Les familles oranaises veulent à tout prix préserver certaines traditions ancestrales d'accueil du mois sacré de Ramadhan, et ce, selon les possibilités de chacune d'elles mais avec une seule constante: un nouveau look. Si pour certaines, une couche de peinture est devenue monnaie courante, notamment des espaces les plus utilisés, d'autres se limitent à faire un grand lavage et à grande eau de la cuisine et de la salle de séjour avec ne serait-ce que des changements dans la disposition du mobilier, histoire de souhaiter la bienvenue au mois sacré. Pour d'autres, accueillir le mois de Ramadhan ne peut se faire convenablement sans repeindre complètement la maison familiale. Certains vont encore plus loin en renouvelant le revêtement de la cuisine et de la salle de bains, refaisant la faïence et autres accessoires. Mais cela coûte cher, et seuls ceux qui sont à l'aise financièrement peuvent le faire, mais il faut qu'ils s'y prennent à l'avance, car les maçons et autres artisans sont trop pris durant cette période de chaâbane. Par ailleurs, certains de nos concitoyens vont jusqu'à acheter une nouvelle vaisselle afin de casser la routine des 11 mois précédents. Mais ce n'est pas uniquement pour cela, car il y a beaucoup de superstition - ou d'espérance (?)- dans cette histoire. Pour eux, renouvellement de la vaisselle ou, au pire, n'acheter ne serait-ce qu'une nouvelle assiette apporte chance et prospérité à la famille, le «fel», comme disent les anciens. Mais une habitude, tenace, demeure : rouler le couscous et le faire sécher avant le jour J. Cependant, cette pratique a tendance à disparaître, d'une part, en raison de la disponibilité du produit dans le marché et, de l'autre, par l'éclatement de la famille élargie au ménage restreint. Pour ces milliers de cas, ni le temps ni encore moins les capacités financières ne permettent de rouler le couscous « at home », notamment pour les mères de famille qui travaillent. Pour certaines qui préfèrent de loin le couscous fait à la main que celui sorti des semouleries, elles recourent à des prestataires de service qui en ont fait leur gagne-pain. Elles sont connues surtout au niveau des quartiers populaires et elles ont acquis une certaine réputation qu'elles sont une clientèle fidèle. Ce service est généralement rémunéré selon un principe connu : la main-d'œuvre équivaut au prix de la semoule. De nos jours, le prix du kilo de semoule est à 35 DA et par conséquent le kilo de couscous roulé pour la seffa du s'hour revient entre 65 et 70 DA, un prix pas loin de celui commercialisé sur le marché, à savoir 60 DA. Certaines mères de famille, téméraires, intransigeantes sur la tradition, vont jusqu'à préparer leur propre vermicelle fait à la main, à base de farine, « meqatfa ». Toutefois, on peut compter sur les doigts de la main celles qui le font toujours. A M'dina Jdida, les commerçants de vaisselle font le plein durant ce mois de chaâbane et les clientes s'y rendent ne serait-ce que pour acheter une marmite ou de nouveaux bols pour la h'rira ou la chorba pour certains. Et avec les prix pratiqués ces derniers temps, s'aventurer à des dépenses supplémentaires est un risque majeur à prendre en toute connaissance de cause et avec les moyens qu'il faut.