L'ONG internationale de défense des droits de l'homme «Human Rights Watch» (HRW) a appelé, hier vendredi à Beyrouth (Liban), les autorités algériennes à mettre fin «aux expulsions sommaires» de Subsahariens. HRW, qui a cité les témoignages de Subsahariens arrêtés début décembre dans différents quartiers d'Alger, et conduits à Tamanrasset, puis au Niger pour certains d'entre eux, rappelle aux autorités algériennes qu'elles sont signataires de plusieurs conventions de protection des réfugiés. «Les autorités algériennes ont, depuis le 1er décembre 2016, arrêté plus de 1.400 Subsahariens et auraient expulsé au moins plusieurs centaines de personnes au Niger», a affirmé dans son communiqué Human Rights Watch. L'ONG, dont le siège est à New Yrok, ajoute que «les forces de sécurité ont arrêté les migrants dans et autour d'Alger, la capitale, et les ont transportés à 1.900 kilomètres au sud, jusqu'à un camp à Tamanrasset, d'où certains ont été transportés au Niger. Selon HRW, «le gouvernement algérien n'a rien dit officiellement sur l'opération. L'ambassade à Washington DC n'a pas répondu à des questions sur ce sujet. En fait, ajoute HRW, «une expulsion massive et sommaire des migrants, y compris des hommes et des femmes qui ont pu fuir la persécution ou qui ont travaillé pendant des années en Algérie, violerait leurs droits», a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de Human Rights Watch pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord. «Le droit d'un pays de contrôler ses frontières n'est pas un quitus pour le non-droit», a-t-elle ajouté. HRW ajoute que les Subsahariens «transportés par la force à Tamanrasset comprennent des réfugiés et des demandeurs d'asile enregistrés, ainsi que des migrants qui ont vécu et travaillé pendant des années en Algérie», avant de relever qu»'on ne sait pas si des réfugiés ou des demandeurs d'asile se trouvaient parmi les expulsés». «Des convois de migrants expulsés ont été vus dans la ville d'Arlit, dans le nord du Niger, et plus tard dans la ville d'Agadez, plus au sud.» Mais ces témoignages ne sont pas confirmés, admet HRW. «Dans l'après-midi du 8 décembre, les autorités de Tamanrasset ont dit aux migrants qui y étaient encore détenus qu'ils étaient libres de retourner dans le nord. Il n'est pas certain que cette décision couvre tous ceux qui y ont été transportés de force», relève par ailleurs HRW, qui estime qu»en tant que partie à la Convention de 1951 sur les réfugiés, l'Algérie ne peut renvoyer par la force tout réfugié, demandeur d'asile ou tout autre étranger reconnu, à un endroit où il risque d'être persécuté, torturé ou soumis à des traitements inhumains et dégradants.» «Les demandes de quiconque exprimant de telles craintes devraient être examinées dans leur intégralité et des procédures équitables de détermination du statut de réfugié doivent être remplies avant que toute personne ne puisse être expulsée», explique encore HRW, pour qui l'Algérie, «en plus d'être partie à la Convention de 1951 sur les réfugiés, est également partie à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, qui interdit les expulsions collectives de travailleurs migrants et de leurs familles et exige que chaque expulsion soit examinée et décidée individuellement.» «La convention s'applique à tous les travailleurs migrants et à leurs familles, quel que soit leur statut», rappelle encore HRW dans son communiqué, avant de revenir en détail sur les interpellations, en particulier à Dely Ibrahim, et le transfert vers Tamanrasset de centaines de Subsahariens. Dans son communiqué, HRW dit que «les autorités (Algériennes) ne les ont pas examinées pour connaître leur situation ou leur statut de réfugié, pour fournir des informations sur leurs droits ou pour leur permettre de contacter le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ou les représentants consulaires de leur pays d'origine.» Par ailleurs, l'ONG revient sur les déclarations du président «CNCPPDH» Farouk Ksentini sur les Subsahariens. «Farouk Ksentini, le chef de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'homme, une institution d'Etat qui relève de la présidence, a été cité dans le quotidien algérien Assawt Al Akhar le 5 décembre, accusant les migrants de «maladies, y compris le sida. Ces maladies sont monnaie courante dans ces communautés», ajoute HRW, qui cite une autre déclaration de Ksentini selon laquelle «la présence de migrants et de réfugiés dans plusieurs régions du pays peut poser de nombreux problèmes aux Algériens», et que ces migrants «n'ont pas d'avenir en Algérie». Ces remarques ont été «réaffirmées dans une déclaration au site Tout sur l'Algérie», explique encore HRW. Le communiqué de cette ONG rappelle par ailleurs que «l'Algérie est partie à la Convention de 1951 sur les réfugiés et à son Protocole de 1967''. Cette convention «interdit à un pays d'expulser ou de renvoyer un réfugié dans un lieu où sa vie ou sa liberté serait menacée -le principe du non refoulement. Dans les cas d'expulsions qui n'entraîneraient pas le refoulement, les Etats parties à la convention sont interdits d'expulser un réfugié légalement de leur territoire sauf pour des raisons de sécurité nationale ou d'ordre public et dans ces cas, la convention exige que l'Etat accorde aux réfugiés la possibilité de contester la décision.» La Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (LADDH) avait, dans un communiqué, indiqué que «près de 1.400 migrants ont été arrêtés sur décision du wali d'Alger dans plusieurs quartiers de la capitale durant la journée de jeudi 1er décembre 2016, dont un grand nombre du quartier de Bouchebouk dans la commune de Dely Ibrahim. »