La crise s'accélère en Ukraine où les divisions internes qui se sont exacerbées, après la mise en place d'un gouvernement provisoire, se transforment, aussi, en un bras de fer entre la Russie et les Occidentaux. Un climat de guerre froide règne. Mais les choses pourraient devenir plus «chaudes». Au lendemain de l'autorisation, accordée par le Parlement russe, à l'envoi de troupes en Ukraine, la situation est devenue, encore plus tendue. Le nouveau pouvoir, installé à Kiev, après l'émeute de Maidan a décidé de rappeler les réservistes et de fermer l'espace aérien aux appareils non civils. Pour le président de l'Autorité provisoire, Olexandre Tourtchinov, dont l'autorité n'est pas reconnue dans les régions russophones, a déclaré que les actions de la Russie s'apparentaient à une «déclaration de guerre». « Toute tentative d'attaquer des installations militaires sera, de fait, une agression armée directe contre notre pays, et la responsabilité en sera imputée à l'armée et aux dirigeants russes, a-t-il déclaré, en appelant la «communauté internationale» à prendre de «véritables mesures». «C'est l'alerte rouge. Ce n'est pas une menace, c'est en fait une déclaration de guerre à mon pays, a-t-il dit. Nous appelons le Président Poutine à retirer ses forces armées», a déclaré le Premier ministre, Arseni Iatseniouk. Sur le terrain, en Crimée et dans l'Est, où les russophones sont majoritaires, les tensions sont vives. Le déploiement de forces russes ou présumées telles est bien accueilli par la population russophone qui a reçu de plein fouet, la décision de suppression de la loi sur les langues régionales, le week-end de la destitution de Viktor Ianoukovitch. Une décision qui jouait, ouvertement, sur les clivages qui s'est avérée, politiquement, désastreuse, même si la promulgation de cette loi a été bloquée. Toute la population russophone s'est sentie, directement, ciblée dans une démarche qu'elle impute à l'extrême droite ukrainienne qui a été très active dans la «révolution» du Maidan. POUTINE MAITRE DU JEU Officiellement, Poutine n'a pas encore fait usage de l'autorisation qui lui a été accordée par le Parlement russe, d'agir en Ukraine. Mais sur le terrain, des militaires, sans insigne pour les identifier, ont investi les positions névralgiques, en Crimée. L'Ukraine a décidé de mobiliser les réservistes pour assurer la sécurité et l'intégrité territoriale. Mais l'armée ukrainienne n'est pas en meilleur état que le pays. Non seulement, elle manque de moyens, mais elle est traversée par les divisions. Selon les médias russes, la frégate Hetman-Sahaydachniy, le navire amiral de la flotte ukrainienne a fait défection et refuse de suivre les ordres de Kiev. Un porte-parole du ministère de la Défense ukrainien, à Kiev, a démenti, sans vraiment convaincre, l'existence de défection dans l'armée ukrainienne. Mais c'est Vladmir Poutine qui paraît maître dans un jeu où la Russie contre-attaque, après avoir donné l'impression d'avoir été débordée par les évènements et par les Occidentaux. A Kiev, on affirme que l'action de Moscou était «préparée» depuis des semaines, mais il semble bien que le président russe adapte ses actions à l'évolution de la situation. Et il le fait plus rapidement que les Occidentaux, dans une Ukraine où la Russie ne manque pas de points d'appui. La Crimée est, de facto, sanctuarisée et le rejet du nouveau pouvoir à Kiev s'étend à d'autres régions de l'Est. MENACES OCCIDENTALES C'est une vraie cassure interne de l'Ukraine sur laquelle se superpose un bras de fer entre la Russie et les Occidentaux. Le ton de ces derniers se durcit à l'égard de Moscou, mais en termes concrets les capacités d'action sont nulles. Le Conseil de sécurité où la Russie dispose d'un droit de veto, n'est pas une option. Anders Fogh Rasmussen, le secrétaire général de l'OTAN a accusé la Russie de menacer la «paix et la sécurité en Europe » et lui a demandé de « cesser ses activités militaires et ses menaces » sur l'Ukraine. « Nous allons discuter des implications pour la paix et la sécurité en Europe, et pour les relations entre l'OTAN et la Russie». L'Otan, même si son chef hausse le ton, n'a aucune justification légale pour intervenir. Mais au-delà, l'hypothèse, d'une intervention de l'Otan contre la Russie est un scénario inimaginable, tant les conséquences paraissent désastreuses. Pour l'heure, les Occidentaux ont décidé de suspendre leur participation aux réunions préparatoires du G8 de Sotchi, prévu en juin. On est plus dans la symbolique que dans l'action. Washington a évoqué une remise en cause, même de la présence de la Russie, au sein du G8. John Kerry, le secrétaire d'Etat américain a indiqué que c'est, désormais, la présence de la Russie, au sein du G8, qui pourrait être remise en cause. Il a évoqué des mesures pour «isoler » l'économie russe. La guerre des mots se poursuit La guerre, elle, est dans l'air. Restera-t-elle «froide» ? Là est la question.