Opération de salubrité au niveau de la région sétifienne. Les forces de l'ordre, depuis quelques jours, se sont mises en devoir de libérer les artères et les carrefours, des mendiants qui s'y agglutinent.Ils sont si nombreux ces hommes, ces femmes et ces enfants qui quêtent la charité à ces différents endroits de la capitale des Hauts Plateaux. La misère humaine, sous ses diverses facettes, les unes aussi sombres que les autres, est ainsi étalée sous les yeux des passants expressément invités à faire le geste qui s'impose. Cependant, aussi devenu le fonds de commerce de personnes qui se donnent pour profession de tendre la main à leurs semblables. On ne saurait ni encourager ni entretenir un tel spectacle. C'est inacceptable à tous égards. C'est intolérable sous tous les rapports. On ne peut pas blâmer, de ce point de vue et a priori, les autorités compétentes qui ont décidé de faire place nette en retournant à la sérénité qui leur sied nos voies et artères, nos carrefours et nos feux tricolores. Mais dégager certains endroits de la ville de leurs mendiants ne signifie pas, ipso facto, que ceux-ci ont disparu et avec eux, la mendicité et ses méfaits. Si c'était juste pour soulager nos regards, un temps, de la misère de la rue, il eut mieux valu ne rien faire, ne rien entreprendre. Nous n'aurions, sous ce rapport, que plus de mérite à laisser tout en l'état, à laisser courir les choses. Car, il est des maladies dont il vaudrait mieux ne pas guérir à moitié. La médication idoine est celle qui étouffe radicalement le mal dans l'œuf. Faire la chasse aux mendiants, les effacer de notre vue, pour que la cité paraisse dans ses plus beaux atours, n'est qu'une solution de fortune. On n'aura fait qu'éloigner le mendiant sans égratigner, le moins du monde, la mendicité. C'est en cela qu'on ne peut trouver que courte et de courte vue, une opération destinée à soulager la capitale des Hauts Plateaux de ses mendiants, sans que cela ne s'insère dans une démarche d'ensemble, sans que ne soit annoncée, à la cité, une politique globale d'éradication de la mendicité, aussi bien Sétif et ses régions que dans toute l'Algérie. Il faut s'attaquer aux causes du mal que de se distraire à en caresser les conséquences. A l'image de ce patient qui s'applique à faire baisser sa fièvre à coups de cachet d'aspirine, en oubliant qu'il est atteint d'une grave maladie. Car, c'est en commençant par chercher et à trouver de bonnes réponses à la question de la mendicité que nous serons capables de trouver de bonnes solutions aux problèmes que nous posent nos mendiants. Dans la majorité des cas, nous avons affaire à des être humains en situation difficile, et qui n'ont pas moins de droits que les autres. Gardons-nous de faire de leur handicap un motif d'exclusion et de marginalisation, comme si nous avions affaire à des citoyens de seconde zone, des laissés-pour-compte, des rebuts du genre humain. Renouvelons donc notre regard sur le mendiant pour mieux saisir la mendicité comme un mal absolu, un mal dont personne ne doit s'accommoder. Le mendiant, accueilli dans les règles de l'art, est un homme ou une femme en voie de réhabilitation. Il a besoin d'être invité à fréquenter l'école, l'école où l'on apprend qu'il n'est de sauveur suprême que soi-même, ceci en tout, partout et toujours. En effet, ce n'est pas notre réalité extérieure, ce ne sont pas nos circonstances extérieures qui nous déterminent et qui nous tracent les chemins de notre devenir. Mais davantage notre réalité intérieure, c'est-à-dire les idées, les pensées que nous entretenons dans notre esprit, notre capacité imaginative à transformer nos rêves et nos désirs en réalité. Voilà la base sur laquelle le mendiant est appelé à retrouver sa place et son rôle dans sa société. Celui qui, hier, n'avait rien dans les mains peut, aujourd'hui, se prendre en main, donner la main à sa société. Pour le meilleur.