Les djihadistes de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), après une offensive qui semble avoir pris totalement au dépourvu le pouvoir central et qui leur a permis de contrôler plusieurs régions du pays, étaient en route hier vers la capitale, Baghdad. Une vaste offensive marquée par des exécutions sommaires condamnées par la communauté internationale. Le gouvernement Maliki a mis en en place un plan de sécurité pour défendre la capitale, à travers le déploiement massif de forces de sécurité. Hier, les combattants du groupe radical de l'EIIL, qu'on dit très aguerris comme en témoignent les derniers affrontements pour la prise de Mossoul notamment, se trouvaient à moins de 100 km de Baghdad. Ils avançaient sur trois axes, à partir de la province d'Al-Anbar à l'Ouest, de Salaheddine au Nord et de Diyala à l'Est. Des milliers de djihadistes ont pris mardi Mossoul et sa province Ninive (Nord), Tikrit et d'autres régions de la province de Salaheddine, ainsi que des secteurs des provinces de Diyala (Est) et de Kirkouk (Nord). Ces mêmes combattants contrôlaient déjà depuis janvier Fallouja, qui se trouve à 60 km à l'ouest de Baghdad. Des témoins cités par les agences de presse ont fait état de renforts rebelles aux alentours de Samarra (110 km au nord de Baghdad), des préparatifs semblant augurer d'un possible assaut. OBAMA ETUDIE «TOUTES LES OPTIONS» Devant l'impuissance du pouvoir irakien, le président américain, Barack Obama, a affirmé que son équipe de sécurité nationale étudiait «toutes les options». «Nous travaillons sans relâche pour identifier comment (...) fournir l'aide la plus efficace (aux autorités irakiennes). Je n'exclus rien», a-t-il ajouté sans autres précisions. Si la Maison Blanche a réaffirmé que l'envoi de troupes au sol n'était pas envisagé, un responsable américain a fait état de possibles frappes menées par des drones. Les 15 membres du Conseil de sécurité ont condamné jeudi tous les actes de terrorisme commis en Irak et appelé à un dialogue urgent dans le pays entre toutes les parties. A Londres, le ministre irakien des Affaires étrangères, Hoshyar Zebari, a admis que les forces de sécurité s'étaient «effondrées» à Mossoul. Mais maintenant, «nous essayons (...) de bouter ces terroristes hors de nos villes principales», a-t-il indiqué. Des sociétés américaines travaillant pour le gouvernement irakien dans le secteur de la Défense ont fait évacuer leurs employés américains de la base aérienne de Balad dans la province de Diyala vers Baghdad. «EXECUTIONS SOMMAIRES» Le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Navi Pillay, a dénoncé pour sa part, hier, des «exécutions sommaires» et des «meurtres extrajudiciaires» en Irak. «Des rapports suggèrent que le nombre de personnes tuées au cours des derniers jours serait de l'ordre de plusieurs centaines et que le nombre des blessés approcherait le millier d'individus», a indiqué Mme Pillay dans un communiqué. Elle a exprimé son «extrême inquiétude face à la détérioration dramatique de la situation en Irak» où «des rapports font état d'exécutions sommaires et de meurtres extrajudiciaires et du déplacement massif de près d'un demi-million de personnes». Mme Pillay se dit très perturbée par des rapports selon lesquels «des combattants de l'EIIL, y compris des prisonniers qu'ils ont relâchés de prisons de Mossoul et auxquels ils ont fourni des armes, recherchent activement, et dans certains cas tuent, des soldats, des membres de la police et d'autres personnes, y compris des civils, perçues comme étant associées au gouvernement». Selon Rupert Colville, porte-parole de Mme Pillay, un employé de justice et douze personnes supposées avoir travaillé pour les forces de sécurité irakiennes ont également été exécutés à Dawasa, dans les environs de Mossoul. LES VOLONTAIRES AFFLUENT A BAGHDAD Des milliers de volontaires ont répondu à l'appel du gouvernement irakien, qui a affirmé qu'il fournirait des armes à tous les citoyens qui se porteraient volontaires pour combattre les insurgés. Venus de différentes provinces du pays, ils sont rassemblés sur la base d'Al-Mouthanna, au cœur de Baghdad, attendant d'être affectés dans les différents centres d'entraînement créés spécialement par les autorités. Le plus influent dignitaire chiite d'Irak a lui aussi exhorté hier les Irakiens à prendre les armes pour stopper l'offensive fulgurante des djihadistes sunnites. «L'Irak fait face à un défi majeur et à un danger extraordinaire. Les terroristes ne veulent pas contrôler certaines provinces, mais ils ont annoncé qu'ils visaient toutes les provinces dont Baghdad, Kerbala et Najaf. A partir de là, la responsabilité de leur faire face et de lutter contre eux incombe à tous et ne concerne pas une seule confession ou une seule partie», a dit Ali Sistani, plus haute autorité religieuse chiite d'Irak, dans un message lu par son représentant à Kerbala, au sud de Baghdad. Répondant aux appels, des «milliers de volontaires de tous les âges» s'engagent, selon le général Fadhel Abdel Saheb, chargé du camp de recrutement d'Al-Mouthanna. Un afflux «sans précédent».