La décision de transformer le parking à étages de M'dina J'dida en centre commercial n'est pas impertinente, comme on est tenté de le penser à première vue. Au contraire, c'est une idée pragmatique et une option réaliste qui répond à la situation. La vraie mauvaise décision, elle a été prise onze ans plus tôt, en 2006, avec ce projet surréaliste d'un «parking silo» en plein cœur du souk de M'dina J'dida. Fait plus qu'étonnant, on ne s'est rendu compte de l'histoire des voies d'accès qu'une fois la structure du parking montée, à coups de 100 milliards. On a enfin réalisé, au moment où l'ossature métallique du bâtiment était déjà bien en place et n'attendait que son revêtement, que ça ne pouvait pas marcher à cause des impénitents marchands ambulants qui obstruaient toutes les venelles, trottoirs et chaussée. Alors qu'on n'avait en fait même pas besoin d'études d'opportunité et de faisabilité, mais juste d'un brin de bon sens, pour laisser tomber au départ cette bien mauvaise idée. En 2005-2006, le contexte de la gestion locale était marqué par un discours, assez démagogique, porté vers l'ouverture de l'investissement dans la réalisation de parkings à étages en prévision du projet du tramway d'Oran, comme remède au casse-tête du stationnement dans la ville, de plus en plus étouffée par son parc automobile. On voulait donc se conformer, coûte que coûte, aux mesures et dispositifs préconisés par l'étude du projet du tram, qui suggérait, entre autres, la création de lieux de «stockage» automobile dans des endroits déterminés en fonction de son tracé, notamment. En bon élève, la wilaya s'est ainsi engagée à réaliser trois parkings à étages, qui devaient être sa propriété une fois achevés, ceci alors que six autres structures étaient programmées dans le cadre du Programme complémentaire de soutien à la croissance économique pour la période 2005-2009. On devra se contenter des trois parkings « publics », c'est-à-dire mis sur pied par la wilaya. En effet, le processus d'ouverture du créneau à l'investissement privé a fait long feu puisque l'appel à manifestation d'intérêt plus l'avis d'appel d'offres, lancés en 2006, pour la construction de 6 parkings à étages ont été déclarés infructueux faute d'investisseurs intéressés. Pas plus que les mesures incitatives dans le cadre de l'ex-Calpiref pour rabattre les investisseurs vers ce segment, ceux-ci préférant en général la promotion immobilière et les centres commerciaux. On ne se rend compte de l'évidence qu'a la fin A ce jour, l'on ne sait ni comment ni pourquoi le choix du site pour la réalisation de l'un des trois parkings lancés par la wilaya, celui qui devait être implanté au centre-ville, a porté sur l'ancienne minoterie de M'dina J'dida ? On sait seulement que le terrain était au centre de toutes les convoitises et que pour éviter qu'il n'aille ailleurs, les autorités locales y ont élu domicile pour leur parking via une petite transaction foncière au nom de l'utilité publique. Mais est-ce une bonne raison pour ériger un parking à étages (n'importe où) ? La réponse par la négative va de soi d'autant que, dans le cas d'espèce, il y a eu lors de la réalisation beaucoup de travaux supplémentaires non prévus par l'étude (l'entreprise BATEMCO manœuvrait sur un terrain «miné» à cause des caves et autres silos souterrains ainsi que les risques des travaux d'excavation et de terrassement sur le pourtour du chantier) et donc, forcément, des avenants en augmentation qui ont alourdi davantage la facture, qui a atteint au final le chiffre de 100 milliards. Et ce n'est qu'en 2014, c'est-à-dire avec un retard de plus de sept années, que ce parking à étages a été achevé. Il ne servira jamais en tant que tel, puisque la décision, presque forcée, de le transformer en marché de l'habillement, de cosmétiques et tout ce qui va avec -pour rester dans le même registre d'activité ambiante de M'dina J'dida- a été prise par les autorités locales. Et au lieu et à la place d'un parking à étages de 3.000 véhicules, mal placé, on a eu droit à un centre commercial de 82 locaux. En fait, les travaux de modification n'ont porté que sur les étages supérieurs de cet édifice en R+5, puisque le rez-de-chaussée était dédié à l'origine aux commerces, au nombre d'une trentaine de box, entre 16 et 20 m2. Rectifier le tir Ainsi, a-t-on pu rectifier le tir et éviter que cet investissement d'une centaine de milliards ne parte en fumée. Encore faut-il ouvrir ce nouveau marché et le mettre en service. En effet, ayant confié dernièrement sa gestion et son exploitation à l'EPIC de gestion du marché de gros de la wilaya d'Oran (EGMGWO), la wilaya n'a pas encore donné son feu vert à cet établissement public placé sous sa tutelle directe (le wali est lui-même le président du conseil d'administration de cette EPIC, représenté par le secrétaire général de wilaya) pour l'ouverture et la mise en fonction de cette structure. Il faut noter que le transfert de gestion vers ladite EPIC intervient dans le sillage de la nouvelle tendance où cet établissement se voit confier de plus en plus de marchés de différents types, notamment ceux dits de proximité. En effet, alors que la plupart des municipalités n'arrivent toujours pas à rentabiliser leurs nouveaux marchés couverts, version Batimétal et ce, malgré la souplesse de la directive de la tutelle leur permettant d'exploiter ces équipements à leur guise, une nouvelle option crée la tendance. Il s'agit de l'offre de services proposée par l'EPIC de gestion du marché de gros de la wilaya d'Oran (EGMGWO), en vertu de laquelle celle-ci se charge de la gestion-exploitation de ces structures de commerce de proximité en contrepartie d'un prix de concession. L'accord entre l'APC, en tant que propriétaire de l'équipement public, et l'EPIC, en sa qualité de concessionnaire, est formalisé bien sûr par une convention entre les deux parties. L'EPIC de gestion du marché attend le feu vert Il faut dire que le rabattement sur la piste «convention avec l'EPIC» intervient dans un contexte d'échec presque général du processus de mise en adjudication par les APC concernées de leurs marchés Batimétal, pour un usage en tant que tels ou en tant qu'équipements (à transformer) dédiés à d'autres prestations (salle de sports, salle de fêtes ). Sur un total de 23 marchés de ce genre, à l'actif de la wilaya d'Oran, une quinzaine sont à ce jour fermés et se dégradent à petit feu. Faire en sorte que les marchés de proximité, version Batimétal, servent à quelque chose, quitte à les transformer en salles de sports ou de fêtes. C'était la quintessence du fax du MICL envoyé, la mi-2016, aux walis. Lue de l'extérieur : l'instruction de l'Intérieur voulait limiter les dégâts et sauver les meubles après le quasi-fiasco du plan anti-informel, d'une lourde facture de 14 milliards de DA. Un plan qui n'a pas eu les résultats escomptés, le moins qu'on puisse dire, car l'on a supposé au départ, par un raisonnement causal, qu'il suffisait de construire, à chaque coin de la ville, une structure, un abri-commerçants, pour éradiquer, de facto, le souk informel d'à-côté et faire disparaître, par effet domino, tous les aspects négatifs qui lui étaient liés. L'on savait, évidemment, que le basculement informel-formel n'allait pas s'opérer du jour au lendemain, que le déménagement (des marchands) du trottoir et de la baraque vers la halle couverte, n'allait pas se produire par simple clic et que, pour cela, il fallait recourir à des mises en demeure ainsi que d'autres méthodes pour faire remplacer les « déserteurs » et, qu'à la longue, le marché sauvage finira par se lasser, s'essouffler, se plier sur soi, se contracter dans l'espace et se concentrer, finalement, en quelques mètres carrés d'enclos.