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Plaidoyer pour la langue arabe (1ère partie)
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 23 - 08 - 2016

(A propos de l'article publié dans votre journal le jeudi 04 août dans la rubrique Actualité autrement vue, intitulé : Défaut de langue : sommes-nous des SDF ?)
Il est inadmissible que le seul journal crédible en langue française permette d'écrire des bêtises monumentales sur la langue arabe. Comment ose-t-on parler de la 4ème langue du monde par l'importance de ses utilisateurs et par le flux d'informations que véhiculent ses 500 chaînes de télévision (au moins) dans le monde arabe et ses milliers de radios comme on parlait du breton ou du provençal ? Il est inconcevable que Le Quotidien d'Oran publie des écrits de la sorte et donne une page entière à quelqu'un qui dénigre la langue nationale. Faut-il remplacer l'arabe, symbole d'une civilisation millénaire qui a tant donné à l'humanité et que parlent plus de 500 million de personnes ? Des millions de téléspectateurs regardent et écoutent chaque jour des centaines de chaînes télévisées qui émettent en langue arabe dans le monde, y compris dans plusieurs pays européens comme France 24 et BBC Arabic. Il est insensé et même outrageant pour la souveraineté nationale d'écrire une page complète du Quotidien d'Oran pour dénigrer la langue nationale, la langue de Moufdi Zakaria, de Hafidh Darradji, de Khadidja Ben Guenna et de Houari Boumediene. Monsieur Touhami Rachid Raffa s'est enfermé et momifié dans sa francophonie au point d'ignorer que la langue des 500 millions d'Arabes et des deux (2) milliards de musulmans qu'ils pratiquent chaque jour, n'est pas une langue morte et qu'elle est devenue la 4e langue à l'ONU avant la langue de Molière qui tend vers un déclin inévitable malgré les efforts de la France et des pays francophones dans le monde. Nos jeunes, pour leur grande majorité, s'orientent maintenant vers l'étude de la langue anglaise. Nos relations futures avec la France sont presque sans intérêt. C'est elle qui a intérêt à faire perdurer sa langue chez nous. C'est elle qui continue à semer la divergence dans notre société. C'est elle qui, par le biais de la langue française, s'insinue malhonnêtement dans notre économie ; nous fait des propositions d'affaires alléchantes ; nous tente et finit par offrir le morceau charnu à nos voisins pour nous réconcilier en nous offrant un OS, c'est l'affaire de Renault, une usine de 400 mille véhicules, qu'on nous fait miroiter et qui, finalement a été offerte à d'autres. C'est un marché de dupes ! Non, la France n'a jamais été un pays ami de l'Algérie et notre histoire commune peut en dire beaucoup plus (colonisation et crimes génocidaires pendant un siècle et trente-deux ans). Quant à la langue française que nous lisons et écrivons, nous la considérons comme un butin de guerre. Elle n'est ni langue nationale ni maternelle. D'ailleurs c'est l'une des langues les plus difficiles au monde. Avec son orthographe impossible et ses conjugaisons encombrantes ne ressemblant à aucune autre langue moderne. D'ailleurs j'en parle en tant que linguiste qui a étudié le latin et un peu de grec. Même le latin, dont cette langue est issue, est plus facile à étudier. Quoi qu'il en soit et de toutes les façons, la plupart des jeunes Algériens s'orientent vers les autres langues étrangères comme l'anglais, le chinois, l'allemand et le russe.
Monsieur Touhami Rachid Raffa parle de daridja et de langue parlée et non enseignée. Ce monsieur ne sait pas que toutes les langues possèdent des langages parlés et des langages scientifiques et littéraires. Il y a dans toutes les langues ce que les linguistes appellent une langue commune parlée et écrite par tout le peuple et dans le cas de l'Algérie c'est l'arabe car il y a au moins 60 journaux et revues en langues arabe que monsieur Touhami Rachid Raffa ignore. Il y a par exemple, le journal Ech-Chourouq qui tire à presque 2 millions d'exemplaires en période faste. Quant au Quotidien d'Oran que j'achète chaque jours, il n'a jamais dépassé les 120 milles exemplaires grâce à son sérieux et au sérieux de ses plumes. Mais maintenant qu'il commence à dénigrer la langue arabe, il va certainement perdre au moins la moitié de son lectorat. Une page entière pour dire que nous avons un défaut de langue ou que nous sommes des « SDF » alors que nos journalistes arabophones émerveillent de milliers de téléspectateurs par leur culture très vaste, leur parfaite diction et leur vocabulaire très riche dans une langue arabe moderne et tournée vers le futur.
