Les Etats-Unis présenteront prochainement aux membres du Conseil de sécurité de l'ONU un projet de résolution qui préconisera sans aucun doute l'élargissement de la mission de la Minurso à la supervision des droits de l'homme tant dans la partie du Sahara Occidental sous occupation marocaine que dans les camps de réfugiés en Algérie sous contrôle du Front Polisario. Pour avoir elles-mêmes, sous prétexte d'être soucieuses de la situation de ces droits de l'homme dans les camps de réfugiés sahraouis en Algérie, réclamé la mise en place en ces lieux d'un mécanisme international de surveillance de ces droits et affirmé à grand renfort de propagande que le Maroc n'a rien à se reprocher en la matière dans le territoire qu'il occupe, les autorités de Rabat se retrouvent prises au piège dans lequel elles pensaient enferrer le Front Polisario. Du moment que Rabat prétend qu'il n'y a pas de problème des droits de l'homme en territoire sahraoui sous autorité du Makhzan, pourquoi ses autorités s'offusquent de l'élargissement de la mission de la Minurso puisque affirmant le respect de ces droits par elles ? S'il en est ainsi, l'initiative américaine permettra de le confirmer et le cas échéant de vérifier la véracité des accusations marocaines contre le Front Polisario en matière des droits de l'homme, lequel s'est déclaré accepter d'être sous le regard de cette Minurso ayant compétence de surveillance des droits de l'homme. La réaction de rejet manifestée par le trône et le Makhzan marocain pour l'élargissement du rôle de la Minurso est de même nature que celle qu'ils ont s'agissant d'admettre le principe du droit pour le peuple sahraoui à s'exprimer par la voie de l'autodétermination. Dans les deux cas, elle est en flagrante contradiction avec les certitudes sur lesquelles s'arcboute la diplomatie marocaine pour tenter de faire valoir le bien-fondé de la politique du royaume sur la question sahraouie. On ne peut en effet prétendre comme le font les Marocains qu'il n'existe de problème des droits de l'homme au Sahara Occidental et s'affoler jusqu'à l'hystérie dès lors que la communauté internationale veut en avoir le cœur net. De même que l'on ne peut affirmer que la population sahraouie est attachée au trône et convaincue de la «marocanité» de son territoire et user de tous les stratagèmes pour la priver du droit à l'exprimer par voie d'autodétermination à travers un référendum. Avec ses logiques contradictoires, le Maroc a fini par lasser ses plus «intimes amis» étrangers et rendu possible qu'une initiative américaine se déclare qui le met «dos au mur». La crainte est que se sentant acculés, le trône et le Makhzan tentent de se lancer dans la fuite en avant sous la forme d'une provocation qui aurait pour effet de créer une situation dangereuse dans la région avec l'espoir qu'elle dissuadera ses «amis et alliés» de distendre leurs liens de solidarité avec le royaume. La campagne médiatique anti-algérienne qui s'est amplifiée au Maroc depuis l'annonce par Washington de l'initiative américaine fait craindre qu'elle prépare une opération de ce genre. Dans le climat d'affolement qui prévaut à Rabat tout est à redouter y compris l'incontrôlable dérapage. Paris sur qui le Maroc semble miser à fond pour le sortir de sa mauvaise passe diplomatique, doit se garder de jeter de l'huile sur le feu en lui manifestant une solidarité sans frein et allant à l'encontre de ses propres intérêts géopolitiques au Maghreb et dans toute la région méditerranéenne.