Les quelque 21 millions d'électeurs appelés à voter aujourd'hui pour l'élection d'une nouvelle Assemblée populaire nationale auront la lourde tâche, en réalité, de désigner un personnel politique chargé, lui, de préparer les prochaines échéances politiques nationales. Les élections législatives d'aujourd'hui devront, en effet, mettre en place les premiers éléments d'une refonte de la constitution et du fonctionnement global des institutions du pays. Aujourd'hui, à travers les 11.520 centres de votation et les 48.546 bureaux de vote, il y aura, selon les chiffres officiels, 21.664.345 électeurs qui vont voter pour leurs représentants à la future APN, dont le nombre de députés est passé à 462 pour un mandat de 5 ans. Pour ces législatives, il y aura ainsi 25.800 candidats, dont 7.647 femmes, représentant 44 partis politiques, 186 listes indépendantes et une alliance politique, l'Alliance de l'Algérie Verte (AAV), celle en fait des partis d'obédience islamique (MSP, Islah et Ennahda). Dans le monde, ils sont 990.470 Algériens résidant à l'étranger, inscrits sur les listes électorales qui ont commencé samedi dernier, à élire leurs représentants. Qualifiées de « décisives » pour l'incrustation de la démocratie dans les moeurs politiques algériennes, ces législatives interviennent en fait, dans le sillage du « Printemps arabe » et des bouleversements politiques dans la région maghrébine et ailleurs dans le monde arabe. C'est dans ce sens que le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, avait affirmé mardi à Sétif, l'importance d'une Assemblée populaire nationale 'pluraliste forte d'une composante irréprochable qui reflète la réalité et les attentes de la Nation''. Il a, lors de son discours prononcé à l'occasion de la commémoration du 67ème anniversaire des massacres du 8-Mai 1945, appelé les Algériens à accomplir leur devoir constitutionnel, estimant que la prochaine Assemblée nationale garantira «le droit de participation effective à tous, y compris aux nouveaux partis et le choix de candidats compétents et crédibles porteurs de nouvelles approches et de programmes sérieux et judicieux, fidèles à l'engagement éthique qui les lie à leurs électeurs». Selon le Président, la prochaine assemblée «aura pour charge de parachever l'adaptation du système juridique national dans le sillage des réformes politiques, à leur tête la révision de la Constitution, pour amorcer une ère nouvelle en matière de promotion de bonne gouvernance, de modernisation des institutions de la République et d'élargissement du champ des droits et libertés». «Les réformes, les législations et les nouvelles réglementations, quel que soient leurs qualités, ne sauraient constituer une fin en soi, la finalité étant l'application saine des politiques par tous les acteurs pour concrétiser notre aspiration collective de mise en place d'institutions constitutionnelles dont la crédibilité et la légitimité ne sauraient être remises en cause», a-t-il ajouté. Pour autant, c'est là justement la grande question, sinon la polémique qui a émaillé les grands et petits événements de la campagne électorale pour ces élections, notamment la suspicion de fraude qui entacherait la crédibilité de ces élections. LA GRANDE ENIGME Sur ce thème cher à beaucoup de partis, il y a eu une véritable passe d'armes entre partis proches du pouvoir et l'opposition. Si le Mouvement national de la nature et du développement estime que 'ceux qui déclarent, là où ils passent, craindre la fraude électorale», ne sont plus, selon lui, «en mesure de convaincre, ni leurs militants, ni les citoyens». M. Menasra, du Front du changement, n'en pense pas moins et relève, dans un de ses discours de campagne, que 'les outils de la fraude existent mais la maturité de l'opposition annulera indéniablement l'effet de ces outils». Défendant l'intégrité et la transparence du prochain scrutin, qui sera supervisé par plus de 500 observateurs internationaux, M. Belkhadem a appelé les formations politiques qui accusent le FLN de «fraude» à mobiliser plutôt les citoyens autour de «programmes utiles». Abdallah Djaballah, initiateur de la proposition d'un ministère de la « Zakat » pense de son côté, qu'il faut se «mobiliser lors du dépouillement» (des bulletins) afin d'éviter «toute fraude». Mme Hanoune, quant à elle, a réitéré sa mise en garde contre la fraude qui constituera «un danger pour l'Algérie» notamment en présence d'observateurs internationaux qu'elle a qualifiés «d'espions». C'est une belle sauce politique donc que sont ces élections législatives, la mayonnaise en moins, selon des observateurs pour qui elle (la mayonnaise) ne prendra que si vraiment il n'y aura pas un absentéisme massif, un désintérêt, ou, pire, un boycott important de ce scrutin. C'est en fait là le grand souci des autorités et des partis politiques qui craignent une désaffection massive de ces élections. Si certains partis craignent effectivement un boycott important de ce scrutin, c'est notamment que le fait s'est plus ou moins confirmé après une campagne électorale terne, et peu suivie par les Algériens. Bien plus que les vainqueurs potentiels ou avérés de ces élections, c'est du moins le taux de participation qui anime les discussions et les débats sur cette consultation. D'autant que, selon le ministre de l'Intérieur, obtenir une majorité serait 'impossible''. Ce qui renforce l'opinion des uns et des autres sur un émiettement du vote qui profiterait aux nouveaux partis, sinon affaiblirait la position des majors : FLN, RND et AAV n'étant dès lors plus assurés d'avoir une majorité. Ce qui repose la grande question, sur toutes les lèvres: qui sera le nouveau Premier ministre ? Ouyahia, Belkhadem ? Ou quelqu'un d'autre. Une nouvelle tête surgira de ces élections, mais pas forcément des urnes, puisque, répétons-le, il n'y aura vraisemblablement pas de vainqueur à une large majorité. Attendons donc ce soir ou demain dans la matinée, les résultats de ce scrutin.