Oui Hafid Deradji n'est pas un «SDF». C'est un journaliste merveilleux époustouflant. Il agglutine autour des «écrans» télévisés des millions de jeunes, de moins jeunes et même de vieillards à travers le monde, car les téléspectateurs arabophones se trouvent dans tous les pays du monde. Hafidh Derradji est le journaliste sportif le plus ingénieux du monde. Il véhicule ses connaissances footballistiques à travers ses reportages qui sont de véritables leçons de journalisme.
Car un journaliste sportif doit avoir une culture très vaste non seulement dans son domaine mais aussi et surtout dans les autres disciplines tant littéraires que scientifiques et l'arabe est une langue très riche, toute en couleur et en mouvement. N'en déplaise à ses dénigreurs (les francophones).
L'arabe n'est pas seulement la langue de la poésie et de la littérature, elle n'est pas seulement la langue de l'islam et des musulmans, elle n'est pas seulement la 4ème langue officielle des langues de l'ONU, avant la langue française, c'est aussi et surtout la langue qui a véhiculé de la recherche scientifique (mathématique, physique, chimie, médecine, astronomie…). C'est grâce à elle que la renaissance de la civilisation occidentale s'est installée dans ce qu'elle est maintenant. C'est par le zéro arabe qui il y a eu l'essor des mathématiques ; c'est par les algorithmes que l'informatique, la robotique et les recherche de points s'effectuent. C'est pour cela et pour ses capacités et les capacités de ces hommes et de ses femmes que la langue arabe sera la langue du futur de l'humanité. Il n'y a qu'a voir le nombre de chercheurs arabes dans le monde pour se faire une idée juste et non tronquée des possibilités du support humain de cette langue, l'une de plus vieilles du monde et qui, par la masse qui l'utilise renaît chaque jour. Oui, l'amour de la langue arabe doit s'installer chez chaque locuteur dans les quatre coins du monde, pas seulement en Algérie car c'est la langue de l'avenir.
L'Algérie est un pays qui a honoré la langue arabe par le passé, qui l'honore et l'honorera encore dans l'avenir, et la langue arabe a honoré ce pays.
L'Emir Abdelkader communiquait dans ses lettres avec les chefs de tribus et les cheikhs de zaouïas par de jolis poèmes. La langue arabe était largement utilisée par les Algériens avant l'occupation et les Français en savent quelques chose. En effet, des statistiques de 1820 faits par des missionnaires français estimaient que 93% des Algériens savaient lire, écrire et compter. Alors que de l'autres côté de Méditerranée seulement 42% des Français savaient lire, écrire et compter (voir le livre de Kamel Bouchama : L'Algérie terre de foie et de culture, ou encore du même auteur, Lettre à René (ces deux livres ont été traduits à l'arabe par mes soins). Avant 1830, c'étaient les zaouïas qui s'occupaient de l'éducation et de l'enseignement dans tous les cycles. La France, en arrivant en Algérie, a opté systématiquement pour la destruction méticuleuse et ingénieuse de toutes les structures de l'enseignement. L'armée française a occupé et transformé des zaouïas en écuries dès 1831 et tué à tour de bras tous les enseignants de la langue arabe. A ce moment, devant ce danger persistant toutes les zaouïas ont commencé à s'installer en pleine compagne loin des zones colonisées. La France ne nous a donc pas civilisés, elle a détruit notre identité ou, du moins, elle a pensé l'avoir fait car les zaouïas, retirées au fond des compagnes et des zones isolées, ont continué à fournir un enseignement pour maintenir l'identité religieuse, enseignement du coran et du fiqh et quelques notions de langue arabe. Ce n'était pas un enseignement suffisant pour former des érudits, mais nécessaire pour faire face à l'évangélisation et l'acculturation généralisée. Certaines tribus n'acceptaient pas de mettre leurs enfants à l'école française pour éviter la francisation et la dénaturation et la perte de l'identité.
