L'attaque de militaires américains au nord du Niger au début du mois, qui s'est soldée par la mort de quatre soldats, par un groupe terroriste d'Aqmi, semble avoir accéléré la décision de Washington de maintenir sa présence militaire et la renforcer en Afrique. Le redéploiement de l'armée américaine est notamment motivé par un possible repli en Afrique des éléments de l'EI, vaincus en Irak et en Syrie. Après la chute de Raqqa et de Mossoul, «l'Afrique est l'un des endroits où nous savons que l'ISIS espère renforcer sa présence», a expliqué lundi le chef d'état-major américain, le général Joe Dunford. «Nous savons à quel point la Libye et le Sinaï sont importants pour l'EI. Nous savons à quel point ils ont essayé de s'établir en Afrique de l'Est et bien sûr, nous parlons maintenant de l'Afrique de l'Ouest», a-t-il souligné au cours d'un point de presse consacré à l'enquête menée sur l'embuscade, qui a coûté la vie à quatre militaires américains le 4 octobre dernier au nord du Niger. Hier mardi, il a présidé à Washington une réunion avec les représentants militaires de 75 pays autour de «la prochaine phase de la campagne militaire» contre l'EI. Le redéploiement de l'armée US en Afrique, en particulier pour contrer l'arrivée des éléments de l'EI dans la région, fera l'objet d'une décision du ministre américain de la Défense. «Nous allons faire des recommandations au ministre» de la Défense Jim Mattis et au président Donald Trump «sur la répartition des unités nécessaires pour répondre au niveau de menace que nous évaluons», a précisé le chef d'état-major américain. Au sein des politiques comme parmi les militaires, la démarche est aujourd'hui orientée vers une présence plus accrue des Etats-Unis en Afrique pour éviter que le scénario syrien et irakien ne se répète avec un afflux massif de terroristes de Daech, après leur débâcle au Proche-Orient. Le sénateur républicain Lindsey Graham avait annoncé vendredi dernier la couleur, en relevant que 'la guerre est en train de se déplacer. Nous allons assister à davantage d'actions en Afrique», avait-il prévenu après avoir rencontré le ministre de la Défense. Après le Proche-Orient, l'Afrique est en fait la seconde zone militaire d'intervention des forces spéciales américaines, qui apportent également un soutien logistique à l'opération française Barkhane dans cinq pays du Sahel (Mauritanie, Mali, Tchad, Niger, Burkina Faso), laissant à la France la tâche de mener le combat contre les groupes terroristes dans cette région avec ses alliés africains. Leur mission principale est la formation des militaires des pays de la région et leur préparation à la lutte antiterroriste. Mais «ils ne sont pas censés partir en mission avec les militaires locaux quand il y a un risque de combat», prévient le général Dunford, qui a annoncé, après l'embuscade au Niger, que «ces règles d'engagement vont changer dans le cas des opérations antiterroristes». En clair, les militaires américains sur le terrain seront autorisés à tirer les premiers sur des «cibles terroristes». La guerre «est en train de se déplacer. Je ne suis pas sûr qu'on puisse dire qu'elle se déplace vers l'Afrique seulement. Nous sommes confrontés à un défi qui s'étend de l'Afrique de l'Ouest à l'Asie du Sud-Est», souligne le chef d'Etat-major de l'armée américaine pour qui, Daech 'va tenter d'établir une présence physique ailleurs qu'en Irak ou en Syrie, maintenant qu'ils ont perdu leur califat de Raqqa et Mossoul». Il a précisé que 'c'est bien pourquoi nous conduisons les sortes d'opérations que nous avons au Niger, pour nous assurer que les forces locales ont la capacité de l'empêcher». Les Etats-Unis comptent près de 6.000 hommes déployés dans 53 pays africains, notamment au Tchad, en République démocratique du Congo, en Ethiopie, en Somalie, en Ouganda, au Rwanda et au Kenya. Au Niger, les Etats-Unis ont une force de 800 hommes, et ils comptent maintenir, sinon renforcer leur présence dans cette partie du Sahel. Malgré l'embuscade de début octobre, «notre intention est de continuer les opérations là-bas», a affirmé le général Dunford. Pour le Commandement des Etats-Unis pour l'Afrique (Africom), ce nombre de 6.000 soldats des forces spéciales en Afrique est insuffisant. Le Congrès américain pourrait voter des renforts de soldats américains en Afrique, pour renforcer leur présence et faire face à la menace d'un afflux de terroristes de Daech, qui pourraient faire jonction avec les groupes d'Aqmi, présents au Sahel.