Invité hier à l'émission «Enjeux» de Radio Algérie Internationale, l'ancien PDG de Sonatrach et ex-ministre des Ressources en eau, Abdelmadjid Attar, a approuvé sans réserve l'idée de changer la loi sur les hydrocarbures dans ses volets fiscaux et contractuels. Il estime qu'il faut créer un cadre fiscal incitatif et changer de contrat type afin que le partenaire étranger ait plus de marge d'action. «Si pour nous tout retard comporte un bien (koul atla fiha kheir), pour les entreprises étrangères, le temps est de l'argent. Et il faut que les décisions se prennent vite». Pour M. Attar, le changement du système fiscal concerne les partenariats à venir et non pas sur l'existant. Et ce changement de loi est d'autant plus nécessaire que l'Algérie «n'a pas fait de nouvelles grandes découvertes depuis plus de dix ans» et que ses réserves ont commencé à baisser aussi bien pour le pétrole que pour le gaz. «Il faut que les lois encouragent le partenariat et l'introduction de nouvelles technologies», a-t-il indiqué. Ces technologies, que ce soit par les hydrocarbures non-conventionnels (gaz de schiste) ou pour la récupération, «nous ne les possédons pas et nous ne pouvons les acquérir que par le partenariat». Mais, explique-t-il, en prenant pour témoin l'échec des trois derniers appels d'offres dans l'amont pétro-gazier, pour «qu'un partenaire vienne en Algérie, il faut qu'il y trouve un intérêt». Il faut donc, selon lui, une loi et une fiscalité incitative. Un partenaire qui ne peut parvenir à un taux de rentabilité interne (TRI) situé entre 15 et 25% n'investira pas. Ce qui est le cas avec la fiscalité actuelle dont le calcul fondé sur le chiffre d'affaires n'est guère incitatif pour les entreprises. Pour Attar, les découvertes en Algérie ne concernent plus que des petits gisements qui nécessitent des investissements élevés et l'utilisation de nouvelles technologiques afin de réaliser une production significative. La fiscalité actuelle ne permet pas des «partenariats pour le gaz et le pétrole non-conventionnel et dans les zones non explorées comme Tindouf, Béchar, Reggane, les régions du nord et l'off-shore». Le gouvernement veut changer la loi pour faciliter l'investissement dans les régions non explorées, pour les hydrocarbures non-conventionnels et pour améliorer l'environnement général. Pour Attar, ce n'est pas le partage de production qui pose problème mais la fiscalité mise en œuvre. Il a expliqué que dans la loi de 1986, le partenaire étranger assumait les dépenses d'exploration. «S'il fait une découverte, il prend une part de la production, s'il ne trouve pas il est le seul perdant et l'Etat algérien ne débourse rien. Mais quand il fait une découverte, le partage de production est fixé en pétrole». Si formellement le partenaire étranger pouvait aller jusqu'à 65% des dépenses d'investissements (découverte et exploitation) alors que Sonatrach s'acquittait de 35%, le partage de la production ne pouvait dépasser les 49% pour le partenaire. «Il est impossible d'arriver à 49% car la fiscalité est très élevée dans les hydrocarbures». Les choses n'ont pas changé dans ce domaine avec les lois 2005 2006, même si Sonatrach dispose de 51% et le partenaire étranger 49%. AMELIORER LES TAUX DE RECUPERATION «Quand on arrive au partage des bénéfices, Sonatrach et son partenaire payent plus que par le passé en termes de fiscalité, que ce soit par rapport au passé en Algérie ou par rapport à ce qui se passe dans les pays voisins» estime Attar. L'attractivité de l'amont pétro-gazier est ainsi affectée. «Quand M Yousfi parle de baisser la fiscalité, il ne parle pas des grands champs comme Tibirkine qui sont faciles à exploiter. Il parle de la fiscalité à appliquer aux nouvelles zones non explorées, aux petits gisements qui ne produisent pas beaucoup et aux hydrocarbures non-conventionnels». Cette fiscalité nouvelle s'applique pour les prochaines découvertes et non à celles qui existent. «Les plus importants revenus proviennent plus de 70% de Hassi Messaoud et Hassi Rmel et ils appartiennent à l'Etat. Même s'il y a baisse de la fiscalité, elle concernera les futurs partenariats, afin d'encourager les entreprises. Si on poursuit avec l'actuelle fiscalité et son mode de calcul, aucune entreprise ne viendra travailler avec Sonatrach en apportant ses technologies. Si on veut augmenter les réserves, il faut que la loi change». M. Abdelmadjid Attar a défendu par ailleurs l'idée d'investir davantage dans l'amélioration des taux de récupération des gisements existants que dans le gaz de schiste. Il relève que le taux de récupération en Algérie ne dépasse pas les 25% alors qu'il est de 35% et plus aux Etats-Unis et dans certains pays du Moyen-Orient. Pour donner une indication de l'importance de l'amélioration du taux de récupération, Attar a souligné que l'accroissement de 10% du taux de récupération de Hassi Messaoud (il est actuellement de 25%) équivaut à la plus grande découverte réalisée au cours de 20 dernières années. Il s'est montré réservé à l'égard du gaz de schiste en estimant que son coût sera trop élevé et sa rentabilité peu probante.