La typhoïde a touché plus de 80 personnes au quartier de Herraten, dans la commune de Jijel. Une épidémie qui a défrayé la chronique locale depuis le début de semaine. En compagnie d'un membre de l'Association El-Nour du quartier Herraten, situé à quelques kilomètres au sud-est du chef-lieu de la ville de Jijel et comptant pas moins de 300 gourbis, nous avons arpenté les ruelles de cette cité. Sur les lieux, nous avons aperçu des agents communaux en train de charger difficilement des ordures jonchant le sol, devant de gourbi, sur un engin appartenant à la commune de Jijel, sous le regard de quelques habitants. Des écoliers modestement habillés empruntent un chemin boueux pour rejoindre l'école primaire qui a enregistré 15 cas de typhoïde. Rencontrés en plein centre de ce bidonville, Salah, la cinquantaine entamée, habitant un gourbi, sur un ton triste nous affirme que deux membres de sa famille ont été touchés par cette épidémie. Ils s'agit de sa fille de 10 ans qui est toujours hospitalisée à Jijel et son fils de trois ans qui, lui, a quitté l'EHU Med seddik Ben Yahia hier, après avoir reçu les soins nécessaires. Notre interlocuteur a souligné qu'il habite une baraque de fortune depuis 1995 et en dépit de ses nombreuses démarches, sa triste situation n'a pas changé d'un iota. Un vieil homme nous rejoint pour exprimer lui aussi son désarroi. L'un de nos compagnons nous a affirmé que ce vieux est atteint de typhoïde, mais il n'a pas voulu se déplacer à l'hôpital pour se faire soigner. Sur les motifs de son refus, ce vieux, souffrant d'un vertige et de maux de tête, répond spontanément «qu'est-ce qu'ils vont me faire à l'hôpital de Jijel, ils vont me faire une perfusion. Rencontré à l'intérieur dans un café, le président de l'Association El-Nour du quartier Herraten, Ahmed Farah, nous est revenu sur l'apparition de la typhoïde, samedi dernier, en soulignant que cela était prévisible depuis plus de cinq ans. Notre interlocuteur, entouré des membres de ladite association et de jeunes du quartier, nous indique qu'il a entrepris de nombreuses démarches auprès des services de la commune de Jijel, pour soulever le problème de l'assainissement et la prolifération des décharges anarchiques et ce, depuis 2004, mais en vain. Les avis des citoyens avec lesquels nous nous sommes entretenus divergent sur l'origine de la typhoïde. Si, pour certains, c'est l'eau potable, d'autres l'attribuent au branchement illicite, alors que d'autres encore l'imputent à une cross-connexion au niveau de l'oued. Profitant de l'occasion de notre passage dans leur quartier, des jeunes nous ont exprimé leur désarroi quant aux conditions insupportables dans lesquelles ils vivent, dans l'indifférence des responsables de l'APC. Selon nos interlocuteurs, plusieurs personnes touchées par la typhoïde sont toujours chez elles, n'ayant pas jugé utile de se déplacer à l'hôpital de Jijel. On apprend aussi qu'au niveau du CEM de la réconciliation nationale situé dans ce quartier, qui ne dispose même pas d'une structure sanitaire en dépit de son importante population, il a été enregistré 80 absences d'élèves. Nos sources n'écartent pas que cette absence collective soit liée à cette épidémie. Toujours selon les habitants, le nombre des cas de typhoïde a connu une hausse, passant de 80 à 86 personnes dont onze ont déjà quitté l'hôpital de Jijel. On apprend également que la commission ministérielle, composée du directeur de la prévention et d'épidémiologues, s'est rendue à l'hôpital de Jijel et au quartier de Herraten pour suivre la situation.