Réunis en conférence-débat, jeudi dernier à la salle Rezik Kacem du CHU, plusieurs représentants activant dans les organismes de lutte contre la toxicomanie, au niveau de la wilaya, ont tiré la sonnette d'alarme en ce qui concerne le phénomène rampant de ce fléau qui, de l'avis de tous, se développe sans arrêt au sein de la population juvénile, dans et en dehors des établissements de l'éducation (écoles et lycées). Le conférencier, M. Chelbi Mohamed, professeur à l'université de Constantine, spécialiste en toxicomanie, qui a abordé la prise en charge du toxicomane sur les plans psychologique, psychopédagogique et social, a posé la question sur la possibilité d'endiguer le phénomène par la conjugaison des efforts de tous. M. Chelbi reconnaîtra que «le phénomène est glissant et il est difficile de le saisir dans sa mouvance. Concrètement, il a été prouvé que les meilleurs résultats sont obtenus lorsque le travail est fait avec les différents spécialistes qui pourront indiquer comment agir en essayant de mobiliser toutes les énergies sur des axes précis. Démission de la famille, causes sociales, les méthodes traditionnelles qui deviennent banales, tout a été passé en revue». Il dira, néanmoins, que sur le terrain, les psychologues sont en train de faire leur travail avec les moyens de bord, et aboutissent à quelques résultats intéressants. En préconisant un plan national avec des objectifs bien définis, Mme Demène-Debbih, médecin-chef à l'hôpital psychiatrique de Djebel Ouahch , relèvera «qu'il n'y a pas souvent une réelle coordination entre les différents intervenants. Le danger a un rapport avec l'âge parce que la drogue influe sur le développement neurologique de l'enfant. C'est pour cela qu'il serait très important que la famille agisse le plus tôt possible pour retarder la première prise en donnant à l'adolescent la chance d'évoluer sans drogue. Malheureusement, a-t-elle déploré, la participation de la famille dans la prévention est quasiment nulle. Et c'est ainsi qu'à cause des troubles du comportement qu'il développe, le toxicomane est en train de prendre la place du malade mental à l'hôpital psychiatrique». Une participante opérant au niveau d'une unité de dépistage scolaire est intervenue pour affirmer que le personnel des UDS accomplit également un travail qu'elle a qualifié de plus efficace que celui d'un psychologue spécialisé parce qu'il est sur le terrain durant toute l'année. Intervenant à son tour, M. Kaâbouche, chef de l'unité de psychologie du CHU, a déclaré «qu'il faut stopper cette hémorragie qui commence à gangréner notre jeunesse». Parlant de la situation dans la seule ville de Constantine, il la qualifiera «de très alarmante» testant l'ampleur du phénomène au sein d'un établissement scolaire de la «ville des Ponts», choisi comme prototype, il a découvert que 10 élèves sur 50 ont goûté à la drogue, soit 20% de l'ensemble. «Ces journées de sensibilisation et d'information sont d'une extrême importance et il ne sont jamais de trop car, nous estimons qu'il faut, à chaque fois, tirer la sonnette d'alarme. Malheureusement, pour le moment il n'y a aucune structure spécialisée pour une prise en charge réelle des toxicomanes dans notre wilaya et tout le monde attend avec impatience les centres intermédiaires de désintoxication prévus par les autorités sanitaires, à raison d'un centre dans chacune des villes du Khroub, de Zouaghi et de Sidi Mabrouk, en plus d'une institution au niveau du CHU».