Plus de soixante partis ont vu le jour dans le pays suite à l'instauration du multipartisme à la fin de la décennie 80. Il n'en reste de visible qu'une dizaine et c'est tant mieux. Sauf que même ces «rescapés» sont pour la plupart eux aussi moribonds. Les uns carrément en stade de putréfaction avancée entraînée par des dissension internes dissolvantes, d'autres en coma dépassé, donc totalement hors circuit et sans impact sur le terrain de la lutte politique. Le diagnostic ne concerne pas les seules formations de «l'opposition». L'état des lieux de celles qui appartiennent au camp du pouvoir n'est guère plus reluisant. Et ce n'est pas ce qui se passe au FLN ou au MSP qui infirmera ce diagnostic. Les citoyens n'ont pas regretté et encore moins versé des larmes à la disparition des dizaines de partis. Ils ne se souviennent même plus de leurs sigles et qui en furent les fondateurs et responsables. Que ceux qui subsistent encore disparaissent à leur tour ne sera pas pour provoquer de la désolation. Il a été abondamment écrit et commenté que l'instauration du multipartisme dans le pays s'est faite sur des bases biaisées qui ne pouvaient que conduire à la déliquescence du champ politique national. Ce qui a été juste et prémonitoire. L'idée alors qu'il fallait qu'une décantation s'opère en ce lieu s'est imposée dans l'opinion publique, qui l'a faite sienne en refusant d'accorder du crédit au semblant d'activisme partisan artificiellement suscité par les gesticulations de la plupart des acteurs de la scène partisane. Ce n'est pas pour autant qu'il faille décréter que les Algériens ne sont pas «accros» du multipartisme. Ils s'en sont détournés non pour le rejeter mais pour marquer leur refus de la médiocrité dont fait preuve le personnel politique qui en a résulté et sa façon de se comporter. Il existe bien une aspiration dans la société, forte et large, à s'émanciper du carcan de la pensée unique et uniciste. Des formations ont fait illusion à un moment, ce qui leur a permis de drainer à elles des sympathies et des engagements. La tragédie, car c'en est une quand cette aspiration populaire est trahie, c'est que ces formations qui ont entonné le credo de l'exercice démocratique de la militance ont presque toutes sombré dans les travers qu'elles dénonçaient chez le FLN, qui s'avère au final leur père putatif à toutes et l'exemple qu'elle ont imité jusqu'à la caricature. Oui, il y a nécessité de refonder le multipartisme dans le pays. C'est l'urgente nécessité qui s'impose à cette frange saine de la classe politique qui, tout en ayant pris ses distances avec ce champ partisan douteux, produit des calculs et des manipulations du pouvoir officiel, reste consciente et convaincue qu'il ne peut y avoir d'avancées démocratiques et de liberté sans l'existence de vrais partis politiques en osmose avec l'opinion publique. Que les quelques formations qui subsistent encore vaille que vaille tombent à leur tour dans la nécrose et s'en sera alors fait du principe même du pluralisme politique. Une perspective à laquelle le pouvoir actuel pousse sournoisement et souterrainement.