L'ex-PDG de Sonatrach et vice-président de l'association internationale du gaz (AIG), Abdelmadjid Attar, ne cache pas ses appréhensions quant à la situation économique actuelle de l'Algérie, plombée par la chute vertigineuse des cours du brut. Avec pratiquement une baisse de moitié de ses recettes d'hydrocarbures prévues à la fin de l'année, à plus de 35 milliards de dollars, la situation économique du pays est, selon lui, inquiétante. A fin décembre 2015, les recettes algériennes d'hydrocarbures seront pratiquement divisées en deux, à 34,5 milliards de dollars, selon les prévisions du gouvernement. Pour autant, le groupe Sonatrach a annoncé le maintien des grands projets d'investissement dont la première priorité porte sur l'effort d'exploration pour assurer la sécurité énergétique du pays à très long terme et pour renforcer le rôle de l'Algérie en tant qu'acteur principal du commerce international de l'énergie. Sonatrach, selon ce programme, va accélérer le renouvellement des réserves d'hydrocarbures, le développement de celles déjà découvertes, avec un intérêt particulier pour l'optimisation des réserves prouvées de Hassi Messaoud et de Hassi R'mel, les deux plus grands gisements pétroliers et gaziers de l'Algérie. En outre, Sonatrach va mettre en place des programmes pour améliorer les niveaux de récupération d'hydrocarbures de ces deux grands gisements et augmenter dès lors la production nationale, selon son PDG Amin Mazouzi. Ce n'est pourtant par l'avis de M. Attar qui a déjà présidé aux destinées du groupe pétrolier algérien. Il a estimé, sur l'éventualité d'une surproduction pour améliorer les recettes d'hydrocarbures, que «s'il y avait le feu dans la baraque, on peut produire plus, mais qu'est ce que cela va changer?». Il a précisé à la radio nationale hier lundi que cette stratégie, à déconseiller, va juste «faire baisser les prix. Et, c'est mettre en danger les réserves qui existent dans les gisements, et donc cela va diminuer les réserves ultimes» du pays, a-t-il souligné avant de relever que «cela n'est pas une alternative» à la baisse des recettes d'hydrocarbures. Mieux, «ce n'est pas cela qui va nous ramener les 35 milliards de dollars perdus» dans la chute des prix. Pour Abdelmadjid Attar, fervent défenseur des énergies renouvelables, «les solutions sont ailleurs», et il a même averti contre un éventuel recours à la surproduction des deux grands gisements d'hydrocarbures d'Algérie. En fait, face à la crise économique, «il faut aller vers la diversification dans le domaine énergétique, car il n'y a pas de crise énergétique mais économique». En outre, il faut «augmenter le nombre des opérateurs et les diversifier sur tous les secteurs», estime-t-il avant d'expliquer que «le problème que nous avons est la consommation intérieure, qui est en train d'augmenter beaucoup plus rapidement que les capacités de production. Tout ce qu'on peut produire peut à peine couvrir la consommation intérieure», selon Attar qui préconise d'aller «chercher la solution dans les autres secteurs» économiques. En outre, il faut également revoir la stratégie de production des énergies renouvelables, car, selon lui, l'Algérie «a pris beaucoup de retard'' dans ce domaine. M. Attar, estimant par ailleurs lui aussi qu'il faut revoir à la hausse les prix des carburants et même la subvention de certains produits énergétiques, il relève d'autre part que la situation actuelle de l'Algérie est similaire dans ses fondamentaux avec les années 1986 et 1990, mais la différence est qu'aujourd'hui, le pays ne fait pas face à un endettement extérieur. «Les craintes par rapport aux années à venir c'est de revivre la même situation, mais la différence est qu'aujourd'hui, il n'y a pas de dettes. Pour autant, il faut des solutions courageuses, il faut aller vers la diversification de l'économie et des opérateurs». Et puis, la solution réside, selon lui, dans le renforcement de l'économie nationale à travers l'entreprise, les PMI, et ne pas céder à la tentation de la surproduction (pétrolière), car «il faut préserver au mieux les réserves pétrolières pour les générations à venir. Les ressources qu'il y a actuellement, il faut les préserver pour les années 2030 et au-delà pour la sécurité énergétique de l'Algérie». «On ne peut pas tout remplacer avec l'énergie renouvelable», estime-t-il car, pour lui, l'industrie mondiale fonctionnera toujours avec les énergies fossiles. Pour Abdelmadjid Attar, «il y a urgence pour agir maintenant, les réserves de change commencent à fondre, car il y a une crise énergétique dans le monde occidental, où on consomme moins d'hydrocarbures et plus d'énergies renouvelables.»