La rue arabe comme les chancelleries occidentales, ainsi qu'au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, c'est une large réprobation qui a été opposée à la décision du président américain Donald Trump de reconnaître la ville sainte d'Al Qods comme capitale de l'Etat hébreu. Une décision politique qui rebat les cartes géopolitiques dans la région, car elle appuie la volonté inique d'Israël d'y établir sa capitale, au détriment des résolutions de l'ONU sur la ville sainte et les accords de paix conclus avec les organisations palestiniennes sous l'égide de l'ONU. Réunis d'urgence vendredi, les membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont stigmatisé la décision du président Trump et réaffirmé le fragile consensus sur le statut d'Al Qods, qui ne peut être modifié par décision unilatérale. «Toute décision unilatérale qui chercherait à changer le caractère et le statut d'Al Qods pourrait sérieusement saper les efforts de paix et avoir des répercussions graves sur la région», a déclaré le coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, Nickolay Mladenov. «La position de l'ONU est claire: Al-Qods fait partie des questions du statut final pour lesquelles une solution globale, juste et durable doit être trouvée à travers des négociations», a-t-il affirmé. L'ONU est «particulièrement inquiète des risques d'une escalade violente», a-t-il ajouté. L'ambassadeur palestinien auprès de l'ONU, Riyad Mansour, a exhorté «le Conseil à agir rapidement pour qu'il assume ses responsabilités en vertu de la Charte des Nations unies, à la lumière des violations et des provocations vis-à-vis du statut juridique, politique et historique d'Al-Qods et des droits et des aspirations légitimes du peuple palestinien». La décision américaine «n'est pas conforme aux résolutions du Conseil», ont affirmé conjointement les ambassadeurs de France, du Royaume-Uni, d'Italie et d'Allemagne. L'ambassadrice US, Nikki Haley, pense de son côté que «l'ONU a plutôt dégradé que facilité les perspectives de paix au Proche-Orient. Les Etats-Unis sont crédibles aux yeux des deux parties. Israël ne sera jamais et ne devrait jamais être intimidé par un accord des Nations unies ou par quelque union de pays qui ont prouvé leur mépris pour la sécurité d'Israël». Par ailleurs, en annonçant sa décision sur la ville sainte, Donald Trump a dit qu'il envoyait prochainement son vice-président Mike Pence au Proche-Orient. Le grand imam d'Al-Azhar a annoncé qu'il annule sa rencontre avec M. Pence prévue en Egypte le 20 décembre, tout comme le pape des coptes d'Egypte Tawadros II, qui a aussi indiqué qu'il refusait de recevoir le vice-président américain. De même, le président palestinien Mahmoud Abbas a décidé de ne pas recevoir le vice-président américain Mike Pence lors d'une visite prévue à la mi-décembre en Israël et dans les Territoires palestiniens, selon son conseiller diplomatique Majdi al-Khalidi. En Turquie, le président Recep Tayyip Erdogan a annoncé de son côté l'organisation la semaine prochaine d'un sommet sur la question de l'Organisation de coopération islamique (OCI) à Istanbul. La Ligue arabe s'est de son côté réunie hier d'urgence au Caire, au niveau des ministres des Affaires étrangères, avec la participation de M. Abdelkader Messahel. Sur le terrain, au moins quatre Palestiniens ont été tués par l'armée israélienne et plus de 1.100 autres ont été blessés lors de heurts et de raids de l'aviation sur la bande de Ghaza. Lors d'une «journée de colère» vendredi à Jérusalem, en Cisjordanie occupée et dans la bande de Gaza, des milliers de Palestiniens avaient affronté des soldats et policiers israéliens. Plusieurs roquettes ont en outre été tirées depuis jeudi à partir de la bande de Gaza, limitrophe du sud d'Israël, contre le territoire israélien sans faire de victimes. En représailles, l'aviation et l'artillerie israéliennes ont visé des cibles «militaires» dans la bande de Gaza, selon l'armée israélienne. Samedi à l'aube, deux Palestiniens ont été tués dans un raid aérien contre une base des brigades Al Kassam, à Nousseirat, selon un responsable du Hamas. Dans les pays arabes, les manifestations contre la décision américaine de considérer Al Qods comme capitale de l'Etat sioniste se poursuivaient. En Malaisie, des milliers de personnes ont défilé à Kuala Lumpur après la grande prière de vendredi, selon la police. «Ne touchez pas à Jérusalem», «Faites tomber le président Trump», étaient les principaux slogans de cette marche, alors qu'en Indonésie, plusieurs centaines de personnes ont manifesté devant l'ambassade des Etats-Unis à Jakarta. A Bahreïn pourtant, les forces de sécurité ont tiré des balles de chevrotines contre les manifestants, les empêchant de manifester contre la décision des Etats-Unis de reconnaître Al Qods comme capitale d'Israël. Aux Etats-Unis mêmes, plusieurs manifestations anti-décision de Trump ont été organisées, notamment à Chicago. En Europe, un grand rassemblement s'est tenu vendredi Place de la République à Paris. Le Hamas a, dans un communiqué, appelé les Palestiniens à s'opposer aux forces d'occupation et a appelé à une troisième intifadha.