Si, sous les hémicycles on se chamaille pour les «strapontins», à nommer et graisser comme les oies, chaque jour qui se lève est un jour les ouailles, humble chaâb cherche, d'abord, ses béquilles avant de se lever, est une nouvelle épreuve pour mesurer l'énorme fossé qui sépare, encore, le discours aseptisé de la réalité malade, la parole naturellement facile, de l'acte, nécessairement difficile. Autant l'Algérie «officielle» semble vouloir entrer d'un pas décidé dans l'ère du troisième millénaire, autant l'Algérien hésite, encore, à se projeter sur un avenir qu'il craint de voir ressembler, à hier. Au niveau local, le pouvoir d'Alger donne l'impression d'être, complètement, déconnecté de la réalité, de la vérité ou des vérités du terrain. En haut lieu, sait-on que la vraie image que le citoyen se fait du pouvoir, de l'autorité, de la puissance publique, n'est pas celle que la télévision nous raconte, en quelques mots, au J.T. de vingt heures, ni celle des luxueux salons d'honneur, mais bien celle qu'il voit, qu'il vit, tous les jours, dans sa ville, son village, sa commune... Lorsqu'il faut attendre toute une vie pour prétendre à quelques mètres carrés pour abriter sa progéniture, lorsqu'il faut s'armer d'un trésor de patience pour retirer un document d'un service public, lorsqu'il faut toujours «graisser la patte» pour «acheter» son... droit, lorsqu'il faut attendre, sinon une éternité, du moins des années, pour frapper à la poire d'un petit responsable qui s'empresse de vous accabler de ses tourments pour vous empêcher de parler des vôtres, l'on a du mal, beaucoup de mal, à accepter l'idée que quelque chose est en train de changer dans le pays. Si des nations s'imposent, aujourd'hui, en véritables maîtres du monde, ce n'est pas, seulement grâce au génie de leurs gouvernements, mais aussi grâce au travail de leurs citoyens, tous leurs citoyens, sans distinction aucune. C'est manifestement de cela dont notre pays a besoin. Permettra-t-on aux générations, actuellement en formation, et aux cadres jusque-là mis en quarantaine, de rattraper le retard et mettre le pays au diapason ou continuerons-nous de boire le lbène, jusqu'au lit. Et s'abreuver du jus de langue de bois d'ébène.