La situation chaotique en Syrie marquée ce week-end par la mort d'une centaine de personnes entre soldats et civils pourrait, très vite, dégénérer et provoquer une intervention internationale si le régime d'Al Assad s'obstine à fermer le jeu politique dans le pays. C'est un peu la conclusion que font les observateurs après l'avertissement de la Ligue arabe, lancé hier dimanche, au président syrien Bachar Al-Assad, qu'une intervention internationale serait inévitable si sa médiation visant à arrêter la violence échouait. Selon le quotidien koweïtien «Al-Qabas», citant des sources informées arabes, «la délégation arabe a été franche et claire, au cours de sa réunion avec la direction syrienne. Elle l'a avertie que si une solution arabe échouait, cela aboutirait à une internationalisation de la crise». Cela voulait dire que la Syrie devrait s'attendre à une intervention étrangère et à un embargo économique», ont ajouté ces sources citées par le journal. Une réunion était prévue hier dimanche à Doha, entre une délégation ministérielle de la Ligue arabe et des responsables syriens, venus apporter la réponse de Damas à des demandes formulées par cette délégation, lors d'une réunion mercredi, avec M. Assad. Une rencontre que les ministres arabes avaient qualifiée de «franche et amicale». Mais, pour une fois, la Ligue arabe reste ferme et avertit contre les dangers d'une position inflexible du dirigeant syrien. En outre, «le comité ministériel arabe a exprimé son rejet des meurtres de civils qui se poursuivent en Syrie et l'espoir que le gouvernement syrien prenne les mesures nécessaires pour les protéger», a affirmé la Ligue arabe, dans un message adressé au président Bachar Al-Assad. Il est clair que les dirigeants de la Ligue arabe travaillent sur un plan de médiation qui ferait éviter une intervention militaire étrangère en Syrie. Pour autant, le président syrien a mis en garde que toute action occidentale contre son pays provoquerait un «tremblement de terre» qui enflammerait la région, dans un entretien publié dimanche par le journal britannique «The Sunday Telegraph». «La Syrie est désormais le centre de la région. C'est la ligne jaune et si vous jouez avec, vous provoquerez un tremblement de terre : voulez-vous voir un nouvel Afghanistan, ou des dizaines d'Afghanistan ?», menace le président syrien. «Tout problème en Syrie enflammera la région entière. Si le plan est de diviser la Syrie, cela revient à diviser la région entière», ajoute-t-il. Il reconnaît cependant que les forces de sécurité syriennes ont commis «beaucoup d'erreurs» au début des manifestations, demandant une plus grande ouverture politique, mais selon lui, elles (forces de sécurité) visent désormais uniquement des «terroristes». ZONE D'EXCLUSION AERIENNE POUR LES SYRIENS Vendredi dernier, le pays avait connu les pires violences depuis le début des manifestations anti-régime avec 36 civils tués par les forces de sécurité, lors d'intervention de dispersion de manifestations, essentiellement à Homs et à Hama (centre), selon des organisations syriennes de défense des droits de l'Homme. Les Syriens demandent aujourd'hui à manifester pour réclamer une zone d'exclusion aérienne, au-dessus de la Syrie, à l'image de la Libye, afin de donner plus de latitude à l'«armée syrienne libre», une force d'opposition armée formée essentiellement de déserteurs. Les affrontements entre soldats, membres des forces de sécurité et déserteurs, qui ont rejoint avec 'armes et bagages'' l'opposition, ont redoublé d'intensité dans certaines villes du pays, faisant 47 morts en 24 heures, dans les rangs des forces du régime, dont 20 soldats dans la journée de samedi, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). La situation se dégrade de plus en plus, alors que le régime de Bachar Al Assad serait aux abois, avec une première 'remontrance'' de la Chine, l'alliée traditionnelle avec Moscou. L'émissaire de la Chine au Moyen-Orient, Wu Sike, a ainsi estimé hier dimanche au Caire, qu'il avait mis en garde la Syrie, lors d'une récente visite à Damas contre le danger de la poursuite de la répression. M. Wu a dit avoir souligné auprès «de hauts responsables en Syrie, le danger de la situation», disant qu' «elle ne peut continuer» et que le régime de Bachar Al-Assad doit «respecter et répondre aux aspirations et aux revendications légitimes du peuple syrien». L'émissaire chinois, qui était à Damas jeudi, a indiqué que son pays soutenait l'idée proposée par la Ligue arabe d'un dialogue entre le régime et ses opposants, dont il a rencontré certains. Selon lui, 'la Syrie doit montrer une certaine flexibilité à ce sujet pour aider la Ligue arabe à appliquer sa proposition». Pour autant, Bachar Al Assad compte toujours sur le soutien de la Russie. «Avant tout, nous comptons sur le soutien de la Russie, un pays auquel nous sommes liés par des liens solides (...). Le rôle de la Russie est extrêmement important», a-t-il déclaré, alors que la communauté internationale pourrait exercer une pression sur Moscou pour qu'il lâche Assad.