On pourrait croire que les Algériens détenteurs de comptes secrets et illégaux dans la filiale suisse de la banque HSBC dont les noms figurent dans les listes désormais accessibles grâce aux documents fournis à la presse internationale par un ex-employé de la banque, ont maintenant du souci à se faire côté des autorités du pays. Que l'on se détrompe, les foudres de l'Etat algérien ne tomberont pas sur ces fraudeurs qui pour la plupart bénéficient de protections en béton au sein de ses appareils. Le scandale international dans lequel ils sont impliqués n'incitera nullement les autorités algériennes à leur faire rendre gorge de l'argent frauduleux qu'ils ont entreposé dans leurs comptes suisses. La lutte contre la corruption, la fraude et l'évasion fiscale n'est pas dans leurs intentions, car elles sont elles-mêmes gangrenées par ces fléaux. Parions de ce fait qu'elles feront tout pour étouffer ce que le scandale a révélé impliquant des concitoyens. Bien sûr, il nous sera promis que des comptes vont être demandés aux fraudeurs mais rien ne sera engagé réellement contre eux. S'il existait une volonté politique de combattre la fraude et l'évasion fiscale qui saigne à blanc les finances de la nation, il n'était pas besoin d'attendre le scandale du « SwissLeaks » pour que ces fraudeurs soient repérés et poursuivis. Sous pressions conjuguées des Etats-Unis et de l'Union européenne soucieux de débusquer leurs propres fraudeurs fiscaux, la Suisse, ce paradis fiscal prisé par nos margoulins de haute volée, a décidé « d'assouplir » ses lois contraignant les banques au secret sur les placements faits auprès d'elles. Cette brèche ouverte aurait « dû » permettre aux autorités algériennes de recueillir des informations sur lesquelles elles pourraient se baser pour diligenter des enquêtes. Jusqu'à preuve du contraire, il n'en a rien été. De toute façon, ce qui a pu être fait de leur part dans ce sens ne l'a probablement pas été dans le cadre d'une lutte déterminée contre la corruption et l'évasion fiscale, mais plus trivialement dans celui de réunir des dossiers contre certains des détenteurs de comptes secrets à des fins de pression contre eux en cas de besoin. Les autorités algériennes qui se vantent d'être entendues dans le concert international se sont totalement effacées s'agissant de l'action entreprise internationalement pour mettre fin aux paradis fiscaux et aux pratiques frauduleuses qu'ils permettent. Ce n'est parce que l'Algérie souffrirait moins que d'autres pays de cette situation qu'elles ne se sont pas impliquées dans le combat. La corruption et son corollaire l'évasion fiscale sont consubstantiels au système politique et économique dont elles sont les gérantes. Tout ce qui participe à rendre globale et efficiente la lutte contre ces fléaux ne les incite pas à en favoriser la mise en œuvre. Les acteurs à l'origine des révélations sur l'évasion fiscale internationale assurent que ce qui a été déjà rendu public n'est que la « partie visible de l'iceberg » et qu'il faut s'attendre à plus. Inutile de dire par conséquent qu'ils sont nombreux au sein des autorités algériennes à redouter d'apparaître dans les listes à venir. En Algérie, les lanceurs d'alerte qui veulent empêcher de voler et de cacher le fruit du vol, sont vus comme des ennemis dont il faudrait étouffer les actions.