuple de Ghaza. Drapeaux, banderoles, pancartes... ont dénoncé le caractère «nazi» de l'Etat hébreu, la complicité des gouvernants européens et le silence honteux de ceux des Etats arabes. Une grande preuve de lucidité et de conscience dans les rues de Bruxelles qui révèle tout le fossé et la différence entre les peuples d'Europe et leurs gouvernants. Hier à Bruxelles, ce sont les responsables des organisations civiles et syndicats qui ont pris la parole sur le podium dressé pour la circonstance pour dire toute leur indignation et leur solidarité aux victimes palestiniennes. Les politiques, particulièrement ceux de gauche se sont joints, dès les premières heures, à la marche. Chez la droite, il y a cafouillage. Parmi leurs leaders, tel Louis Michel, commissaire européen chargé de la coopération humanitaire, il n'y a pas photo: Israël commet un massacre et fait fi des règles élémentaires du droit des humains. D'autres, dans le même parti (MR) de droite tel l'exemple de Denis Ducarme, Israël ne fait que se défendre face aux Palestiniens. Le carnage à Ghaza a mis à jour les convictions de beaucoup de politiques, entre pro-sionistes et partisans de la paix et de la justice. Pendant que les citoyens du monde appelaient à l'arrêt du massacre, les avions bombardiers, frégates de guerre en mer et fantassins de l'armée israélienne au sol continuaient leur horrible tâche: tuer un maximum d'enfants, de femmes et, quand ils peuvent, de combattants ghazaouis. Hier en milieu de journée, l'armée d'Israël était toujours à la sale besogne. C'est qu'il faut faire vite. Faire de Ghaza un capharnaüm avant le 20 janvier. Avant que Barack Obama ne prenne en mains la direction des affaires à la Maison-Blanche américaine. «Dès le 20 janvier, je m'investis dans la question du Moyen-Orient. Une équipe est déjà constituée et qui s'adressera à toutes les parties en conflit», a-t-il déclaré, hier, en fin de matinée. Ainsi les observateurs qui ont fait le lien entre l'attaque «éclair» d'Israël sur Ghaza et l'échéance de la présidence de George W. Bush, ne se sont pas trompés. Bien sûr, le nouveau président américain n'aura pas la tâche facile. Le Congrès américain, dominé dans la Chambre basse par les démocrates, a voté samedi son soutien à Israël. Mais il faut faire dans la nuance et constater qu'il s'agit de la position de principe et continuer à croire que la nouvelle administration américaine donnera la chance, une sérieuse chance, à la reprise du processus de paix pour un Etat palestinien libre et indépendant. Cette perspective de paix sous le règne d'Obama dépendra, il ne faut pas se le cacher, de l'attitude d'abord des Etats arabes, en particulier l'Egypte et l'Arabie Saoudite, ainsi que du retour de la Russie et de l'UE dans l'équation du Moyen-Orient. Pour l'heure, la mobilisation de la rue en Europe et ailleurs ne cessera pas tant que l'armada israélienne continuera son oeuvre funeste. Hier, le nombre des morts a approché le millier, et celui des blessés les 4.000. Et, selon des organisations de secours (Croix et Croissants rouges) ces nombres ne tiennent pas compte des cadavres qui se trouvent encore sous les décombres des immeubles et maisons bombardés. Sous le déluge de feu israélien, les vivants de Ghaza n'ont pas le temps de s'occuper des morts sous les décombres. Ils parent au plus urgent: protéger les survivants.