Le régime syrien et son allié russe ont accusé Israël d'avoir mené hier lundi des frappes contre une base militaire en Syrie, où une attaque chimique présumée contre une ville rebelle a provoqué de nouveaux appels à une riposte. Paris et Washington ont menacé le régime syrien de Bachar al-Assad d'une «réponse forte« après avoir confirmé «l'utilisation d'armes chimiques« samedi dans la ville de Douma près de Damas. Mais ils ont démenti avoir mené les frappes contre la base militaire T-4 dans le centre de la Syrie en guerre. Deux réunions étaient prévues plus tard dans la journée au Conseil de sécurité de l'ONU à New York sur l'attaque chimique imputée au régime, et qui a tué, selon des secouristes, près de 50 personnes. Dans ce contexte tendu, quand des missiles se sont abattus sur l'aéroport militaire T-4, connu sous le nom de Tiyas, dans la province de Homs, l'agence de presse officielle syrienne Sana a d'abord pointé du doigt les Etats-Unis, avant de se rétracter et de désigner Israël. «L'agression israélienne sur l'aéroport du T-4 a été menée par des avions F-15 qui ont lancé plusieurs missiles«, a précisé une source militaire citée par Sana. La Russie, qui aide militairement le régime syrien face aux rebelles et djihadistes, a elle aussi accusé Israël, le chef de la diplomatie Sergueï Lavrov dénonçant un «développement très dangereux». En Israël, l'armée a décliné tout commentaire, alors que l'Etat hébreu a mené de nombreux raids contre des cibles en Syrie ces dernières années. 14 combattants tués Au moins 14 combattants, dont trois officiers syriens et des Iraniens, ont péri par la frappe sur l'aéroport T-4, qui selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), accueille des forces russes et iraniennes. En février, Israël a visé cette même cible en affirmant qu'un drone avait été envoyé par l'Iran sur son territoire depuis cet aéroport présenté comme une «base iranienne». Dimanche, les Etats-Unis et la France ont fait planer la menace d'une frappe en Syrie, après des affirmations de secouristes, non vérifiées de source indépendante, sur une attaque présumée aux «gaz toxiques« à Douma, dernière poche rebelle près de Damas que le régime cherche à reprendre pour parachever sa reconquête de la Ghouta orientale. M. Trump a ainsi averti le régime et ses alliés, dont la Russie, qu'ils pourraient «payer le prix fort», et a qualifié M. Assad «d'animal». Le chef de la diplomatie britannique Boris Johnson a lui aussi appelé à une «réponse internationale forte«, lors d'une conversation téléphonique avec son homologue français, Jean-Yves Le Drian. Selon M. Jonhson, l'une des réunions de l'ONU «constituera une étape importante dans la détermination de la réponse internationale». Enquête internationale Il y a un an, M. Trump avait fait bombarder une base militaire syrienne, en représailles à une attaque au gaz sarin imputée au régime, qui avait tué en avril 2017 plus de 80 civils à Khan Cheikhoun (nord-ouest). Le pouvoir d'Assad a toujours nié sa responsabilité dans les nombreuses attaques chimiques qui lui ont été attribuées durant la guerre. Il a aussi démenti celle à Douma. L'allié russe a lui dit que des spécialistes militaires n'avaient trouvé sur place «aucune trace de chlore ou d'une quelconque substance chimique». Mais l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) a annoncé l'ouverture d'une enquête «pour établir si des armes chimiques ont été utilisées». L'OSDH a indiqué ne pas être en mesure de confirmer cette attaque chimique. Selon les Casques Blancs et l'ONG médicale Syrian American Medical Society, 48 personnes ont péri dans l'attaque à Douma et des centaines ont souffert de «difficultés respiratoires». Une vidéo postée par les secouristes et présentée comme tournée après l'attaque présumée montre un enchevêtrement de corps sans vie, dont ceux de femmes et d'enfants, allongés à même le sol, de la mousse blanche s'échappant de leur bouche. Grâce à l'appui militaire crucial de Moscou, le pouvoir syrien a réussi à reprendre plus de la moitié du territoire, au prix d'une guerre dévastatrice qui a fait plus de 350.000 morts depuis mars 2011. Fort de ce même soutien, le régime a finalement fait plier le dernier groupe rebelle présent à Douma, l'obligeant à commencer à évacuer la cité. Des semaines durant, en février et mars, l'enclave rebelle dans la Ghouta orientale a été la cible de bombardements intenses qui ont tué selon l'OSDH plus de 1.700 civils.