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Bourguiba : la présence de l'absent
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 07 - 04 - 2016

La version anglaise de ce texte sera publiée dans le magazine en ligne : The Arab Weekly, daté du 8 avril 2016.
Deux polémiques, l'une autour du retour de la statue équestre de Habib Bourguiba (1903-2000) au bout de l'avenue qui porte son nom à Tunis, l'autre à propos de la consigne aux enseignants de lui consacrer une heure de cours le 6 avril, jour anniversaire de sa disparition, ont été l'occasion de ranimer les différentes opinions qui entourent cette personnalité majeure du XXème siècle tunisien.
L'absence de Bourguiba rencontre un vide politique qui a commencé à se creuser de son vivant et par le fait d'un mode de gouvernement de plus en plus intransigeant, à mesure que les oppositions se sont dressées. L'avènement de la République en 1957 a signé l'effacement brutal de la monarchie husaynite (1704-1957). L'unilatéralité du geste ouvre la voie devant un Bourguiba agissant avec des alliés partisans et contre toute contestation, pour mettre les bases d'un Etat. Zine El Abidine Ben Ali a investi ce vide et transformé les Destouriens-bourguibistes en réseau dormant ou en RCDistes aujourd'hui repentants. Sa décision d'escamoter les funérailles nationales et populaires que tout le monde attendait le 8 avril 2000 traîne encore ses conséquences. La résidence surveillée dans laquelle Bourguiba a vécu pendant 17 ans (7 novembre 1987-6 avril 2000) a été à peine contestée ; son isolement n'a jamais été levé et la déception infligée au deuil de la population dure encore, comme si la frustration de l'hommage couvrait la culpabilité de l'abandon, soudain réalisé avec sa disparition.
Le départ inattendu de Ben Ali réveille des remords et l'insatisfaction de ne pas avoir rendu à Bourguiba la place qui lui revient. Cette confusion des sentiments dans une phase où aucun leadership ne se dégage accroît l'attrait de la symbolique bourguibienne depuis 2011.
Entretemps, après soixante ans d'indépendance, une lente perfusion des principes d'organisation de l'Etat et de la société tunisiens a eu le temps de faire son effet. Les dérives autoritaires et l'instrumentalisation faite par Ben Ali (dont on s'accorde à dire qu'il n'a ni la culture ni le charisme de Bourguiba) n'ont pas empêché les différentes couches sociales tunisiennes d'évoluer autour de l'éducation et de la santé de masse comme de la reconnaissance du rôle des femmes comme sujet de droit (interdiction de la polygamie, droit au divorce, droit de vote) et donc comme acteur politique. L'ensemble du pays a métabolisé une série de transformations induites par les politiques publiques bourguibiennes. A des degrés divers, la sphère familiale, le milieu scolaire et le monde du travail (mais pas le monde de la politique), les mentalités et les manières de vivre ont été modifiés, sans supprimer toutefois la violence contre les femmes, les inégalités en leur défaveur ni éviter les effets d'une gestion politique et économique soumise aux diktats de la mondialisation.
Aussi, les nostalgiques « bourguibistes », les nouveaux entrepreneurs politiques qui ravivent son image pour s'y adosser, les islamistes dont les discours se mettent à reconnaître son apport à la Tunisie se rencontrent surtout autour d'une rhétorique qui recouvre une absence de vision politique propre. La reconduction de l'article premier de la Constitution de 1959 dans la Constitution de janvier 2014 : « La Tunisie est un Etat libre, indépendant et souverain. Sa religion est l'islam, sa langue, l'arabe» avec son ambiguïté (le pronom possessif sa renvoie-t-il à la Tunisie ou à l'Etat ?) est significative. Les tendances politiques présentes à l'Assemblée Nationale Constituante ont fini par s'accorder sur ce statu quo a minima.
L'apparition de l'extrémisme religieux a remis au premier plan la question du droit des femmes comme lieu d'affrontement idéologique et politique et comme boussole. Ce qui a renforcé le retour à Bourguiba comme référence et comme symbole dans les discours politiques, les débats publics et sur les réseaux sociaux. Sans être le seul artisan de la « modernité » tunisienne - préparée de longue date, entre autres par les écrits de Tahar Haddad -, Bourguiba a traduit dans les lois et les institutions de la République les bases de l'existence des femmes à parts égales avec les hommes. C'est ainsi qu'en 2012, lors de la rédaction de la Constitution, le terme « complémentarité » a été remplacé par « égalité ».
Malgré les acquis et la symbolique qu'il représente pour le statut de la femme en Tunisie, il ne s'agit pas de considérer Bourguiba comme un démiurge qui aurait fait rentrer la Tunisie dans une nouvelle ère. Les tensions récentes montrent que les valeurs personnifiées par lui peuvent être contestées au nom d'un projet politique concurrent. Sans mystifier ni diaboliser son oeuvre, il s'agit de la poursuivre.
Au-delà des clivages politiciens, son héritage est à renouveler et à ré-inventer, par l'action et les lois, afin d'aller vers un projet de société où les femmes tiennent la place, pleine et entière, que Bourguiba a commencé à aménager.


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