Les exportations ne tournent pas rond, les importations de véhicules aussi. Les chiffres du CNIS (Centre national de l'informatique et des statistiques) sur la chute des exportations au cours du premier semestre et la baisse des importations des véhicules tombent à pic pour le gouvernement. Les exportations n'ont été que de 20,7 milliards de dollars au premier semestre soit une baisse drastique de 46,47%. C'est une mauvaise nouvelle pour le gouvernement qui a multiplié les mesures destinées à brider les importations. Si les chiffres du Cnis sur des exportations subissant le contrecoup de la baisse des prix du pétrole sont mauvais, ils comportent aussi une petite bonne nouvelle: les importations de véhicules ont baissé. Le gouvernement arguera que la mesure - très impopulaire - d'introduction d'une taxe à la vente de véhicules neufs en août 2008 a fait son effet. 153.292 véhicules ont été importés au cours du premier semestre 2009, contre 171.277 unités durant la même période de 2008, soit une baisse de 10,5%. Sur ce chiffre global, la trentaine de concessionnaires sur la place ont importé 143.977 véhicules, contre 160.754 à la même période de 2008, en baisse de 10,44% pour un montant de 129,66 milliards de dinars. Les particuliers, quant à eux, ont importé 9.315 véhicules au cours des six premiers mois de 2009, contre 10.523 unités durant la même période 2008, en baisse de 11,48% pour un montant de 12,56 milliards de DA. La baisse des importations de véhicules n'est pas réductible à la seule taxe même si les autorités y verront principalement un effet de la taxe. Cela pourrait justifier la nouvelle taxe annoncée dans la loi de finances complémentaire 2009. Avec cette baisse, le gouvernement estimera qu'il a eu raison contre les sceptiques qui doutaient de l'effet de la taxe sur les importations. Il faudra pourtant bien nuancer le petit effet. Si les Algériens ont acheté moins de voitures au cours de ce semestre, il faut surtout y voir un effet de la décision des banques étrangères, principales pourvoyeuses de crédits auto, d'élever sensiblement le seuil des salaires exigibles. Les banques étrangères éliminent les bas revenus Ce seuil a dépassé les 30% entraînant une augmentation importante des demandes de crédits rejetées. Cette politique restrictive des banques étrangères est directement liée à la crise financière mondiale. Elle est due également aux difficultés, relativement récentes, d'accéder au marché interbancaire algérien. Les banques publiques, vraisemblablement sur instruction gouvernementale, ont eu tendance à ne plus placer leurs excédents sur le marché interbancaire dans lequel les banques étrangères puisaient. La source de refinancement, facile, s'étant tarie, les banques étrangères ont choisi d'être moins larges. Le resserrement du crédit s'est donc ajouté à la taxe automobile pour entraîner cette baisse relative des achats et donc des importations. Un bémol doit néanmoins être apporté à ce résultat positif: le nombre de véhicules importés a baissé mais leur valeur globale a augmenté passant de 128,069 milliards de dinars au 1er semestre 2008 à 142,234 milliards de dinars en 2009. On peut y trouver la preuve que ce sont bien les bas revenus qui ont été éliminés de l'accès au crédit. Les catégories sociales qui en ont les moyens ont continué à dépenser, sans compter, pour l'achat de véhicules neufs. Il faut rappeler que la première baisse sensible d'importations de véhicules en Algérie a été enregistrée en 2006 avec l'entrée en vigueur, en septembre 2005, de l'interdiction d'importations des véhicules d'occasion... sous la pression des concessionnaires qui avaient à l'époque plus d'écoute au gouvernement. La filière du véhicule d'occasion, largement le fait de particuliers, représentait une moyenne de 70.000 véhicules par an. Les transports en commun meilleur antidote que les taxes En 2006, l'année des concessio-nnaires par excellence, les importations ont atteint 188.006 unités, contre 251.576 unités en 2005. La baisse a été de l'ordre de 25%. Ce sera une baisse orpheline. En 2007, le nombre de véhicules importés a grimpé à 217.742, soit une hausse de 15,82% par rapport à 2006. En termes de valeur, cela représentait 2,7 milliards de dollars contre 2,2 milliards en 2006. Le «boom» a été largement favorisé par les crédits auto et l'arrivée de la voiture asiatique pas chère. Le boom devenait affolant - Alger par exemple est congestionnée et polluée - et se confirmait en 2008. En décidant d'imposer la taxe en août 2008, le gouvernement avait devant lui des chiffres alarmants: 223.131 véhicules importés de janvier à septembre 2008 pour une valeur de 2,628 milliards de dollars. La barre des 250.000 qui inquiétait a été en définitive largement dépassée. En 2008, les importations ont augmenté de 49,42% pour une facture de 4 milliards de dollars (plus de 286 milliards de dinars). Le gouvernement peut dire aujourd'hui que la baisse de 10,5% au cours du premier semestre est l'amorce d'une tendance qu'il faut conforter. Certains pourraient faire valoir que 153.292 véhicules importés sur un semestre, c'est beaucoup. Le gouvernement les prendrait au mot: il faut renforcer la tendance en taxant davantage... Quitte à élargir le spectre de catégories sociales éliminées de l'accès au véhicule individuel. On peut choisir de «positiver» en se disant que ce sont des voitures en moins qui ne pollueront pas. A condition toutefois que l'offre en matière de transports en commun, dans les grandes villes et ailleurs, devienne conséquente. C'est en définitive, davantage que les taxes et la multiplication de goulots bureaucratiques, le véritable antidote à l'achat de véhicules.