Les dessous de la dernière incartade du Maroc, qui fuit ses responsabilités dans la mise en place d'une solution démocratique au dossier sahraoui, commencent à fuiter pour montrer à quel point Rabat peut aller dans l'irréel pour maintenir sa présence au Sahara Occidental. La rupture, pour la seconde fois en moins de dix ans, de ses relations avec l'Iran, sous prétexte que Téhéran aide le Front Polisario via le parti libanais Hezbollah, donne une image du Maroc d'un pays peu crédible dans ses positions et, surtout, qui devient une franchise diplomatique pour les centrales occidentales du renseignement, à commencer par Washington qui n'a pas réagi à cette offre de service du Makhzen. Sinon comment interpréter le moment choisi par le palais royal pour dénoncer l'Iran d'être derrière une soi-disant campagne de déstabilisation du Maroc en exploitant le Hezbollah libanais pour armer et former les combattants du Front Polisario ? Des accusations d'une très grande légèreté qui n'ont en réalité provoqué aucune réaction digne d'intérêt des Américains ou des Européens, très circonspects sur les affirmations marocaines. Avant l'Iran et le Hezbollah, les élucubrations du Makhzen avaient déjà accusé le Front Polisario de collusion avec les franchises terroristes d'Al Qaïda, puis de Daech, dans le but évident pour que les Etats-Unis mettent le Front Polisario dans la liste des organisations terroristes. Le stratagème de Rabat n'a pas marché et Washington avait même, lors de la désignation de son diplomate Christopher Ross comme envoyé personnel du SG de l'ONU, annoncé qu'elle appuierait ses efforts pour résoudre ce conflit. Rabat aurait voulu que la réaction des monarchies pétrolières du Golfe soit d'égale ampleur avec celle d'un soutien, qui n'est pas venu, de Washington à une démarche suicidaire du Maroc, en accusant gratuitement l'Iran de soutenir la RASD. Pour autant, beaucoup estiment que cette «offre de service» du Makhzen intervient à un moment où les Etats-Unis pourraient se retirer de l'accord sur le nucléaire avec l'Iran. D'autant que l'annonce de la rupture de ses relations diplomatiques avec Téhéran intervenait au lendemain d'un forcing israélien pour que le président américain Donald Trump annonce le 12 mai prochain que les Etats-Unis se retirent de l'accord sur le nucléaire. Si Israël, qui possède l'arme nucléaire, a accusé Téhéran de poursuivre un programme de fabrication d'une bombe atomique, le Maroc, lui, a fait mieux: il a joué un rôle indigne de rabatteur et, fatalement, savait que sa décision serait applaudie par les adversaires de l'Iran, c'est-à-dire les pays arabes du Golfe, Arabie Saoudite en tête, un pays qui est en train de mener la région dans une dangereuse spirale guerrière. Le Maroc, et cela n'est un secret pour personne, veut garder sous sa coupe un territoire qu'il occupe illégalement au regard des lois internationales et, à ce titre, est prêt autant à toutes les compromissions qu'aux plus infâmes calomnies. Car accuser l'Iran d'armer le Front Polisario et jeter le discrédit sur le Hezbollah, c'est pratiquement délocaliser le conflit du Sahara Occidental au Moyen-Orient. Le tour de «passe-passe» du Makhzen, qui excelle dans l'art des volte-faces diplomatiques, a été rendu possible grâce aux querelles de chapelle qui déchirent, au grand bonheur d'Israël, l'Arabie Saoudite et l'Iran.