En décolonisant, la France a laissé derrière elle un peuple algérien analphabète à 95%. Ainsi, elle a considéré que la mission pour laquelle elle a colonisé l'Algérie est une mission largement accomplie, car des experts français ont prédit qu'il faut deux siècles pour alphabétiser le peuple algérien.
En sortant, la France a laissé une seule université en Algérie, celle d'Alger Centre avec un peu plus de 500 étudiants algériens, les autres étant des Français, fils de colons européens venus de tous les coins d'Europe, y compris de Malte dont la langue est une daridja arabe occidentalisée et écrite en caractères latins et dont la langue officielle est l'anglais.
L'Algérie d'aujourd'hui a presque 100 universités et plus de 1.600.000 étudiants, un taux d'étudiants par habitants plus fort que celui de la France.
C'est pour cela que la France ne cesse jamais d'actionner ses valets pour semer la discorde et les querelles linguistiques dans toutes les régions de notre cher pays.
L'enseignement des sciences en langue arabe fera certainement avancer le pays rapidement que s'il était fait en français, car l'arabe est la 4ème langue mondiale et le français, est déjà à la 6è ou 7ème place dans le monde. Pour cela il ne faut donc pas réfléchir comme les néocolonialistes ou comme les impérialistes. L'arabe est une langue analytique extrêmement facile et qui, d'après des études russes des années 60, peut servir de langue médiane dans des dispositifs et des logiciels de traduction automatique. En effet, des chercheurs russes avaient proposé d'intégrer la langue arabe dans des axes de recherche pouvant amener à l'inclure dans des machines en tant que langue médiane servant par exemple le passage du français à l'anglais ou de l'espagnol à l'italien. N'en déplaise au dénigreurs de la langue de Antar, d'Al Mutanabbi et de Moufdi Zakaria. Abdelhamid Ben Badis est amazigh, mais c'est lui qui a développé la langue arabe pendant les sombres jours du colonialisme ; il a créé les medersas libres dans tout le territoire algérien et ouvert l'école arabe libre aux jeunes filles algériennes.
Othmane Saadi, s'est dit amazigh arabisé par l'islam et a défendu âprement la langue arabe non pas parce que c'est la langue de l'islam, mais parce qu'elle porte le germe de la civilisation future, ce sera la langue des chercheurs et des inventeurs.
Les maisons d'éditions de l'Etat éditent plus en français qu'en arabe et servent de ce fait la francophonie et la France. Quant aux maison d'éditions privées, sans être subventionnées par l'Etat, ont fait avancer l'édition du livre arabe plus que dans certains pays arabes qui n'ont pas été colonisés par les Français. Le livre en langue française est subventionnée par l'Etat de manière indirecte, car comment une société d'édition continue d'employer 200 à 300 employés à plein temps pour ne produire que 4 à 5 livres par ans en arabe et 20 à 25 livres en langue française ? Voilà pourquoi il faudrait subventionner les maisons d'éditions privées parce que ce sont elles qui maintiennent le développement du livre arabe tant scolaire qu'universitaire.
Il n'y a pas de mythologies arabistes et berbéristes qui s'affrontent en Algérie mais il y a une poignée de penseurs de salons qui discutent à tort et à travers et pensent que leur blablabla est une mythologie. Pour ceux qui connaissent bien l'histoire, les deux grandes dynasties berbères : les Almohades et les Almoravides, qui ont dominé l'Afrique du Nord ont toujours eu l'arabe comme langue commune. Où est la mythologie dont parle monsieur Touhami Rachid Raffa ? Cela se trouve tout simplement dans son imagination ou dans une discussion de salon. Je considère que celui qui dénature les faits historiques de son pays ne peut être qu'un mercenaire à la solde de l'impérialisme et des nouvelles croisades du troisième millénaire.


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