Meskina ma Zogha, ma voisine est malheureuse. Ses cheveux commencent à prendre la poudre d'escampette. «ya pas mieux que le henné» n'arrête-t-elle pas de répéter, aujourd'hui mine tafrett, à qui veut bien lui prêter l'oreille. C'est que sa chevelure en a vu de toutes les couleurs. Toutes les marques de teintures y sont passées. Les vraies, les taïwan, tailles-toi. Bettaille-taille, chaque semaine, un autre ravalement de façade. C'était en rapport avec les petites annonces qu'elle faisait paraître sur les «hebdomadaires» agences matrimoniales. «Jeune fille blonde possède logement, cherche homme sérieux pour fonder famille». Là voilà donc blonda ! La semaine d'après, c'était «jeune femme, responsable rousse cherche et plus si affinité». Et vas-y, un autre ravalement de façade ». Rencontre sur rendez-vous. Haut les mains ! Rien. Blonda, niet, roussia, oualou ! Ni braya ni tilifoun. Brunette puis «Femme mûre, brune, possède murs et fonds cherche » Elle cherche la meilleure teinte noire corbeau «Si votre ramage se rapporte à votre plumage » elle sent qu'on l'approche juste pour le toit. «Toi tchu es un flatteur qui veut vivre au dépens de celui qui l'écoute». C'est qu'elle n'était pas dupe Tu me vantes, alors du vent ! La fable de La Fontaine, elle la connaît par cœur. Elle s'en souvient comme de la fontaine publique qui n'existe plus dans le quartier populaire où elle a habité, grandi et hérité de l'appartement. Parler de l'âge d'une femme étant discourtois, vous avez donc une idée des journées de la femme qu'elle a vécues en attendant le prince charmant. Ces derniers temps, elle a abandonné son entrepreneur, son salon de coiffure et «distitique», pour une autre esthétique. Elle veut aller «ramener une omra». L'imam par i-mail lui confirme que pour ce faire, il lui faut un homme, un accompagnateur. Grand Dieu, elle n'est pas sortie de l'auberge. Elle se met donc à sillonner tous les proches et connaissances. Jusqu'à ce qu'elle trouve un jeune cousin fraîchement sorti de la zitouna qu'on donne en kémia. Il est prêt à faire le voyage, à condition qu'elle prenne en charge les frais de la Omra pour deux. Elle lui passe son passeport, l'argent et quelques semaines après on apprend que le jeune est en Espagne dans un centre de rétention pour «harraga». Elle s'est arrachée les derniers tifs. Ya latif la zhar la mimoun la qassam zine